Chapitre 2 : Un culot sans borne

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Damian avait mis quelques secondes à libérer Liam de son emprise. Sans un mot, il lui avait désigné l'un des deux fauteuils qui faisaient face à son bureau pour lui ordonner de s'asseoir et il s'était dirigé vers la porte.

Après avoir rapidement ajusté sa veste de costume grise et sa cravate en soie bleu roi – pour s'assurer qu'il apparaîtrait en public sans enfreindre les règles de la décence –, il ouvrit brusquement le battant. Son regard glacial détailla immédiatement le jeune homme que l'agence lui avait envoyé. Il était beau. Jeune. Blond. Tout ce qu'il aimait. Et pourtant, il ne lui faisait pas du tout envie. Il avait l'impression d'avoir de nouveau six ans et qu'on voulait le forcer à manger des brocolis après lui avoir agité sous le nez une part de fraisier. Comme cet enfant-là, il fronça le nez.

— Je ne vais pas avoir besoin de vos services finalement, déclara-t-il abruptement sans se donner la peine d'élaborer.

L'avocat claqua la porte aux nez du jeune homme et de sa secrétaire désabusée. Margaret Emerson n'était plus choquée de rien. Elle l'avait déjà vu faire preuve de moins de tact. Sans se préoccuper de celui qui venait de se faire refouler comme un malpropre, elle retourna pianoter sur son ordinateur, ses lunettes au bout du nez. Et par pianoter sur son ordinateur, il fallait comprendre jouer au poker sur Internet, pas travailler. Grâce à cette activité, elle doublait son salaire et passait ses vacances dans les casinos de Las Vegas avec ses copines. Elle avait fait de nombreux jobs dans sa vie. Des choses très diverses, parmi lesquelles nourrice, gardienne dans un musée et vendeuse dans un sex shop. Elle n'était pas fâchée que sa carrière se soit poursuivie ici, à Cardiff, avec ce patron qui semblait avoir autant de défauts qu'elle. Au moins était-elle dispensée de faire des efforts d'amabilité.

Enfoncé dans le fauteuil qu'on lui avait désigné, Liam essayait de reprendre consistance. Il avait placé ses mains sur ses genoux de sorte à dissimuler le mieux possible son érection et il se focalisait sur des choses dégoûtantes pour essayer de la calmer. D'habitude, ça fonctionnait plutôt bien. Sauf que c'était assez compliqué de penser à de vieux chewing-gums et des fruits en décomposition quand on avait devant soi un grand, beau et solide scandinave qui vous regardait fixement, comme s'il essayait de mémoriser chaque détail de votre visage. Dans un silence parfait.

Le nouveau propriétaire de la supérette était à mille lieux de ce que Liam aurait pu imaginer. D'ailleurs, il ignorait que des hommes comme lui existaient avant d'entrer dans ce bureau. Même alors que Damian ne le touchait plus, Liam sentait le désir brûler en lui, comme un feu secret impossible à éteindre. À vrai dire, il avait un peu peur. Il aurait voulu qu'on lui explique. Pourquoi s'était-il laissé faire ? Pourquoi espérait-il qu'il recommence ? Pourquoi voulait-il qu'ils aillent plus loin ?

Au bout d'un temps, le Danois prit une profonde inspiration, posa ses coudes sur le bois du bureau et joignit les mains devant lui en déclarant :

— Couche avec moi.

Les joues de Liam s'empourprèrent davantage et il fit doucement non de la tête.

— C'est du harcèlement sexuel. Je suis sûr qu'il y a une loi contre ça.

Damian se laissa aller contre le dossier de son fauteuil en soupirant théâtralement.

— Il y en a quelques-unes, oui. Si tu as besoin d'un avocat tu en as un devant toi. Et je suis prêt à accepter de ta part un paiement en nature, pour information.

Le Gallois roula les yeux, amusé par le toupet de son interlocuteur. Comme il ne répliqua rien, il le vit hausser les épaules avant d'abandonner :

— Tant pis. Je me disais que je pouvais toujours demander. Dis-moi vite ce que tu me veux, Liam Bellwether... Hm. Bellwether ? Tu es de la famille de Callum ?

LIAM  [Les Hommes de Cardiff #3] - Sous contrat d'éditionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant