CW : Psychophobie (bipolarité)
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Les jours suivants ont été longs et solitaires. Je ne parlais plus à Teresa. Quand je daignais manger avec la famille, l'ambiance aux repas était glaciale. Maman ne faisait aucune remarque, je ne sais pas si elle était fâchée, ou si elle attendait que mes rognes passent.
Au lycée, je me faisais minuscule. Je ne levais pas la main en cours, je m'efforçais d'arriver à l'heure – j'ai bien été chercher un ou deux billets, Rome ne s'était pas construite en un jour – et surtout, j'évitais Dylan Mercier comme la peste. Ni dans les couloirs, ni dans la file de la cantine, et surtout pas en aide aux devoirs. Il n'y venait presque pas, mais s'il s'y pointait, je m'arrangeais pour m'asseoir dans le coin opposé à son bureau.
L'animosité que j'éprouvais à son égard n'avait rien de nouveau, c'était le même sentiment qu'en début d'année, redoublé par l'amertume et la rancune du soir où il m'avait cassé mon skateboard. La colère de Dylan m'avait choquée. Oui, j'avais eu vent de sa moralité douteuse et de son manque d'empathie, mais il ne m'était jamais apparu comme une personne violente. Pourtant, il m'avait plaquée contre un mur et avait sauté à pied joints sur le skate sans hésitation. Un temps, lorsque je le considérais comme mon ami, j'avais cru découvrir le vrai Dylan. Derrière la façade du mec chillax et nonchalant, se cachait un type sensible et charmant. À présent, je m'interrogeais : quelle facette de lui était la plus authentique ? Et s'il m'avait manipulée tout du long ?
Jennyfer... Jennyfer m'avait rayée de sa vie. Les rares messages échangés sur les réseaux sociaux sont devenus inexistants. La déception de cette fin de relation prématurée m'a laissée un arrière-goût âcre dans la bouche. Une question subsistait : et si j'avais fait les choses mieux, à quoi notre histoire aurait-elle ressemblé ?
Pour quelqu'un qui n'avait plus personne, je tenais le choc. L'enchaînement des événements des dernières semaines m'avait engourdi. À force de souffrir, on finissait par ne plus rien ressentir. Un camion aurait pu me rouler dessus, je n'aurais pas protesté. Si je n'avais qu'un regret, c'était d'avoir perdu ma hargne et ma langue de vipère. Je n'étais même plus d'humeur à taquiner Étienne sur ses gilets moches.
En cours de sport, on pratiquait un nouveau module. On faisait du step, l'activité qui vous faisait transpirer comme une mule et regretter les chasubles puants de basketball. Mes genoux cicatrisaient lentement, des croûtes noirâtres s'étaient formées aux jointures. Une douleur piquante me prenait chaque fois que je levais la jambe, j'ai tenu sans me plaindre. Le bulletin du premier trimestre était arrivé, et dans son appréciation, le prof de sport avait écrit : « Gina doit cesser ses jérémiades perpétuelles sous peine de voir sa note en pâtir. » Il se prenait pour un poète, le prof de sport.
Entre deux sessions, je me suis étirée, Clémence Jourdain s'est assise sur le matelas à côté de moi. Dans un sourire, elle a mimé mes mouvements, allongeant sa jambe gauche et se penchant pour attraper ses orteils. Je n'atteignais même pas mon mollet, elle était pratiquement poitrine contre genou. Clémence était donc venue pour me narguer avec sa souplesse de danseuse. Génial.
─ J'ai un potin pour toi, a-t-elle soufflé.
Une alarme s'est allumée dans mon esprit. Le mot « potin » éveillait en moi le circuit de la récompense et relâchait une énorme dose de dopamine. J'étais suspendue à ses lèvres.
─ Dylan m'a demandée si on pouvait se remettre ensemble.
─ Mais non ! me suis-je exclamée.

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Dylan Mercier doit payer
Teen FictionAu lycée Ambroise Paré, les mauvaises filles et les mauvais garçons ont la cote. Mais la popularité ne protège pas des peines de cœurs, des amitiés déchues et des vengeances calculées. Trois élèves vont l'apprendre mieux que tout le monde. **** TOM...