Le front contre la vitre, j'admirais le paysage. Des champs à perte de vue, le soleil était au rendez-vous. On venait d'emménager depuis quelques jours dans ce petit village. Ma mère avait choisi la campagne pour changer d'air. Aujourd'hui, c'était la rentrée, j'entamais mon ultime année de lycée dans un stress certain. Un écouteur enfoncé dans l'oreille diffusait Fever de Dua Lipa et Angèle, pensant à Brenda, je savais au fond de moi que je devais au moins essayer de mettre de la distance entre nous. Pourtant chaque jour nous nous écrivions, bien sûr je ne pouvais pas oublier ce qui s'était passé l'année dernière, mais après tout, rien n'était de sa faute. J'aurais dû prendre exemple sur elle, nier les faits. Ne pas m'assumer était pour moi inacceptable, mais j'avais bien changé depuis. Je deviendrai cette autre personne, celle qui m'éviterait de nombreux soucis. Mes pensées vagabondaient comme d'habitude. Je m'étais finalement refermée sur moi-même pour que rien ne m'atteigne plus jamais. Ma mère au volant ne cessait de me jeter des coups d'œil. Je savais qu'elle voulait me parler, cependant je ne faisais aucun effort pour l'aider. Je n'y arrivais pas. Après plusieurs secondes, elle se décida enfin :
— Comment tu te sens aujourd'hui ?
— J'aurais aimé continuer mes cours à la maison...
— Tu sais bien que ce n'est pas une solution.
— Pour qui au juste ? Moi je trouve que c'est une excellente idée, mais je n'ai pas mon mot à dire, donc il est inutile d'en discuter.
— S'il te plaît, ma puce, même ton psychologue te le dit, il faut que tu apprennes à vivre de nouveau, à avoir confiance. Tu ne peux pas rester enfermée constamment dans ta chambre. Il est impératif que tu aies une vie sociale et tu dois tout essayer pour être heureuse comme avant.
— Je n'ai besoin de rien ! J'avais une vie sociale et regarde où j'en suis... Regarde où tout ça m'a menée !
— Il faut pourtant qu'on aille de l'avant. Tu peux recommencer à zéro ici, c'est pour ça que nous sommes parties.
— On est bientôt arrivées, inutile de poursuivre, je ferais ce que j'ai à faire pour ne plus jamais souffrir.
— Pourquoi tu ne me parles plus ? Avant tu te confiais. Tu restes constamment dans ta chambre, tu me manques, tu sais... j'ai besoin de ma fille à mes côtés. J'ai envie de passer du temps avec toi qu'on s'amuse, qu'on sorte, qu'on rigole ensemble comme avant tout ça...
La voiture se stoppait devant mon nouveau lycée, les paroles de ma mère tournant en boucle pendant que j'admirais la façade. Plusieurs bâtiments gris et rouge étaient séparés par une grande cour au milieu. Je devais avouer qu'il était assez moderne. Beaucoup d'élèves étaient déjà présents, ce qui n'arrangeait pas mon rythme cardiaque. En me retournant vers ma maman, je fus marquée par son regard. Les yeux rougis, elle était à deux doigts de pleurer. Mon ventre se noua, je la rendais triste.
— Je suis désolée, maman, je ferai un effort, promis. Passe une bonne journée, à ce soir.
Après lui avoir déposé un bisou sur la joue, je prenais mon courage à deux mains, et je sortais de la voiture, sac à dos sur l'épaule. Je pris quelques grandes inspirations pour me calmer. Ça va aller, personne ne me connaît ici, pensais-je. Je me rendais au tableau d'affichage pour voir quelle salle de classe m'était attribuée : la 106 b. Cette année était celle de mon bac S, j'allais me concentrer un maximum sur mes études et éviterais de penser à autre chose, essayant d'obtenir une mention pour mon diplôme. Une fois repérée, je me dirigeais vers la salle, et m'installais confortablement contre le mur, mon téléphone en main. Il me restait quelques minutes avant que les cours ne commencent.
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L'enfer d'Emmy Chapitre 1
RomanceEmmy, 17 ans a vécu un véritable cauchemar dans son ancien lycée à cause de son homosexualité. Avec sa mère, elles déménagent pour recommencer leur vie à zéro. Emmy fait le choix de devenir une autre personne pour ne plus jamais subir la méchanceté...