Si la mer s'offrait à nous

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PDV Livaï :

Nous avançons de plus en plus en direction de la fameuse mer, escaladant la dune de sable sur le dos de nos chevaux. Hansi et moi sommes les premiers, nous atteignons enfin le sommet. Le paysage devant nous nous laisse de marbre tandis que les autres nous suivent de prêt et s'arrêtent derrière nous. Alors c'est ça, la mer ? C'est... incroyable... Et vaste. Très vaste. L'eau brille sous le soleil et le vent est frais avec un arrière-goût salé. J'observe l'étendue d'eau en face de moi, tout aussi stupéfait que les autres.

Après quelques minutes nous descendons de nos montures pour aller sur le sable. Hansi remonte le bas de son pantalon pour aller mettre les pieds dans l'eau, ce que font également le reste des soldats. J'entend alors quatz'yeux s'amuser comme une folle, on dirait vraiment une enfant.

- C'est vraiment de l'eau salée, tout ça ?

Elle se penche alors en avant, la bouche et les yeux grands ouverts.

- J'ai vu un truc.

- Touche pas, Hansi, c'est peut-être venimeux.

Je la laisse tout de même faire mais la surveille de loin. Déjà qu'elle a un œil en moins, faudrait pas l'abîmer plus que ça. Je sens alors une présence imposante s'approcher de moi par derrière, mon corps frissonne et je reste figé en reconnaissant la personne derrière moi. Ceci dit sa présence me rassure, comme si je l'attendais encore désespérément. Je ne dis rien, il est le premier à parler.

- C'est beau n'est-ce pas ?

- Ouais...

- Tu ne veux pas aller mettre tes pieds dans l'eau ?

- Sans façon. Je préfère regarder.

- Je vois... Moi aussi à vrai dire.

Alors c'est ça le paysage que tu m'as promis de me faire découvrir ? Erwin, je veux que tu m'en fasse découvrir d'autres. Bien d'autres. Encore plus beaux que celui-ci. Je veux continuer de te suivre, je veux découvrir toutes les choses que tu désires me montrer. Tu vois au-delà des murs, au-delà des livres et au-delà de l'imagination. Ton esprit dépasse les frontières de ce monde, toi seul peux me guider. Mais tout ça, tu le sais non ? Alors pourquoi-

- À quoi tu penses ?

Il me coupe dans mes pensées mais sa voix est si calme, comme si... Il avait trouvé la paix. Il ne me regarde pas, je ne sens pas son regard sur moi, mais il arrive à savoir si je suis distrait par mes pensées ou non. J'aimerais tant savoir pourquoi tu n'as pas voulu sauver ta peau ? Tu le pouvais pourtant mais tu as refusé. Idiot.

- Je... S'il te plaît dis moi que-

Mais il ne me laisse pas finir ma phrase. Pourquoi tu ne me laisse pas aller au bout de mes questions ? La réponse t'effraie ? Tu souhaite me protéger ? Sa main se glisse contre la mienne et je peux sentir une source chaude entrelacer nos doigts. Cette source qui pourtant, devrait être froide. Il s'avance lentement de quelques pas à côté de moi mais garde la tête haute, dirigé vers l'horizon.

- Le monde extérieur est enfin à nous. Il est là, devant toi et moi. 

- Merci, Erwin...

- Je te l'avais promis.

- Fais moi d'autres promesses...

- Tu sais que je ne peux pas... Je ne peux plus.

Je lève alors la tête vers lui, comme si je ressentais le besoin de voir son visage, son expression. Est-ce qu'il est triste ? Déçu ? Eh bien non. Ce n'est rien de tout ça. Son visage est paisible, soulagé, tandis que son regard est rempli d'espoir et d'émerveillement. Je devrais être soulagé en le voyant ainsi, pourtant c'est comme si mon cœur se brisait en mille morceaux. Pour la première fois il tourne sa tête vers moi et plonge son regard intense dans le miens, sans rien dire. Mais merde, dis quelque chose je t'en supplie. Si tu continue... Je vais craquer.

- Tu veux vraiment une autre promesse ?

Je ne dis rien, les mots ne sortent pas. Je n'arrive pas, c'est trop dur. Ma main serre la sienne tandis que ma gorge se noue et retient toutes mes larmes. Les cris d'amusement des autres soldats... Je n'y prête plus attention depuis qu'Erwin est arrivé. Il n'y a que lui et moi, un major et son fidèle caporal.

- Alors je te promet que le jour où on se retrouvera, je t'emmènerai au plus bel endroit que je connaisse. Quand ce jour viendra cela voudra dire que l'on aura tout le temps devant nous pour le contempler.

Mes yeux me brûlent, je ne sais pas quoi dire ou quoi faire. Mes pieds sont figés dans le sable et mon regard figé dans ses yeux. Cette promesse... Peut-il vraiment la tenir ? Sera-t-il encore là ? Si il ne la tient pas je me chargerai de le retrouver pour lui botter le cul. J'essaie alors de me ressaisir et ravale toute mes larmes pour enfin pouvoir lui parler.

- Je te préviens, si tu tiens pas ta promesse... Je te retrouve et tu vas amèrement regretter.

Il me sourit, comme si il se moquait à moitié. Mais il n'y a pas que ça. Du soulagement aussi, comme si il avait eu peur que je décline cette promesse. Mes yeux se noient dans les siens, comme si j'avais besoin de me ressourcer, m'apprêtant à ne plus revoir son visage. Malheureusement pour moi il le remarque et se tourne face à la mer pour m'épargner d'autres souffrances. Je fais alors de même mais une question revient sans cesse dans mon esprit. J'y pense encore et encore et il n'y a que lui sur cette terre qui en connaisse la véritable réponse. Tout à l'heure il ne m'a pas laissé le temps de la poser mais cette fois-ci j'irai jusqu'au bout. J'aurai enfin une réponse et j'arrêterai de me torturer. Parce que tout ce que Erwin me dira sera la vérité.

- Erwin, est-ce que j'ai fais le bon choix ? Je veux te l'entendre dire. J'en ai besoin...

Pas de réponse. Tu ne veux pas répondre ou tu ne peux pas ? Je suis sûr que tu as la réponse à cette question. Enfin, presque sûr. Peut-être que toi-même tu ne sais pas. Mais alors pourquoi tu ne veux pas me le dire ?

- Erwin ?

Je regarde alors sur ma gauche mais il n'est plus là. Il n'y a personne. Je ne t'ai pas dis au revoir, tu ne m'as pas répondu. Je t'ai fais fuir, c'est ça ? Finalement... Merci de ne pas m'avoir dit au revoir, d'être parti sans rien dire. Je ne l'aurai pas supporter.

Mon coeur se serre ainsi que ma main. Ma main qui recherche une dernière fois la tienne, une dernière fois cette chaleur. Parce que la dernière chose dont je me souviens de toi c'est le froid, le froid de ton corps devenu glacial. Tout comme le miens désormais. Ma seule source de chaleur... c'était ton cœur. Mais il a cessé de battre et le miens à donc quitté mon corps à ta recherche. Je ne combat plus qu'avec ma tête et mon corps qui me servent d'armes, parce que oui, avant ce n'était pas le cas. Je combattais pour toi, avec toi. Nos cœurs de soldats battaient et se battaient ensemble.

J'observe la mer et maintenant je me rend compte que je l'ai vu pour la première fois il y a de ça quelques années. Et puis d'un seul coup je la voyais au quotidien. Tout les jours, dans tes yeux, dès que je croisais ton regard bleu. C'est exactement le même bleu qui s'offre à nous désormais. Merci de l'avoir regardé avec moi, Erwin.

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J'espère que cet OS vous a plu ! Il m'est venu comme ça, sur un coup de tête, en regardant une simple image.

Ça me ferai plaisir de connaître votre avis ! Merci de l'avoir lu !
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Si la mer s'offrait à nous [Eruri] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant