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Je suis un peu déçue. Je m'attendais à autre chose qu'à un petit bar cozy et assez vide. Une incompréhension monte en moi. Pourquoi être aussi pressé en allant dans un endroit de ce type ? Je cherche des yeux mon destructeur de portable.

Je ne le trouve pas. Pourtant la pièce est assez petite, 40m2 je dirais.

Je m'avance vers le bar où le barman qui est en train de nettoyer des verres me lance un sourire.

« Bonsoir mademoiselle ! Qu'est-ce que je vous sers ? »

« Euh vous pouvez me dire où est la personne qui est rentrée ici il y a quelques minutes ? »

Il plisse les yeux et son visage prend un air méfiant.

« Et pourquoi donc ? »

Une excuse. Une excuse vite !

« Ça va vous paraître digne mais je l'ai croisé dans la rue et ... il me plait vraiment. Je l'ai suivi inconsciemment jusqu'à ici. Je sais que ça parait bizarre mais je voulais juste lui donner mon numéro. »

J'affiche un sourire gêné et je baisse les yeux. Je sens qu'il va m'éjecter du bar et appeler la police en pensant que je suis une harceleuse.

« Ce petit Downall il a toujours du succès, je ne vous comprendrai jamais les filles. Ce mec est un mélange de toutes les choses que vos parents vous ont appris à éviter. Et pourtant vous vous jetez sur lui à toutes les occasions. » Il dit cela en se dirigeant à la droite du bar.

Je remarque alors la forme d'une porte dans le mur. Elle est recouverte du même type de tapisserie que les murs, on ne la remarque pas au premier regard. Et peut-être pas du second même. Il l'ouvre et s'écrit :

« Va me chercher Downall, une demoiselle le demande ! » avant de se retourner vers moi avec un sourire joueur. Je le lui rends en commençant à me balancer sur mes pieds nerveusement. La situation devient de plus en plus réelle. Je ne sais pas comment l'anéantisseur de smartphone va réagir en face de moi. Ce que je savais être une mauvaise idée peut se révéler une mauvaise idée dangereuse pour moi. Et vue la façon dont Mister je casse les téléphones m'a poussé pour aller au bar il pourrait se montrer violent. Où est ma bombe au poivre périmée depuis 3 ans quand j'en ai vraiment besoin ?

Quelques instants plus tard, le fameux Downall sort de la porte secrète.

Et waouh.

Il est vraiment beau.

Du genre photoshoppé dans des pubs Paco Rabanne. Même si mon excuse était vraie et que je l'avais suivi à des fins romantiques, jamais je ne lui aurais donné mon numéro.

Il est trop beau. L'idée peut paraître bête comme cela mais il faut être honnête. Je fais un truc totalement superficiel dans ma tête, je note les gens sur 10. Et de façon totalement subjective en plus. Si j'apprécie quelqu'un on va dire que je lui ajoute des points bonus.

Je me considère comme un 6,5. Je suis jolie mais pas magnifique. Je ne suis certainement pas mince mais clairement pas grosse. J'ai des fesses et des seins sans que ce soit excessif. J'ai un physique que certains qualifieraient sûrement de banal. Celui entre les mannequins « normaux » et les plus size. Il y a un vrai problème de représentativité dans cette société. Pour mieux comprendre mon barème Dylan O'Bien est un 10 pour moi, Johny Depp un 7 avec -1 parce qu'il a l'âge d'être mon père et certains acteurs comme Jason Momoa ou Ezra Miller sont inclassables parce que je les aime trop en temps que personne pour les noter. Bref les notes, c'est une petite bizarrerie mentale qui m'amuse.

Mais ce mec devant moi je lui mets 11. Ou 5000 sur 10. Il est grand, brun, musclé mais pas trop musclé, avec une courte barbe et des yeux marrons verts à tomber par terre. On dirait qu'il sort tout droit d'une couverture de Harlequin. Totalement inaccessible.

Il me jette un regard haineux et me prend par le bras avant de me traîner hors du bar. J'en reste bouche bée. Une fois qu'on s'est assez éloigné pour ne plus voir l'entrée du bar, il se stoppe et se tourne vers moi.

« Qui es-tu ? C'est elle qui t'envoie ? »

« Tu ne mérite pas de savoir et si quelque chose a été envoyé c'est mon portable par ta personne. »

« De quoi tu parles ? Qu'est-ce que Diana a encore fait ? »

« Mais j'en sais rien ! je veux juste les 120€ que tu m'a fait perdre en catapultant mon portable tout à l'heure ! » je crie en brandissant mon portable comme preuve irréfutable.

Il semble se rendre compte que je n'ai vraiment rien à voir avec sa Diana et me lâche enfin le bras.

« Tu m'as suivi dans un endroit que tu ne connaissais pas et pourquoi ? Pour une petite machine qui tient dans ta main. Putain d'humains. »

Il marmonne la dernière phrase comme une insulte. Est-ce qu'il fait partie d'un culte bizarre comme les reptiliens ? Parce qu'aux dernières nouvelles on est tous humains. Et puis ça expliquerait sa tenue étrange. Downall porte des grosses bottes de combats en cuir qui lui arrivent au mollet, un pantalon et un tee-shirt noir. Ce qui est étrange est la ceinture qu'il porte à la taille. Elle pourrait être sortie du Seigneur des Anneaux ou de Zelda. Elle est en cuir très foncé et porte des inscriptions qui semblent avoir été faites au fer rouge ainsi que des motifs en argent. Par-dessus tout ça, il arbore une longue veste qui lui arrive aux chevilles. On dirait un mix entre un personnage de Final Fantasy et un mec connu d'Instagram.

« Hey je te permet pas espèce de reptilien ! Et rend moi mon argent maintenant ! »

Il lâche un bruit qui est entre un ricanement et un grognement et commence à s'éloigner de moi.

Je ne sais pas si je l'ai précisé mais je suis assez impulsive.

Alors il se peut que je vienne de lui lancer mon smartphone dans le dos.

Il se retourne après l'impact, se rapproche de mon portable, et, en me regardant dans les yeux avec un air vide, pose lentement sa botte sur mon portable et l'écrase.

Les craquements qui annoncent la fin de la vie de mon précieux sont horribles.

« Non ! Mais tu n'as pas de cœur ou quoi ? »

Il se retourne pour continuer son chemin. Une main m'agrippe. Non pas une main, des griffes. Je hurle du cri le plus fort et le plus aigu dont mon corps est capable.

Downall se retourne immédiatement et fonce sur la chose. Elle se détache de moi. Et je vois... un panda. Mais pas les pandas mignons que tout le monde aime. Non, un truc qui ressemble de très loin et avec un œil caché à un panda. Il a de longues pattes noires et griffues alors que le reste de son corps est grisâtre et semble avoir une autre texture. Là où devrait se trouver la tête de la créature se trouve un boîtier en métal.

Mais pourquoi ce truc m'a fait penser à un panda quand c'est tout sauf un panda ? Un panda mutant charcuté comme jamais, je veux bien, mais pas un panda tout court.

Les mouvements s'enchaînent rapidement entre mon sauveur et la chimère. Elle se jette sur Downall qui la repousse d'un coup de pied avant de planter le sabre qui vient de se matérialiser dans sa main dans son ventre. Immédiatement, un liquide noirâtre sort de la plaie et asperge Downall.

« Putain ! C'est toujours aussi dégueulasse. » il lance alors qu'il essuie son sabre sur le pelage du panda mutant.

2071Où les histoires vivent. Découvrez maintenant