Alice s'étire lentement dans le grand lit vide. Elle ouvre les yeux avec pour seul fond sonore le chant des oiseaux dans sa douce campagne. Elle sourit en se levant, ravie de ce changement même si l'organisation n'est pas aussi évidente qu'elle ne l'aurait aimé. Il a d'abord fallu convaincre Fred, pas trop dure affaire car quand on aime, on est prêt à suivre sa moitié partout, mais ce fût plus ardu pour les enfants qui ne voulaient pas quitter leur vivante capitale pour la monotone campagne.
Ada a vivement montré son mécontentement en claquant la porte au nez de ses parents fraîchement revenu de weekend vendéen. Elle ne voulait pas laisser son amoureux seul étant donné les récentes épreuves auxquelles il avait dû faire face en perdant son père.
Paul, quant à lui, était boudeur face à ce projet, venant tout juste de retrouver son papa aventurier comme il se plaît à le décrire.
Lors de l'habituel risotto du dimanche soir, Fred avait alors proposé de quoi briser la glace.
- On va voter, avait-il annoncé, confiant.
- Un vote, répéta Paul.
- Oui, chacun donne son avis et on fera en fonction des résultats, expliqua t'il.
- Je suis contre, intervint l'adolescente avec sa moue boudeuse.
- Ça, on l'avait bien compris, pesta Alice, déçue.
- Moi, j'hésite encore, avoua le jeune garçon.Sa mère en profita pour le dissuader.
- Tu aimes aller au parc, te promener dans la forêt, faire du vélo, donner à manger aux canards ... tu pourrais facilement faire tout ça là où on va et même avoir un chien ...
- Un chien ? Je suis d'accord alors, s'exclama t'il, ravi.
- C'est pas juste, râla Ada, vous l'achetez !
- La famille a voté, s'interposa Fred, tu devras nous suivre.Mais la réaction n'était pas celle attendue car elle se leva d'un bond pour s'enfermer dans sa chambre ainsi que les jours suivants, ne sortant que pour les repas, pris dans un silence pesant, rendant l'atmosphère étouffant.
- On devrait peut-être attendre une année ou deux, le temps de laisser l'idée se faire dans leur tête, proposa Fred sur l'oreiller alors qu'il sentait sa belle soupirer.
- Je veux être là pour eux, les voir grandir et ici c'est pas possible ! Ada devient une jeune femme et Paul sera vite un adolescent, précise t'elle.
- Je sais tout ça, chaton, murmure t'il en la tirant contre lui.Et là, dans ses bras, elle trouve le réconfort attendu, la sérénité immédiate comme par magie, grâce à son amour et sa patience.
*
Alice se lève et descend par le grand escalier de bois jusqu'à la cusine. La pièce est baignée de lumière et la vue donne directement sur le jardin bien verdoyant et ses rosiers fleuris : elle sourit.
Ils ont trouvé cette bâtisse sur laquelle elle a eu un véritable coup de foudre et a décidé de préparer leur aménagement en attendant que la famille l'y rejoigne.
Même si la solitude la pèse un peu parfois, elle a trouvé la quiétude dans dans des occupations qu'elle n'aurait même pas envisagées à Paris.
Dans la verrière au fond du jardin, elle s'y est installé un atelier pour peindre et sculpter, ses deux passions retrouvées qu'elle avait abandonnées en commençant son droit.S
on téléphone vivre sur la table.
- Bonjour, vous, annonce une voix rauque unique.
- Bonjour, vous, répète t'elle, ravie.
- Bien dormi ?
- Mieux quand je ne suis pas seule, le taquine t'elle. Vivement ce week-end ...
Il se racle la gorge.
- Justement, en parlant de ce week-end, je ne vais pas pouvoir venir, se désole t'il.
Un blanc gênant prend place entre les deux interlocuteurs.
- Alice ? Tu es toujours là ?
- Oui, je suis là, boude t'elle.
- Je dois rester à la brigade pour accueillir le nouveau commandant, explique t'il.
- Je vois, marmonne t'elle, déçue. Et Djibril ne peut pas s'en charger, demande t'elle.
- Pas possible, s'exclame t'il. Elle prend mon poste, pas celui de Kadiri donc c'est à moi de m'y coller.