Ce soir, pour la toute première fois de ma vie, mon gâteau n'a pas été confectionné par ma mère, mais par Harry. Il y a passé une bonne partie de l'après-midi, et y a mis tout son cœur, alors je ne peux m'empêcher de sourire en voyant les bougies dans tous les sens et le dessus du moelleux au chocolat légèrement brûlé qu'il a recouvert de glaçage pour rattraper. Harry, contrairement à ma mère, n'est pas un bon cuisinier, loin de là même. Si jamais je l'avais laissé préparer le repas de ce soir, je pense qu'il est fort probable qu'on aurait mangé des nouilles instantanées ou un plat à réchauffer acheté à la supérette du coin de la rue tant la cuisine n'est pas son fort, mais il a tenu à faire lui-même le gâteau. J'ai d'abord refusé, mais face à son regard de chien battu, je n'ai pas eu d'autre choix que de céder, et puis ça partait d'une bonne intention. Il sait que bien que ça a toujours été ma mère qui me l'a fait tout comme il sait que ne pas être à ses côtés ce soir me détruit.
Aujourd'hui a beau être notre premier Noël passé ensemble, c'est aussi et surtout l'anniversaire du silence glacial qui a commencé lors de mon coming-out et qui a remplacé tout contact que j'avais avec mes parents. Tout au long de la journée, Harry s'est démené pour me faire passer un un jour magique et inoubliable, mais je n'ai pas pu passer au-dessus de leur absence. Mes parents me manquent, leur amour me manque, et ce manque est encore plus présent aujourd'hui, alors que je célèbre ma fête préférée loin d'eux. Je me suis retrouvé seul du jour au lendemain, sans repères, face à un monde hostile et malveillant. Durant vingt-cinq ans, ils m'ont tout appris, sauf à vivre sans eux. Je m'en veux toujours autant d'avoir tout gâché. Je donnerais n'importe quoi pour revivre nos Noël à trois qui ont égayé mes jeunes années.
Pourtant quand je vois l'homme qui partage ma vie découper tant bien que mal des parts égales, la langue dépassant du coin de ses lèvres tant sa concentration est grande, je me dis que mon choix était le bon. Et tant pis si je les ai perdus, tant pis si ils me manqueront encore longtemps, parce que Harry et l'amour que nous partageons est un trésor inestimable que je chérirais jusqu'à la fin de mes jours. Et cet amour est plus important encore que tout ce qu'ils peuvent dire à ce sujet, que tout ce qu'ils peuvent penser. Peut-être les ai-je perdu, mais ce que j'ai trouvé à la place est l'amour de Harry, l'amour de l'homme de ma vie. Alors que ce dernier se rassoit et lève un sourcil interrogateur face à mon air pensif, je me lève et prends ses mains. Je le force à se lever à nouveau, ignorant ses protestations.
- Louis, à quoi tu joues ?
- Je t'aime.
Sans même attendre de réponse de sa part, je l'attire vers moi pour l'embrasser. Ses lèvres douces ont encore un peu le goût du vin. Il pose une de ses mains dans mon dos, juste en dessous de mes côtes flottantes, et la deuxième atterrit sur ma joue qu'il caresse délicatement du pouce. Lorsque je mets fin à notre baiser pour reprendre mon souffle, je me blottis à nouveau dans son cou. Son odeur est rassurante, et ses bras qui m'entourent me rappellent qu'où que je sois, je serais en sécurité. Peut-être que je ne suis pas avec mes parents ce soir, comme j'aurais dû l'être, mais je suis à ma place, dans les bras de Harry. Je le sens qui tend le bras pour relancer le tourne-disque qui s'est arrêté, sans pour autant me lâcher et briser ce moment précieux. Une fois que les premières notes résonnent, quelques instants plus tard, il me murmure à l'oreille:
- Je t'aime aussi.
Je commence soudain à rire et à danser, l'entraînant avec moi dans ce qui ne ressemble ni à une valse, ni à un slow. Peut-être est-ce à cause du vin que j'ai bu en trop grande quantité et qui me rend légèrement ivre, peut-être est-ce l'euphorie qui me gagne d'un coup, ou peut-être encore est-ce les deux mélangés. Harry râle qu'il ne sait pas danser, et je ris à nouveau en le voyant sourcils froncés essayer de ne pas trébucher et de suivre mon rythme chaotique. La musique et nos rires décorent la pièce d'une mélodie parfaite, et dehors la cloche d'une église résonne au loin, sonnant minuit. Le réveillon est terminé. Nous sommes désormais le vingt-cinq décembre, jour de Noël. Harry s'arrête, et posant ses mains sur mes hanches, il murmure:
- Joyeux Noël, Louis.
- Joyeux Noël, mon amour. Merci pour tout.
Je pose mes mains sur ses joues brûlantes, et l'embrasse à nouveau.
L'an dernier, au même moment, je regrettais d'avoir parlé de lui à mes parents. Je me disais que j'avais eu tort, que j'aurais fait n'importe quoi pour ne pas les perdre. Ce soir, après avoir dansé ivre d'alcool et d'amour dans ses bras, je réalise à quel point je m'étais trompé en pensant ça, parce que je suis tombé amoureux de Harry.
Et ceux qui s'aiment n'auront jamais tort.
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Dites-moi comment ça va [LARRY]
General FictionC'est le réveillon de Noël. Louis a 26 ans aujourd'hui, et il se rappelle avec amertume combien ses parents lui manquent, et combien il aimerait qu'ils soient avec lui et son fiancé, Harry, pour cette fête qu'il apprécie tant. Basé sur la chanson "M...