Chapitre 3

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L'atmosphère est tout à coup devenue plus lourde sur mes épaules. À l'instant où je délaisse l'amphithéâtre dans mon dos, la lumière qui baigne dans le couloir m'agressent les rétines et je plisse les yeux, inquiète. Le supérieur est parti sans un mot, nous a abandonnés là comme s'il s'attendait à ce que nous comprenions la situation. Personne n'a rien dit, mais nos auras parlent pour nous. Nous pensons tous à la même chose.

Je réprime les frissons qui tentent de secouer mon corps avec grande peine. Je n'aime pas ce qu'il se passe actuellement. Nous sommes sur le qui-vive, comme prêts à voir un Niraashien débarquer d'une minute à l'autre. Tout le monde est à cran depuis les attentats, mais cette situation ravive tous ces souvenirs que nous aurions préféré oublier. Attentat à Katâma. Le prince héritier est touché.

Face aux larges fenêtres de l'institut, je ne peux empêcher un soupir las s'échapper de la barrière de mes lèvres. À mes côtés, il y a Ydna, nos regards perdus dans le paysage du cratère. Je ne sais toujours pas quoi penser d'elle. Une part de moi hurle qu'elle est folle. L'autre, un peu trop sentimentale aimerait comprendre ses actes. J'essaye de ne pas trop me prendre la tête sur ça, ravive mon attention sur le vol des Amas qui laissent quelques plumes colorées se perdre dans les airs derrière leur passage. J'ai toujours apprécié cette espèce qui sert de messager. C'est le moyen le plus sûr de faire parvenir les informations confidentielles d'une région à l'autre. Discret, rapide, efficace.

Je m'apprête à me retourner pour interroger quelqu'un, mais un Andromédien ne m'en laisse pas le temps. Vif, il se fraye un chemin dans le couloir envahi par ma promotion, me bouscule au passage. Je meurs d'envie de riposter, mais son aura emplie d'inquiétude et de peur m'en dissuade. Il semble à deux doigts de vomir ses tripes alors qu'il se précipite vers Merua. Celle ci vient de faire son apparition au fond de l'allée.

– Merua !

Sa voix vrille l'air, déchaine la terreur qui l'habite. De ma place, je ne peux m'empêcher de le détailler, lui et ses cheveux auburn qui collent à sa peau, mêlés à d'épaisses gouttes de sueur. Il n'a rien d'un général ou d'un supérieur. Trop jeune, trop peureux, aussi. À sa vue, l'Andromédienne fronce les sourcils, fait un pas dans sa direction avant de l'attraper par les épaules comme si elle voulait le rassurer.

– Ô par les Déesses, Lavrintos calme-toi et dit moi ce qu'il se passe.

À bout de souffle, l'Andromédien pose ses mains sur ses jambes, tente de ravaler son déjeuner pas loin d'être recraché aux pieds de son interlocutrice.

– Le général Fasimède m'avait demandé de le rejoindre au pied de la cascade à 15 heures... Sauf qu'il est mort ! J'ai rien fait je vous le promets ! J'aurais jamais fait de mal à Fasimède, vous devez me croire !

La peur parle pour lui. Ses mots sont précipités, peinent à faire sens. Merua fronce les sourcils, mais ne perd pas son sang-froid pour autant. Elle raffermit sa poigne sur les épaules de l'Illud, se baisse pour être à sa hauteur.

– Comment ça, mort ?

– Qu... Quoi ? Comment ça, mort ? Il s'étouffe en reprenant les mots de l'Andromédienne. Mort comme un mort quoi ! Enfin vous savez ce que ça veut dire quand même !

La colère surpasse sa terreur alors qu'il serre les poings, tente de calmer sa respiration. Il relève la tête vers Merua, vif, avant de s'écrier d'une voix qui attire tous les regards vers lui.

– Mort putain ! Décédé, crevé, tout ce que vous voulez ! Pourquoi est-ce que personne ne réagit ?

Lavrintos se retourne vers moi, fait de grands gestes à l'aide de ses bras. Je fronce les sourcils, peu sûre de ce qu'il avance. Face à lui, Merua retient un soupir avant de le forcer à la regarder d'un mouvement sec. Elle se plante devant l'Illud, le domine de quelques bons centimètres pour finalement capituler.

Entre Deux Lumières T1 - Les Affres du PouvoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant