Chapitre 2 : Dernière CAF

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PDV Abby, 20H14, suite du Flashback.

Arrivée à la CAF, la plupart des invites étaient déjà là et un DJ diffusait de la musique rythmée et entraînante. Un amat de lycéens venant de différents établissements dansaient ensemble collés, serrés. Un homme à moitié bourré me percuta de plein fouet:
-"Hey ma jolie tu veux boire un verre ?"
Il se colla à moi et une odeur d'un vague mélange d'alcool et de cigarette me parvint au visage. Je lui fis un mince sourire, il me tendit de sa main droite un gobelet rouge plutôt familier, à l'intérieur un liquide douteux s'y trouvait. Je le remerciai et continuai ma route. Au loin, à l'extérieur j'aperçus la tignasse brune de Derek. Comme je m'y attendais, il était entouré de sa foule en délire qui ne se composait pratiquement que de bimbos blondasses et de son équipe de Football. Je voulais le rejoindre pour lui annoncer que sa soirée était extra, toute la semaine pour lui avait été un enfer : il était si inquiet que sa fête soit un désastre : "Mais heureusement que sa collante petite amie avait été là pour le soutenir dans cette dure épreuve..." ,pensais-je avec ironie bien entendue. D'ailleurs où est-ce qu'elle est celle-là, c'est marrant d'habitude elle est accrochée à son bras, telle une moule à son rocher... Mais enfin moins je la vois, mieux je me porte. Je traversais alors le géant salon de Derek, j'en profitais pour admirer la sublime décoration de la CAF. "CAF" venait du latin "celebratio æstas finis" ou quelque chose comme ça. Cela voulait dire en gros "la fête de fin d'été". Cette célébration estival était pratiquée depuis des décennies par les jeunes de plus de 16 ans dans les états de Caroline; mais les meilleurs se passaient quand même dans celle du Nord, comme tout le monde le savait.
La soirée s'étendait à perte de vue, il devait y avoir au moins mille personnes. Des gens dansaient à l'extérieur, certains se baignaient même dans la piscine d'un magnifique bleu turquoise. Quand j'atteignis son bord, une pétasse éclaboussa ma robe bustier rouge bordeaux. Une frite se trouvait sur une table à ma droite, je la pris fermement et lui balançai à la tronche, elle ne cilla point. Soudain, un éclat de rire provenant de derrière moi me réchauffa le cœur . Deux grands bras musclés me serrèrent par la taille, John mon merveilleux petit ami me colla contre son corps parfait. Il me chuchota doucement à l'oreille:
-"Mon cœur, tu es enfin arrivé tu m'as tellement manqué..."
Je me retournai vers lui et nous nous embrassâmes langoureusement...
Sa langue chatouilla délicieusement la mienne, au début légèrement puis de plus en plus sauvagement; je commençais à avoir chaud. Je lui mordis sa lèvre inférieure, elle était chaude et lisse. Ses mains descendirent jusqu'à mon dos délicatement, je voulais plus... Mais une quinte de toux nous sortit de notre cocon. Mes yeux fixèrent alors le sol, au début je vis deux escarpins noirs puis peu à peu mon regard se posa sur cette petite sa**** habillée d'une jupe moulante, un mini top blanc nacré qui laisse entrevoir son nombril, accompagné d'un blouson sans manche écaillé. Ses cheveux retombaient sur ses épaules, ils étaient justes magnifiques, bouclés à la perfection. Elle m'avait toujours énervé celle-là :
-"Qu'est-ce que tu regardes Megan ? Tu as perdu ton mec ou tu prépares peut-être un plan infaillible pour prendre le mien ? C'est ça ?"
Autour du nous les gens avaient formé un cercle et nous dévisageaient fortement. Il n'y avait plus un seul bruit.
-"Mmh.. laisse-moi réfléchir.. Non, désolé John mais tu n'es pas mon style et puis je préfère voler un mec qu'avoir un ..."
Derek lui coupa la parole :
-"Meggy, chut s'il te plaît bébé ne dis pas un truc que tu pourrais regretter après... Regarde tout le monde nous fixe, puis pense à moi et à la CAF..."
Il lui disait ça d'un ton implorant. Au fond de moi je savais que j'avais été méchante avec Megan mais je me devais de garder la réputation de la cheerleader parfaite. C'est-à-dire critiquer quiconque s'attaque à moi.
Agacée par son comportement mais touchée par la détresse de Derek, je m'en allai en direction de la maison pour me réchauffer un peu quand celui-ci m'interrompit :
"Abby, tu me refais plus jamais ça ok ? J'ai déjà été assez gentil de t'inviter donc tu pourrais au moins honorer ta présence ici ! Et puis c'est pas Parce que Megan est idiote qu'il faut que tu le sois aussi !", me lança-t-il avec un regard noir..
En même temps qu'il me parlait, il avait saisi mon poignet violemment et ça me faisait très mal. Quand John s'approcha, il le lâcha aussitôt et partit à la rencontre d'un nouveau couple qui venait d'arriver. Mon copain me demanda si ça allait. Je répondis béatement que oui; même si au fond je savais très bien que non.. Ce stupide Derek et son ego démesuré ! Il ne pensait qu'à sa célébrité et se fichait de tout le reste ! Il avait bien changé depuis le début de l'été.. Et pas en bien.
Et encore, s'il n'y avait que ça qui faisait que ça n'allait pas... Mais enfin, je n'avais pas le temps d'être déprimée; pas maintenant, pas aujourd'hui ! Car tout ce qui importait c'était que j'étais tranquillement dans les bras de John profitant de l'instant présent à me soucier de rien. J'étais tellement bien, la rentrée était dans quelques jours mais j'avais encore le temps de m'occuper de tout ça. Les gens autour de moi dansaient, rigolaient, mangeaient, et surtout profitaient. Tout le monde était heureux, et c'était ça qui comptait le plus. Alors que je rêvassais j'entendis le bruit caractéristique d'une trompette. Et de ce que je pouvais distinguer, la personne qui avait soufflé dedans ne savait pas en jouer. Je me retournai alors vivement comme la plupart des gens. Et je vis la silhouette de Jake debout sur la table, près de la piscine.
-"OYEZ ! OYEZ ! Votre attention s'il vous plaît ! -la musique s'interrompit-s'il vous plaît votre attention ! Ce n'est pas qu'on ne s'amuse pas ici mais.. -il lança un petit regard en coin à Dereck qui était sur le point de répliquer- si on pimentait un peu les choses avec un action ou vérité ?"
Sa proposition fut aussitôt acceptée, personnellement je n'avais pas franchement envie, mais bon ça avait l'air de faire plaisir à tout le monde alors.. Soudain un garçon plutôt grand et aux cheveux aussi roux que les poils d'un renard s'écria :
-"Un action ou vérité, c'est une blague ou quoi ? Alors c'est ça la CAF ?! La soi-disant "meilleure fête de tout l'état de Caroline du Nord !" Et je cite notre hôte "celle durant laquelle toutes vos rencontres sont importantes et où chacune de vos actions à une conséquence..." Et j'en passe ! Vous vous foutez de nous ! On est des plus des gamins merde !".
Et tout le monde se tut d'un coup. Ce garçon je le connaissais vaguement, il avait été dans ma classe en seconde et avait eu l'art de gâcher l'ambiance toute l'année... À cela Jack répliqua simplement :
-"Euh, dégage si ça te plaît pas ! Jack n'avait vraiment pas le sens de la reparti et ce, depuis que je le connaissais. À cette parole, le garçon aux cheveux roux partit en direction de la forêt, son visage rempli de haine. Jake descendit de la table, sa trompette a la main et se dirigea vers le salon où les personnes partantes pour l'action-vérité le suivirent. John me demanda:
- "Tu veux y aller ?"
-"Oui pourquoi pas..."
Je venais d'apercevoir que Megan, elle, s'était dirigée vers la grange au fond du jardin où Derek venait de disparaitre. Il avait été accompagné d'un jeune homme que je ne connaissais pas et, sur le moment, cela me troubla.
Nous nous dirigeâmes ensuite John et moi vers l'immense salon de Derek où une trentaine de personnes étaient assises en cercle. Un gage venait d'être donné à une fille rondelette, et d'après ce que je voyais elle devait insérer sa langue dans l'oreille d'un petit maigrichon, ce qui avait l'air -étrangement- de fortement lui plaire. Nous nous regardâmes John et moi et nous éclatâmes d'un grand rire. C'était répugnant.
On prit place dans le cercle, John me caressait la main comme pour me rassurer, en attendant que vînt notre tour de gage. Plusieurs personnes durent s'emballer, raconter une histoire érotique, leur plus grand fantasme, et un garçon du nom de Frank dut se mettre le plus de légumes possible dans le caleçon. Encore en train de rire du dernier concombre que Frank avait réussi à introduire, Jack me regarda avec un air de chasseur guettant sa proie:
-"Abby ! Finie de rire ma poule : action ou vérité ?"
Vu ce que je venais de voir comme gages sordides mais certes drôles, je choisis vérité.
-"Mmh, qu'est-ce qu'on pourrait demander à la petite cheerleadeuse à la vie parfaite... Raconte-nous le pire truc, le pire souvenir de ta vie !", dit-il tout excité. Je me raidis d'un coup et John le sentit aussitôt. Il avait arrêté de me caresser la main; tout le monde me regardait, je me levai d'un coup et sortis dans le jardin, John sur mes talons.
Il fallait que je me calme. Mais comment pouvait-il me poser cette question ? Oui il ignorait, certes, mais c'était trop dur à avouer... Quand je fus arrivée à la limite du jardin je me mis la tête entre les mains. John était arrivé à ma hauteur et me caressait délicatement le dos. C'est ça que j'aimais chez lui, ça ne le dérangeait pas de ne pas savoir ce qui n'allait pas, il voulait juste que j'aille bien, c'est tout, je l'aimais de tout mon cœur pour ça..
-"Mon coeur ? Tu veux que je te ramène ?
Il m'embrassa sur le sommet du crâne, je croisai son regard de velours. Oui, il était parfait.
La voix de Jack venant du salon me parvint; il me disait de revenir, qu'il ne comprenait pas ma réaction.. Je n'y fis pas attention... Mes pensées étaient encore tournées sur ce qu'il venait de se passer. Je ne voulais pas y retourner, je ne voulais pas avoir affaire à la vérité. À ma gauche, provenant de la grange je vis un des fidèles acolytes de Derek ouvrir la porte. Ils étaient en train d'en sortir Derek qui avait l'air mal en point. De la fumée sortait de la porte. Je n'eus même pas le temps de savoir ce qui se passer : dans la rue j'entendis une moto partir en trombe, et je distinguai le regard du copain à Derek. Il restait figé sur place :
-"AU FEU ! AU FEU ! s'écria-t-il plusieurs fois.
La panique se répandit d'un coup, les personnes étant dans la piscine tournèrent vivement leurs regards vers la grange et sortirent s'habiller. John me regarda, prit ma main et nous partîmes le plus loin possible.
C'était la panique total, les gens autour de nous pleuraient et criaient...
Certaines personnes appelaient même leurs proches...
D'autres, secoués par la scène ne bougeaient pas, et restaient tétanisés la bouche grande ouverte. Le feu se propageait à la vitesse de l'éclair. Nous étions pris au piège, ses flammes rougeoyantes nous entouraient de part en part. J'avais si peur, je sentais la chaleur me brûler le visage, quelques larmes dues au stress coulèrent le long de mon visage suant. Mon John me prit dans ses bras protecteurs, me caressant doucement les cheveux toute en cherchant une sortie des yeux. Personne ne semblait nous voir, ni nous entendre. Les gens continuaient à courir en hurlant, au loin j'apperçus Megan. Elle nous regardait et semblait paniquée. La connaissant elle sauverait sa peau en premier. Je la vit courir vers la porte d'entrée de la maison; aussitôt je sentis quelque chose me faire mal au fond de moi. J'avais toujours pensé que elle et moi, on ne se haïssait pas autant que ce que l'on pouvait pensé mais j'avais eu tort. La panique s'empara de moi alors je me mis à crier "À l'aide !" comme une malade. John fit de même, lui aussi n'avait plus d'espoir. Soudain quelqu'un cria:
"Attendez je vais vous aider ! Surtout ne bougez pas !!"
Cette voix, je connaissais cette voix : c'était celle de Megan. Elle était revenue pour nous, un extincteur en main. Les flammes peu à peu disparaissaient à mesure qu'elle actionnait l'objet. Megan me tendit la main, je la pris et sortis de là puis d'un geste du visage je la remerciai. John m'entraîna avec lui, loin de la maison. Je tournai mon visage pour voir où Megan était. Elle avait disparu. J'espérais que tout irait bien pour elle. Hein mais qu'est ce que je dis ? Le feu me faisait délirer. Nous atteignîmes la route après quelques instants et la traversâmes. Puis plus rien. Trou noir. Je me rappelle juste d'un corps qui se fait éjecter, d'un crissement de pneu, d'une couleur jaune vif aveuglante, d'un cri déchirant et de larmes amères.

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