Chuter pour s'envoler

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Ce soir-là, encore une fois la vue était belle, un véritable panoramique enchanteur. Devant elle, les terres de Poudlard étaient à ses pieds et le soleil au loin dessinait cette courbe flamboyante, épousant somptueusement la limite de l'horizon. D'un côté, la forêt de pin semblait se mouvoir, voire danser au gré du vent et de ses habitants, obscurcissant une moitié du tableau alors que de l'autre, le lac à la surface ondoyante appelait au calme et au lâcher prise. C'était aussi envoutant qu'un chant de sirène.

Presque ensorcelée par cet appel, l'envie de se laisser tomber du haut de la tour d'astronomie la submergea. C'est alors qu'Hermione observa le large champ qui s'étalait au centre de sa vision, cent cinquante mètres plus bas. De son point de vue, c'était tentant, nul doute qu'à cette hauteur elle ne se louperait pas. Son corps chuterait, accompagné seulement par le sifflement caractéristique d'une masse fendant l'air, puis il s'écraserait au sol si puissamment qu'elle était persuadée de ne rien sentir lorsque son crâne se briserait, répandant sur cet ancien champ de bataille une négligeable mare de sang.

Hermione ferma les yeux pour se concentrer sur la seule sensation capable encore de la maintenir dans ce monde, celle-ci même qui l'empêcherait de succomber à la tentation d'en finir pour toujours. Cette chaleur douce induite par les rayons du crépuscule atteignant et caressant son visage fatigué et creusé était son encre dans le monde des vivants. Oui l'onctueuse chaleur perçue lui permettait de se souvenir qu'elle était encore là, qu'elle était une miraculée condamnée à vivre, et ce malgré le vide qu'elle ressentait dans ses entrailles et le torrent de tristesse qui lui glaçaient ses membres constamment.

Sous l'éclat lumineux, un court instant il lui sembla presque percevoir l'affection de tout ceux qui n'étaient plus là. Était-ce une invitation à les rejoindre enfin ?...  Hermione savoura la luminescence comme une caresse ou encore une étreinte prodiguée par ses amis si chers à son cœur éprouvé, harassé et aujourd'hui brisé. Ses alliés, ses camarades, ses frères et sœurs de cœur tombés... Ils s'étaient tous sacrifiés pour rendre le monde meilleur.

Meilleur ? Quelle ironie... Hermione laissa échapper un rire sardonique, elle seule encore vivante à ce jour le trouvait malgré la victoire, pire qu'avant. S'étaient-ils mit à mort pour rien finalement ? ... Hermione secoua la tête, s'obligeant à penser autrement...NON pas pour rien, elle le savait et c'était égoïste de penser l'inverse. Les autres vivants semblaient aimer ce nouveau monde qu'on leur avait offert, ils semblaient même tous heureux et soulagés jusqu'à fêter ce soir la victoire d'il y a un an. L'ombre survivante qu'Hermione était, n'avait pu assister plus longuement à cela, mais n'avait pas loupé les sourires, les rires, les cris de joie des uns et des autres... leur amour pour la vie tout simplement. Ce bonheur que tous semblaient vivre, elle le percevait depuis bien trop longtemps à son gout en errant chaque jour dans les couloirs de Poudlard, et ce soir l'exubérance des réjouissances pour le triomphe de la guerre l'écœurait bien plus encore. 

Alors pourquoi était-elle encore là ? Pourquoi l'avait ont épargnée ? Elle, la Gryffondor imprudente qui avait plus d'une fois fusé tête la première vers le danger.  Elle qui aurait dû mourir avec les siens souvent bien plus prudents qu'elle. Après tout, pourquoi lui avoir permis de goûter à cet après si elle était incapable d'en apprécier la saveur, d'en jouir pleinement comme les autres ou encore d'user la récompense. Hermione pesta contre elle-même tout en ressassant ses sempiternelles convictions qu'elle se martelait chaque jour, chaque heure ... chaque seconde telle une comptine sur le rythme de ses respirations.

Seule, derrière l'obscurité de ses paupières, Hermione se laissa finalement emporter par la vague de ses idées noires, puis observa une dernière fois le paysage. Absorbés par la nuit, les rayons apaisants n'étaient plus. Le tableau envoutant quelque instant plus tôt l'était dans un sens encore plus à ses yeux en devenant ténèbres.

Des ailes pour la vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant