Falling apart, 44

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-Voie 6, le train Gongryong Intercités no 4805 quittera la gare voie 6 en direction de Daegu. Éloignez-vous de la bordure du quai. Et Yoongi sanglotait tellement fort, complètement perdu. Prenait-il la bonne décision en fuguant ainsi ? Et si ses parents demandaient aux autorités de le retrouver ? " Non ils ne tiennent pas à moi à ce point. Et puis ça leur fait une bouche de moins à nourrir. " Il sortit un mouchoir de sa poche afin d'essuyer ses larmes, sentant que le train avait commencé à bouger. Et malgré tous ses efforts pour se retenir, il s'était finalement recroquevillé sur lui-même pour pleurer sur ses genoux. Il avait l'impression qu'il n'allait pas y arriver tout seul, Hoseok lui manquait, Jimin lui manquait, et même ses parents lui manquaient malgré lui.

Yoongi se redressa alors, encore secoué par ses sanglots. Son téléphone dans la main il hésitait : s'il appelait Hoseok maintenant, il savait qu'il voudrait rentrer dès qu'il entendrait la voix du roux, mais c'était impossible qu'il retourne chez lui maintenant. Il n'avait plus nulle part où aller.

Il sortit la bague que Hoseok lui avait donné pour l'embrasser, reniflant encore deux trois fois avant de la passer à son doigt.

Finalement Yoongi s'adossa à son siège et recommença à pleurer. Il se sentait juste pathétique de pleurer comme ça sans s'arrêter, mais c'était surtout parce qu'il n'arrivait pas à faire autrement qu'il continuait.

Entendant quelques bruits précédant l'arrivée d'une femme que le blond vit du coin de l'œil, le jeune homme essuya ses larmes à l'aide des manches de son blouson aux motifs militaires, tournant sa tête vers la fenêtre en faisant semblant de n'avoir versé aucune larme, reprenant cette attitude de dur à cuir peu représentative de sa vraie personnalité.

Prétextant à chaque fois regarder quelque chose ou quelque part d'autre, Yoongi rassemblait des informations visuelles sur la passagère en face de lui. Femme de plus de trente ans. Mince. Cheveux noirs. Style rétro. Habillée comme une veuve, tout en noir. De la tête aux pieds. Élégante. Mystérieuse. Elle regardait par la fenêtre. Pas de bague de mariage, donc peu, pour ne pas dire pas d'informations de ce côté là. Poils blancs sur sa robe. " elle a des animaux ? " Oui, Yoongi était plutôt le genre analyste, à cause de ses tendances paranoïaques.

-Tu es plutôt jeune pour voyager seul. Il releva les yeux vers elle, surpris.

-J'ai dix-huit ans...madame... Ajouta-t-il au dernier moment.

-À cette période de l'année ce ne sont pas les vacances, je me trompe ? Yoongi secoua la tête, déglutissant. Tu n'es pas censé être en cours ? Le blond la dévisagea, la trouvant assez intrusive d'un coup.

-Si. Je devrais. Alors qu'elle ne l'avait pas regardé une seule fois, elle tourna soudainement la tête vers lui. Et Yoongi était presque sûr qu'il préférait lorsqu'elle regardait par la fenêtre ; il baissa les yeux.

-Pourquoi es-tu à bord de ce train alors ? Yoongi mit un temps à répondre, il n'osait pas lui dire que c'était un détail qui concernait sa vie privée.

-...J'ai des problèmes, j'imagine.

-Graves au point que tu doives fuguer ?

-Probablement. Elle décroisa ses jambes afin de les recroiser différemment, continuant de regarder Yoongi avec cet air intimidant.

-Tu as de la famille là-bas ? Le blond la dévisagea : elle était si bizarre... Là-bas...à Daegu, là où il voulait recommencer sa vie.

-Non madame. Elle fronça les sourcils.

-Et que comptes-tu faire alors ?

-Sauf votre respect madame, Il s'inclinait. je pense que toute cette conversation est un peu trop personn—...

-J'avais un fils qui te ressemblait.

-...Pardon ? Yoongi se releva, les mains toujours posées sur ses genoux, les yeux ronds.

-Je disais que mon fils te ressemblait trait pour trait. Yoongi fronça les sourcils. Lui-aussi est parti comme ça il y trois ans.

-...Où... Yoongi baissa les yeux. Où est-ce qu'il est maintenant ? La femme le fixa longtemps avant de détourner le regard, retournant à contempler le paysage.

-Tu devrais dormir, le voyage est un peu long. Yoongi ne dit rien ; il était épuisé mais il détestait dormir dans les transports, surtout quand il n'était pas persuadé que l'environnement était sûr. Cette dame pourrait être n'importe qui, et lui faire ou lui prendre n'importe quoi pendant qu'il roupillait. Néanmoins ses paupières commençaient à tomber malgré lui, sa tête appuyée contre la fenêtre ; il dormait, récupérant au moins une partie du sommeil qu'il n'avait pas pu avoir cette nuit. Et puis, pleurer l'avait fatigué mine de rien.

Pleurer. C'était la seule envie qu'éprouvait Hoseok. Il était maintenant seul à Gwangju, tout ce qui lui restait de Yoongi était ses cigarettes et son briquet. Les larmes ne cessaient de lui monter aux yeux, il se retenait.

Les parents de Yoongi étaient passés chez lui à treize heures, et la situation était très vite devenue orageuse entre eux et les parents du roux. Le premier couple était venu dans un premier temps accuser les Jung de cacher leur fils chez eux avant de les accabler de sa disparition lorsqu'ils eurent compris qu'il n'était pas, et n'avait jamais été là.

Les insultes avaient fusé, Hoseok avait tout entendu depuis l'étage supérieur, debout devant la rambarde de l'escalier. Ils avaient parlé de la relation des deux garçons, s'accusant chacun d'avoir laissé cela arriver, comme si leur amour était un crime.

Les Min disaient que tout ça était de la faute des Jung, et qu'ils avaient contribué au départ de leur fils, et les Jung disaient que Yoongi n'était qu'un délinquant, et qu'il avait de toute façon une mauvaise influence sur Hoseok. " Si vous saviez comme vous avez tort. "

Hoseok était resté en haut, silencieux ; il savait que participer au débat ne lui apporterait rien de bon et qu'il allait sûrement perdre la face devant les Min et commencer à sangloter en essayant de leur ouvrir les yeux pour qu'ils comprennent que c'était eux, qui avait déclenché la bombe à retardement en laquelle Yoongi s'était transformé.

Que s'il était parti, s'il avait explosé, c'était bien à cause d'eux, et non de Hoseok ou de ses parents. Alors ce culot qu'ils avaient de venir chez lui lui faire porter le chapeau le dégoûtait tout simplement. À tel point qu'il en avait pleuré, et s'était enfermé dans sa chambre, dévoré par une culpabilité qu'il ne devrait pas avoir à ressentir ; rongé par le regret du " et si ? " et de remords qui l'accusaient d'avoir laissé Yoongi tout seul alors qu'il avait besoin de lui.

-Hoseok, tu devrais venir manger, il est quinze heures quand même. Essaya son père, dont l'épouse l'avait forcé à aller au moins voir si Hoseok avait besoin de quelque chose.

-J'ai pas faim. Rétorqua-t-il, de l'autre côté, assis sur son lit, jouant avec le briquet de son petit-ami.

-Je peux t'apporter un plateau si tu veux—

-J'ai dit que j'avais pas faim ! TaeHo resta impuissant devant la porte, verrouillée. Il se doutait bien que Hoseok devait être en colère, et l'impression de ne pas avoir rempli son rôle correctement lui empêchait de réclamer au roux du respect ; au fil du temps, Hoseok avait commencé à le traiter comme lui le traitait au quotidien. Il ne le regardait plus, et ne lui disait que rarement bonjour. Il était déjà tard lorsqu'il avait compris ce qui se passait.

-Ta mère a fait des saucisses. Il y eut un long silence. Si Hoseok ne descendait pas alors qu'il y avait des saucisses au menu, c'était qu'il n'allait vraiment pas bien.

-J'en veux pas. Le roux entendit son père s'éloigner, avant de revenir dix minutes plus tard, faisant plus de bruit que tout à l'heure.

-Je te dépose à manger devant la porte au cas où... Et de nouveau, les bruits de pas s'estompèrent. Hoseok attendit un peu, déverouillant ensuite la porte afin de récupérer le plateau en silence. Le post-it collé à la bouteille d'eau qui lui avait été amenée attira son attention : " papa et maman t'aiment ".

Hoseok fit comme s'il n'avait rien vu, commençant à manger, les larmes aux yeux.

𝐞𝐜𝐥𝐢𝐩𝐬𝐞, y.seokOù les histoires vivent. Découvrez maintenant