𝖰𝗎𝗂𝗍𝗍𝗈𝗇𝗌 𝖼𝖾 𝗍𝗋𝗈𝗎 𝗉𝖾𝗋𝖽𝗎 [ 𝖪𝗎𝗋𝗈𝗈 𝗑 𝖮𝖼 ]

Chapter 2

D'un geste éloquent, carrément théâtral, j'ouvre la porte du frigo et inspire une grande goulée d'air alors que la fraîcheur de l'électroménager m'attaque. Jamais je ne m'étais sentie aussi libre.

   Rapidement, mes mains attrapaient la nourriture de façon fébrile, l'emménageant dans la glacière que Kuroo avait piqué de chez ses parents. Ce dernier se tenait à mes côtés. Contrairement à moi, ses bagages étaient déjà fait, emplis de tous ses vêtements et effets personnels. Cela ne faisait que me confirmer le fait qu'il était réellement sérieux à propos de notre fugue. Du moins, ce n'en était pas vraiment une. Nous avions tous les deux 18 ans. On avait, selon la loi, tous les droits de devenir indépendants de l'emprise de nos parents. Je souris encore plus à cette pensée.

"On est enfin libres! J'aurais tellement envie de voir la gueule de nos daronnes lorsqu'elles vont voir qu'on n'est plus là!" m'exclamai-je en remplissant l'espace de stockage de mes mains avec les nombreuses bouteilles de vodka.

"Tu vas amener ça avec nous?" me demande-t-il et je lui offre un clin d'œil.

"C'est pas comme si je consommais de l'alcool, c'est seulement que sans ça, l'espérance de vie de ma mère est coupée à sa moitié" lui dis-je en pointant du doigt les bouteilles en question.

"Elle risque de se mettre en colère lorsqu'elle verra que tu lui as piqué sa réserve du mois" me dit Kuroo et je souris encore plus.

   "Ne t'inquiète pas. Tout est sous contrôle. T'as averti les autres qu'on partait?" demandai-je en parlant de nos amis de Nekoma.

   "Ouais. Ils nous ont souhaité bonne chance. Ils avaient l'air fiers de nous" me dit-il et je pousse un rire. J'avais terminé de dépouillement l'essentiel de mon frigo dans la glacière.

   "Je paris qu'ils nous envient de partir comme ça" commentais-je et Kuroo sourit, fermant la grosse glacière, la portant d'une main, l'autre occupé par ses bagages. Fidèle à son identité d'homme, Kuroo voyageait léger, ne transportant qu'une valise. J'étais arrivée un peu plus tôt à la maison que d'habitude et j'avais vidé l'entièreté de ma garde-robe dans des valises et des sacs. Ma mère n'était toujours pas là et j'espérais qu'elle ne vienne pas avant un certain temps, c'est-à-dire lorsqu'on sera trop loin pour que je n'entende ses hurlements de colère.

   "Ils ont sûrement tous déjà rêvé de partir d'ici mais ils n'ont jamais eu les couilles pour vraiment partir" me dit Kuroo et j'assemble toutes mes valises, hochant la tête.

   "Mais on les a nous et on va partir d'ici immédiatement avant que l'autre ne vienne" lui dis-je en pointant du menton la porte, grande ouverte, laissant l'air chaud de septembre rentrer dans la maison. Kuroo hoche la tête et ensemble, on sort à l'extérieur.

"Comment on va faire pour se tirer d'ici" demande-t-il et je camoufle avec mes cheveux le sourire qui encadrait mon visage.

"De quoi tu parles?" demandais-je en feignant l'innocence.

"Je te rappelle que je n'ai pas la moindre voiture et on va pas passer notre vie à se déplacer en bus. Et d'ailleurs, est-ce que t'as encore ta carte de bus?"

"Pas du tout. Je t'ai déjà dit que je l'avais perdu lorsqu'on était partis à ce stupide concert" lui rappelais-je avec un certain mépris alors que je me souviens de toutes les obstacles sur lesquelles on était passés dans le seul but de revenir ici à pied. Kuroo aurait pu prendre le bus et me laisser marcher mais il ne l'as pas fait. Il est resté avec moi et a marché à mes côtés, affirmant qu'une femme dans le noir n'augurait jamais rien de bon.

Je crois qu'il faisait référence à une possibilité que je me fasse violer, agresser ou quelque chose du genre.

"Et merde! J'y avais pas pensé!" s'exclame-t-il en se frappant la tête. Je me mordis la lèvre. Kuroo était canon quand il paniquait. À vrai dire, il l'était dans toutes les situations possibles. Notre baiser d'il y a quelques heures me revint. Étant des amis de longue date, ce n'était pas la première fois qu'on s'embrassait, la plupart des fois étant sur des coups de tête ou un manque frustrant d'affection des deux côtés.