Troisième

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- Tu te souviens la première fois que je t'ai vue ?

Il murmure. Car c'est un secret. Un petit mot de rien du tout, qui navigue entre nous, écarlate rouge passion.


- T'étais là, assise au milieu de ce diner, perdu au milieu de nulle part. Ton sweat-shirt était trop grand pour toi, les manches tombaient sur tes mains. T'en avais rien à faire, tu regardais par la fenêtre comme si tu voulais te faire engloutir par la nuit, comme si, en un battement de cils, elle aurait pu t'absorber dans ses limbes.

Il s'arrête, et puis :

- Putain, qu'est-ce que t'étais belle, Delphine.


Je ris.


- Je me suis approché. Parce que t'étais là, comme une néréide. Je te voyais échouée sur cette table, cigarette au coin des lèvres. Au bout de tes doigts gisait un briquet. Un mouvement, et il aurait allumé ta cigarette sous un feu d'interdit. Ouais, t'étais ce mirage poétique. Impossible. T'étais hors de ma portée. Et dès l'instant où je t'ai vue, j'ai su que tu m'appartiendrais jamais. Que tu serais toujours en train de me filer entre les doigts, comme le sable s'écoule entre les mains de celui qui l'attrape. Grain par grain, ce n'était qu'une question de temps avant que tu ne disparaisse.



- Camille ... je suis encore là.



- N'as-tu seulement déjà été avec moi ?






Je me tais.





...

Téléphone RoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant