Les discussions reprennent doucement, ma cousine se replonge dans les photos de son magnifique petit foetus. Les yeux de ma mère s'illuminent, elle me prend la main. Je sens arriver le moment fatidique.
-Quand est-ce que tu nous feras un aussi beau bébé, ma chérie?
Ça y est. Ça recommence. Chaque semaine, c'est pareil. Elle n'a que ce mot-là à la bouche.
-Tu as quand même 24 ans, il est temps d'y penser.
Je ne suis clairement qu'une génitrice aux yeux de ma mère. Elle commence à lister tous les avantages d'avoir un enfant, mais je ne l'écoute plus. Je sais très bien qu'elle veut un petit-fils simplement pour combler le dernier trou de sa vie familiale parfaite: Mariage, enfants, villa, chien, petits-enfants.
-Chloé, tu m'écoutes? Tu t'endors, là. Je me doutais bien que tu étais sortie, hier. Tu ne penses qu'à faire la fête.
-Je ne suis pas sortie.
-Tu étais avec Alexandre, alors? Ce gentil garçon, il ferait vraiment un bon père.
On parle vraiment du même Alex? Celui avec qui ma meilleure amie est partie? Celui qui vend de la drogue devant l'école de son petit frère?
-Ne le quitte pas comme tous les autres, ma chérie. Tu ferais une très grosse erreur.
Elle n'a clairement pas cerné le personnage.
-Tu devrais l'inviter plus souvent.
Sûrement pas. Il est venu une seule fois, après quoi il m'a fait un débrief d'une heure de ce qu'il pensait de ma famille. Il vaudrait mieux que ma mère ne sache pas ce qu'il a dit. C'était pas très élogieux. Et vachement vulgaire. Comme Alex, quoi.
Pour en rajouter une couche, mon père intervient.
-C'est vrai, ça, ce bon vieux Alex, comment il va?
Peut-être que je devrais leur dire pour notre rupture. Quoique. Ça m'obligerait à rester dans cette maison de malheur au moins encore trois heures, le temps d'expliquer en détail les défauts de mon ex, et de recevoir toutes les leçons de morale possibles et imaginables. Non merci. Même si je ne suis pas crédible, je préfère mentir.
-Il va bien.
-Eh ben ça a pas l'air de te réjouir.
-Il va bien, c'est tout. Qu'est-ce que tu veux que je te dise?
Mon père me scrute. Il a compris que quelque chose clochait entre Alex et moi. Si y a un truc que je peux dire sur lui qui ne soit pas un énorme défaut, c'est qu'il est perspicace. Bon, je vais pas lui jeter des fleurs non plus, je ne suis pas aussi bonne actrice que Lucas.
-Chloé, il se passe quelque chose avec Alex?
-Non, pas du tout. Tout va très bien.
-Je ne te crois pas. Dis-moi ce qu'il se passe.
Ok, on pourrait croire que mon père fait preuve de compassion. Mais c'est sans compter la remarque qui arrive juste après.
-Oh mon dieu Chloé ne me dis pas qu'en fait tu l'as quitté? Pour une fille sûrement? Tout ça c'est à cause de ton frère, ce...cette..
-Papa! C'est pas contagieux.
-Peut-être, mais ça reste une maladie.
-Chéri, ne reviens pas là-dessus s'il te plaît.
-En tout cas, tant qu'il ne nous présentera pas de petite amie, il n'est pas le bienvenu ici.
-Putain, papa, lâche-le un peu.
Mon père se ressert du vin en soupirant, comme d'habitude. Même quand mon frère n'est pas là, il a besoin de remettre ce sujet sur la table.
-Tiens, justement, la tapette t'appelle.
C'est bizarre. Il sait que nos parents détestent qu'on utilise nos téléphones pendant un dîner de famille, pour ne pas casser l'ambiance. Enfin vu l'ambiance, je préfère répondre. J'espère qu'il ne lui est rien arrivé.
-Lucas, tout va bien?
-Non. J'ai besoin de toi.
J'ai l'impression qu'il pleure.
-T'es où?
-Chez toi.
Il a l'air complètement essoufflé. Merde, je crois qu'il fait une crise de panique.
-Ok, respire. J'arrive.
-Bah alors, ne me dis pas qu'il s'est fait larguer?
Ce sourire en coin...Je peux pas laisser passer ça.
-Ça te ferait plaisir, hein? Tu te rends même pas compte qu'il l'aime vraiment. Il ne fait pas ça pour te provoquer, et il ne va sûrement pas débarquer un de ces jours avec une petite amie comme si de rien n'était. Sa vie est aux côtés de Sam, c'est comme ça qu'il l'a choisit.
-Ne raconte pas n'importe quoi, Chloé, je ne vois pas comment il peut choisir de vivre comme ça, c'est simplement dégueulasse.
J'abandonne, ça ne sert à rien de m'acharner contre mon père, il n'acceptera jamais que son fils soit amoureux d'un homme.
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Struggle, you'll be alright
RomanceParfois la vie s'acharne sur nous. Et on galère à remonter la pente. Vous voyez, quand vous êtes sûr de déprimer mais que tous les gens autour de vous s'en foutent royalement, ou vous disent que ça passera? HAHAHA. J'ai juste envie de leur dire Than...