Les Conquérants du Cercle T3 - L'Ordre du Soleil

Chapitre 9

Daerôn me conduit dans une autre cavité, jusqu'alors inconnue à mes yeux. La pièce est de taille moyenne, taillée à même la pierre comme les autres. J'y observe une table et des tabourets pareils à ceux du réfectoire, et une cavité creuse avec un matelas.

J'ai un mouvement de recul lorsque je devine qu'il m'emmène dans « sa chambre ». Je déglutis. Je ne suis jamais entré dans une pièce aussi personnel auparavant. A part pour la chambre de Nathaniel sur Namus. Mais j'essayais de survivre alors que là, j'essaye de comprendre. Mes sentiments sont à vifs.

Daerôn se retourne et m'invite à m'asseoir en face de lui sur un tabouret.

- Jared a besoin de la salle de réunion ce soir, mais nous serons tranquilles ici. Dit-il en s'asseyant à son tour.

J'essaye de ne pas me montrer trop curieuse en observant tout ce qui m'entoure. J'ai l'impression que si je regarde les différents objets de cette salle, j'en apprendrais plus sur son occupant. Mais la pièce est assez vide. J'imagine que Daerôn ne s'encombre pas de quelconque possession lorsqu'il est ici. Je me tourne à nouveau vers le Prince qui semble m'observer depuis un moment. Me retrouver ici, seule avec lui, pousse ma timidité à refaire surface.

- Est-ce que le QG te plaît ? Demande-t-il en souriant.

Je le remercie intérieurement de commencer par aborder un sujet léger.

- Oui. J'aime beaucoup cet endroit. Les Kalis sont plus sympathiques qu'on pourrait le croire. Et les femmes et les hommes sont sur un pied d'égalité.

Daerôn rit à mes paroles, en un rire joyeux et clair.

- Je me doutais que ça te plairait. C'est la première règle qu'on a mis en place. Pas de distinction.

- Comment as-tu créé tout ça ? Je demande soudain très intéressée.

Apparemment, ma timidité ne fait pas le poids contre mon immense curiosité.

Les yeux de Daerôn s'assombrissent pour revêtir une couleur plus intense, beaucoup plus déterminée.

- Ca n'a pas été facile. C'est un travail qui m'a pris plusieurs années.

- Les gens devaient se méfier de toi, en tant qu'héritier d'Aegnor.

- Ceux qui ne me connaissent pas, se méfient. Mais les autres, non. Ils ont confiance en moi.

C'est effectivement ce que j'ai pu observer ici. Les soldats ont un respect inébranlable envers Daerôn. Ils sont prêts à tout pour lui. Leur loyauté est sans faille. Il a su la gagner et non la leur prendre de force.

- Comment t'y es-tu pris ? Dis-je en me redressant.

- Je n'ai jamais voulu devenir comme mon père. Quand j'étais jeune, je croyais qu'il suffisait d'être les plus forts pour survivre. Puis, j'ai vu ce que mon père faisait subir à mon peuple. Et plus tard, j'ai vu ce qu'il faisait dans tout le Cercle. Et ça m'a fait peur. Je ne voulais pas devenir un dictateur cruel comme lui. Je voulais régner de manière juste et bienveillante. Alors à l'approche de ma majorité, j'ai observé les soldats. J'ai repéré ceux qui obéissaient par peur pour leur famille, ceux qui se rebellaient, ceux qui n'en pouvait plus de travailler sous le joug cruel de mon père. Je me suis investi dans d'autres missions pour gagner leur confiance. Je me suis sincèrement intéressé à eux. Je leur ai promis que sous mon règne, les choses changeraient. Sur Kalisto, il y a une règle qui existe concernant la royauté. Dès qu'un héritier atteint les 18 ans, ses sujets peuvent lui jurer fidélité à la place du roi en place. Beaucoup de soldats l'ont fait. Voilà comment, l'Ordre est né.

Daerôn à dû être témoin de beaucoup de choses horribles pour avoir cette détermination. A l'entendre, j'ai juste envie de le rassurer pour lui dire que ce qu'il a fait est extraordinaire et qu'il apporte beaucoup d'espoir aux gens qui le soutiennent. Mais, mille et unes autres questions me viennent en tête avant que je ne dise quoique ce soit. Je me retiens. Je ne veux pas le brusquer. Peut-être qu'il y a des choses qu'il ne veut pas dire, qu'il a besoin de garder pour lui.