Partie 1

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Leurs regards s'étaient croisés pendant une fraction de seconde. Elle l'avait trouvé charmant, très charmant même, mais elle passa outre durant toute la durée de la formation ; la jeune femme avait pour habitude d'être rejetée. Et puis, elle le trouvait seulement attirant, cela ne signifiait pas qu'elle voulait un quelconque lien avec lui.

Tout cela était vrai jusqu'à ce qu'il commence à montrer de l'intérêt pour la jeune femme. Des questions, des coups d'œil, des sourires, des remarques. Puis finalement une chanson fredonnée leurs suffit comme prétexte pour se rapprocher. Il finit par lui demander s'il pouvait l'ajouter sur l'un de ses réseaux sociaux, elle accepta, elle n'attendait que ça. Evidemment qu'elle le souhaitait mais elle n'avait pas l'intention de lui demander ni de le montrer, à quoi bon s'humilier ? Mais il l'avait fait lui-même, quarante minutes avant la fin de la formation, c'était inattendu.

Elle décida d'attendre quelques jours avant de lui envoyer un message, elle ne voulait pas être une collègue de formation à ses yeux, uniquement une femme avec qui le courant était bien passé.

Encore une fois la musique était l'argument utilisé ; il lui avait partagé sa playlist elle n'allait donc pas se priver de l'utiliser pour revenir vers lui. Ils retrouvèrent très vite la complicité qu'ils avaient déjà acquis quelques jours auparavant. Ils se courtisaient mutuellement subtilement. Le jeune homme savait jouer de ses charmes comme il savait être mignon et réconfortant quand il le fallait. Elle se sentait bien avec lui : son mal-être quotidien était moindre lorsqu'ils discutaient, ils se comprenaient. Seulement, il se questionnait. Il avait besoin de réponses tandis qu'elle, elle évitait ces questions. Elle ne savait pas ce qu'elle voulait, ses souffrances personnelles prenaient bien trop de place dans son cœur et son esprit pour la laisser penser à autre chose. Elle ne voulait pas non plus définir cette relation naissante ; en définissant ce qu'ils pourraient devenir ils s'imposeraient des limites et s'interdiraient l'impossible, l'inconnu. Pourtant elle le fit, pour lui.

Comme elle s'y attendait leurs envies divergeaient : lui préférait le ponctuel, elle la stabilité. Il expliquait son choix par des douleurs internes importantes qu'il ne voulait pas lui transférer. La jeune femme tenta de lui expliquer qu'elle avait elle aussi de nombreux problèmes nocifs et que d'eux deux, elle serait celle qui ferait le plus souffrir l'autre, mais il ne changea pas d'opinion. Malgré tout ils décidèrent de maintenir le rendez-vous qu'ils s'étaient fixés. Elle ne pouvait l'expliquer, elle ressentait cette envie et ce besoin de le voir. Elle ne savait pas où cela la mènerait, mais son instinct la guidait, elle savait que c'était son destin. Et pourtant, tout en sachant qu'elle fonçait tête baissée vers l'inconnu elle ne put s'empêcher d'être pressée de passer cette soirée avec lui.

Quelque peu mal à l'aise elle fuyait constamment son regard. Elle ne voulait pas qu'il aperçoive ses angoisses qui se faisaient pourtant déjà ressentir lors de leur conversation la veille. Néanmoins il sut l'adoucir avec une telle facilité qu'il semblait difficile de croire que ces deux personnes se connaissaient depuis deux semaines seulement. Elle se sentait si bien à ses côtés que cela la troublait, comment pouvait-il y avoir autant de prospérité alors qu'aucun d'eux ne ressentaient de l'amour pour l'autre ? Elle chassa ces pensées qui venaient troubler cet instant de bien-être hors du temps. Elle réalisa combien elle se sentait épanouie à ses côtés. Ils rigolèrent et se chamaillèrent comme des enfants puis minuit arriva. Ils firent le choix d'échanger pendant de nombreuses heures ; la nuit y perdit sa fonction lorsque les deux jeunes adultes décidèrent finalement d'aller dormir à l'aube. Ils avaient partagé leurs points de vue, leurs craintes, leurs angoisses mais aussi leurs secrets les plus profonds, ceux qu'ils n'avaient jamais réussi à partager à qui que ce soit. Leur besoin de tendresse réciproque finit par prendre le dessus et les amena à échanger un, puis plusieurs baisers. Les étreintes étaient alors devenues le mot-clé de cette soirée. Ni l'un ni l'autre ne savaient où cela les mènerait, ils savaient pourtant bien que cela n'augurerait rien de bon mais ils ne voulaient pas s'arrêter. C'est ainsi que ce qui devait durer uniquement une soirée se transforma en deux jours consécutifs.

Ces moments échangés à deux leurs paraissaient atemporels et seraient confus pour tout autre personne. Tellement de tendresse pour si peu d'amour, s'en était déroutant. Il lui faisait vivre ce dont elle avait toujours rêvé à l'aide de comportements dignes des meilleures séries romantiques. Elle se sentait si vivante à ses côtés. Lui à qui elle avait partagé ses souffrances les plus profondes, il la comprenait et l'acceptait. Pour la première fois depuis longtemps, son sourire était sincère.

Après tout rêve vient le réveil : il était temps pour la jeune femme de rentrer chez elle et de reprendre le cours de sa vie. Au fond d'elle elle appréhendait, comment serait leur relation après ces journées et cette proximité ? Allait-il regretter ? Il ne la laissa que très peu de temps en tête-à-tête avec ses doutes car il lui proposa de revenir passer la nuit avec lui le lendemain. Sans aucune hésitation, elle accepta.

Elle ne passa qu'une journée loin de lui, et cela lui semblait être l'éternité. Elle voulait le retrouver, l'enlacer, l'embrasser et dormir à ses côtés. Elle savait qu'elle n'éprouvait pas de l'amour à son égard mais sans pouvoir l'expliquer, le revoir lui paraissait indispensable. Par chance, les retrouvailles arrivèrent rapidement n'en déplaisant pas aux jeunes gens. Elle ressentait à quel point il aimait lui aussi ce moment. Cependant, la divergence de leurs envies commençait à se faire ressentir. Ils se désiraient. Aucun de leurs actes n'étaient légitimes : dans toutes les situations l'un d'eux ne serait pas entièrement satisfait et c'est ce qu'ils voulaient éviter à tout prix. Ils voulaient construire une relation qui leurs seraient propre et qui les rendrait heureux tous les deux, mais ils ne savaient pas comment. Alors ils passèrent outre pour profiter de cette délicieuse insouciance.

Il lui partagea ses nouvelles craintes qu'elle écouta attentivement ; elle ne voulait que son bonheur il lui semblait donc important de les prendre en compte pour agir au mieux avec lui. Elle voulait lui être aussi bénéfique qu'il l'était pour elle. Prise d'une vague d'émotions la jeune femme lui partagea les bienfaits qu'avait cette relation sur elle. Toutefois le jeune homme ne semblait pas vouloir que leur histoire prenne cette tournure. Il lui rappela alors que toutes les relations prennent fin un jour, y compris la leur. Il lui précisa que cela n'arriverait ni le jour suivant ni la semaine suivante, mais que cela arriverait un jour et qu'il valait mieux ne pas s'attacher. Il ne voulait pas être son médicament et lui dit crûment. La jeune femme dû partir après cette phrase. Ce que le jeune homme ne savait pas c'est que dès lors qu'elle passa la porte de chez lui, elle fondit en larmes. Il était la seule chose qui l'épanouissait durant cette période et il venait de lui rappeler que cela ne durerait pas. L'envoûtement avait pris fin, l'illusion ne marchait plus. Tout semblait s'écrouler à nouveau. 

EnvoûtementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant