Souvenirs d'une lettre effacée

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Il aura suffi d'une lettre. Une simple feuille dans une enveloppe cachetée à la cire comme plus personne ne le faisait encore actuellement. Elle était belle pourtant. D'un beau papier blanc agréable au touché, une signature soignée à l'encre rouge, une enluminure des plus radieuse et fleurie, tout était fait pour plaire. Tout du moins, c'est ce que j'espérais. Bien entendu, je m'étais trompé.

Ça partait d'une bonne intention à la base. Celle de vouloir être honnête, d'arrêter de cacher la vérité, de ne plus avoir à mentir. C'était plus simple de s'inventer une vie, d'être quelqu'un que l'on n'est pas, de garder ce masque souriant sans réellement y croire. Alors pourquoi tout abandonner sur un coup de tête ?

Peut-être par peur. Par peur de ne plus vraiment discerner la réalité du reste. Par peur de perdre un être cher qui découvrirait un jour la triste vérité. Par peur de ne plus savoir, de ne plus comprendre vraiment pourquoi ou comment tout cela avait débuté. Mais c'était le choix que j'avais fait. Je me devais de l'assumer.

J'avais alors commencé à écrire cette lettre après une journée semblable à celle-ci. Assis à mon bureau, stylo à la main, j'étais resté pensif des heures durant à regarder le monde évoluer à ses habitudes à travers la fine couche de verre de ma fenêtre. J'hésitais sur les mots à employer. Exprimer ses émotions, c'était complexe, surtout quand on ne sait pas vraiment soi-même ce que l'on ressent. Les feuilles de brouillon s'amoncelaient déjà par terre, chiffonnées, déchirées, ou tout simplement encore vierges. Je n'arrivais pas à empêcher mes mains de trembler, sans d'ailleurs savoir si j'en avais véritablement l'envie. Les voir palpiter me donnait la sensation d'être vivant, que mon corps réagissait de lui-même à quelque chose, même si cela n'était pas forcément un sentiment positif. Le bruit du capuchon du stylo tintant contre mes phalanges me faisait lui aussi du bien, brisant le silence dans lequel je m'étais isolé. Combien de temps s'était écoulé avant que je ne sorte de ma torpeur ? À l'heure actuelle, j'étais toujours incapable de répondre à cette question. Je ne me rappelle que de la lumière du soleil couchant qui m'avait fait cligner des yeux. Ma feuille était restée blanche tout ce temps.

J'étais donc resté là, fixant ce vide que j'essayais tant bien que mal de combler. Tout s'emmêlait dans mon esprit. La pleine lune éclairait mon bureau de sa faible lueur, la pluie s'était mise à tomber et frappait contre la vitre face à moi. Elle paraissait si bruyante alors que ce n'était encore que de simples gouttelettes. Je fermais les yeux, essayant de me concentrer, mais des larmes se mirent à couler sur mes joues.

Je ne comprenais pas. « Ce n'était pas comme si j'avais réellement le choix ! » essayais-je de me convaincre. Alors pourquoi était-ce si dur ?

« Allez, lance-toi. Il le faut. »

Une petite voix dans ma tête me répétait ces mots encore et encore.

« Tu ne peux plus rien faire de toute façon. »

Tais-toi.

« Tu ne pourras rien changer. »

Tais-toi.

« Il ne pourra jamais t'aider. »

Tais-toi !

J'envoyai mon stylo contre l'un des murs de ma chambre. Il fit un bruit sourd avant de rebondir sur mon lit. Le visage dans les mains, je laissai la tristesse et la colère m'envahir. J'en avais marre. Il fallait que j'écrive. Que je lui écrive. Que je lui dise pourquoi.

Mon téléphone dans ma poche se mit à vibrer. Je n'avais même pas besoin de regarder pour savoir de qui il s'agissait. J'esquissai un sourire. Je ne répondrai évidemment pas, et écouterai comme d'habitude son message plus tard quand l'envie m'en prendrait. Il avait le don de toujours appeler au mauvais moment, comme s'il sentait qu'il se passait quelque chose.

Mais c'était le coup de pouce dont j'avais besoin.

J'allai donc chercher mon stylo, et me mit à écrire.


Gab... Pardon.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 21, 2020 ⏰

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