Ils atteignirent Kallahorne le lendemain matin. Kalänon contourna la grande muraille de pierre grise vers l'Ouest et arrêta le wagonnet-roulant sous un petit abri prévu pour ces engins. Il saisit le large câble de fil de fer accroché au mur et le fit passer dans les essieux de chaque roues du wagonnet-roulant puis amena l'extrémité du câble au cadenas accroché au mur. Kalänon prit la clef du cadenas et le grand sac de toile qui contenait les têtes des Goules. Puis les deux mercenaires se dirigèrent vers les grandes portes en bois de la cité. Les gardes ouvrirent la porte et les laissèrent entrer.
L'avenue principale, comme les autres rues, étaient jonchés de corps sans vie de mendiants et de miséreux, certains même commençant à se décomposer. Au loin, sur la colline, on pouvait apercevoir les ruines du château des Vafenheim, ancienne famille royale du pays. Six ans après le début de la Vague Blanche et du Mal-froid, en l'an 1890, la révolte qui grondait alors depuis des mois éclata. Le château avait été pris d'assaut par les citadins, affamés, car leurs récolte et productions n'étaient pas alors suffisantes. La famille royale ne leur avait alors pas donné de quoi subsister, et les questeurs passaient toujours aussi régulièrement récupérer une partie des récoltes des paysans. Alors le peuple se souleva et ils prirent le château des Vafenheim. Ils débusquèrent le roi et la reine. Quelques membres de la famille royale tentèrent de fuir. Tous furent tués et le roi et la reine exécutés en place publique.
Depuis aucun gouvernement ne s'était installé. L'illégalité était devenue légale. Esclavagiste et vendeurs de drogue se trouvaient à tous les coins de rues, ou presque. Les mendiants n'étaient plus si rares. Les villes avaient gardé un système de maire, mais chaque ville avait sa propre législation. Ce qui était légal dans une ville ne l'était pas dans une autre. Et les maires n'étaient somme toute que des représentants de la ville, sans aucun réel pouvoir. Seuls les plus forts détenaient le pouvoir.
Parmi tout ce chaos, seules les guildes trouvèrent un salut. Elle se modifièrent en profondeur, changeant leurs rôles pour lutter contre les Goules -les morts du Mal-froid qui étaient revenus à la vie quelque jours après leurs morts respectives -. C'est grâce à l'apparition de ces morts-vivants que les guildes purent s'imposer et grandir. Elles ne remplissaient pas toutes les mêmes fonctions : certaines étaient de guildes de mercenaires, chargés de chasser et abattre les goules, les guildes médicales, spécialisées dans les soins en tout genre, et les guildes de ravitaillement, qui s'occupaient de réapprovisionner les villes en nourriture et autres articles de première nécessité. De toutes les guildes, celles de ravitaillement étaient sans doute les plus polyvalente.
Abriel et Kalänon remontèrent l'Artère, comme l'on nommait la rue principale de la capitale. Ils bifurquèrent à gauche à l'avant dernier croisement de la rue principale, dans une petite ruelle sordide. Comme dans toute rues qui menaient à une guilde c'était là que les mendiants étaient les plus présents. Les mendiants ne perdaient pas espoirs, d'un jour voir quelques Dramids glisser de la mains des mercenaires. Cela n'arrivait pas ou très peu. Enroulés dans leurs draps et fourrures crasseuses ils tentaient de se protéger tant bien que mal du froid mordant. Un froid que tous, mendiants comme mercenaires ou simples citadins ne connaissaient que trop bien depuis plus de dix ans.
Les deux camarades enfin entrèrent dans le bâtiment de la guilde. Il s'agissait d'une ancienne et très grande maison d'une famille noble. Le rez-de-chaussée avait été aménagé en une sorte de cantine. Il y avait cinq rangées de trois tables de huit à dix places chacune et sur le mur du fond se trouvait un tableau de bois grossièrement taillé sur lequel étaient placardés de nombreuses affiches. Sur la droite du tableau se trouvait un bar, avec une étagère remplie de bouteilles d'alcools. Sur la gauche se trouvait le bureau des primes, en d'autres termes le bureau du Maître de guilde. Artas, le Maître de guilde de la Flamme Pourpre, un homme de grande taille et de forte musculature avait la tête penchée sur des documents qui s'amoncelait sur son bureau, principalement des documents de primes. Il passa sa main sur son front, pour en essuyer la sueur qui coulait, puis la passa dans ses cheveux blonds et fins tenus en une queue de cheval.
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Le Chant des Neiges
FantasyLe monde de l'Ælegesëa traverse une grande crise. Depuis la Vague Blanche, une tempête qui dura dix ans, le monde est couvert de plusieurs mètres de neige et de glace, et la magie n'est désormais plus qu'un ancien souvenir. Abriel Duclerc et Kalanön...