Jeu Macabre

98 8 0
                                    


Je me trouvais dans une immense salle à l'allure de la Renaissance. Les papiers peints étaient dans des couleurs ternes et sanglantes, et les nombreux motifs qui apparaissaient dessus avaient pour contours des reliures dorées. Il y avait dans cette salle des canapés en cuir marron autour d'une petite table basse où se dressaient, sur celle-ci, un verre et une bouteille de whisky déjà entamés, m'indiquant qu'il y avait eu récemment du passage. En face de moi se trouvait un magnifique bureau en bois avec des motifs de fleurs sculptés sur le devant, plus précisément des roses. Il y avait dessus de la paperasse mais aussi un petit crâne d'animal, je dirais celui d'un renard, sans grande certitude. Je m'avançai prudemment vers le siège qui se trouvait de dos. Je pris ensuite mon courage à deux mains et le retournai d'un coup sec . Mais...il n'y avait rien, mon esprit devenait-il paranoïaque ? Je soupirai et, pour je ne sais quelle raison, je tournai mon regard vers ma droite. Mon corps se figea et mes yeux s'écarquillèrent. Face à moi se trouvait un grand miroir mural. « Qui y a-t-il de si effrayant me direz-vous ? » Je vous répondrai que ce n'était pas le miroir qui me fit réagir de cette façon mais plutôt ce que je voyais à l'intérieur de celui-ci. C'était moi mais ça ne l'était pas vraiment... le blanc de mes yeux avait pris une teinte ténébreuse, des cornes me sortaient de l'arrière de la tête pour se rabattre sur le devant, mon teint était pale, mes pieds n'étaient plus des pieds mais des pattes d'animaux, de lions je pense, et une horrible queue, avec à son bout des plumes, me sortait de derrière le dos. Je déviai mon regard sur le bas-côté du miroir et mon sang se glaça. Il était là, au fond de la salle, assis dans un des canapés, le verre de whisky dans sa main, il m'observait toujours avec ce sourire malsain et amusé. Je pris une grande inspiration et tournai doucement la tête derrière moi : comme à mes attentes, il n'était pas là. Mais à vrai dire, une partie de moi aurait aimé qu'il le soit. Je regardai le coin de la pièce perdu dans mes pensées, quand soudain, je sentis un souffle chaud près de mon oreille et une main gelée se poser sur mon épaule qui me tétanisa. Une voix grave et étonnamment élégante me susurra tout près de celle-ci : « Noli angi animo, mox mei eris ». Même si je ne pouvais le voir, je savais qu'il avait un grand sourire aux lèvres. Il pressa ensuite sa main sur mon épaule qui me brûla et dans un puissant cri, je me réveillai brutalement de mon sommeil.

La sueur perlait sur mon front, ma respiration était saccadée et mon cœur battait à cent à l'heure. Ouf ce n'était qu'un cauchemar, me dis-je. Je pris un instant pour me calmer avant de retirer la couverture sur moi et de sortir de mon lit en me dirigeant vers ma salle de bain, tout en me tenant la tête. Je me dirigeai vers mon lavabo. J'ouvris le robinet et me passai un peu d'eau sur le visage. Je le relevai ensuite, lui qui était fatigué et couvert de cernes ainsi que mes yeux rouges vers le miroir au-dessus du lavabo. Je finis par remarquer une marque sur mon épaule... non, non, non c'est...comment ? Il y avait une légère marque de brûlure comme celle d'une main.... Mes membres se mirent à trembler. Je repartis en vitesse vers mon lit et me cachai sous ma couverture, comme les enfants qui pensent qu'ils sont invincibles en dessous de celle-ci. Je n'ai plus fermé un seul œil de la nuit.

Le lendemain sur le chemin du lycée, je somnolais, tanguant de temps à autres en tenant fermement les lanières de mon sac à dos. Je faillis de nombreuses fois me retrouver sur la route et me faire percuter par un véhicule quelconque. Mais j'arrivai entier aux portes de mon lycée. Je ne faisais guère attention aux regards qui étaient portés sur moi et me dirigeai vers ma salle de classe.

Je m'assis à ma place, celle tout au fond, près du radiateur, la place que personne ne voulait, la place des rejetés. Ma table était toute abîmée, le bois était vieux et marqué de coups acharnés de compas ; le fer, lui, était rongé par la rouille, et sur le dessus se trouvaient mille et une inscriptions haineuses et moqueuses. Je soupirai et sortis mes affaires. La cloche sonna et les élèves de ma classe rentrèrent. Certains, comme à leur habitude, me dévisagèrent et firent des messes basses avant de s'asseoir à leur place. Le professeur fit l'appel, mais je ne l'écoutai pas «...et enfin Tangun » dit -il à haute voix presque en criant tout en me regardant. Sûrement qu'il l'avait déjà répété 1 ou 2 fois avant. Je levai la main en répondant présent. Il prit ensuite place et le cours commença.

Jeu MacabreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant