Cigarette ou sucrerie

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     Erica toqua à ma porte, me déposant une nouvelle pile de dossiers à traiter avant la fin de l'après-midi. Elle semblait concernée par ma charge de travail, se mordant la lèvre avec compassion.

     - Vous allez réussir à tout traiter avant ce soir?
     - Il faudra bien Erica. Moi qui espérais pouvoir aller boire un café en sortant du travail aujourd'hui, je pense que comme toute la semaine dernière je vais pouvoir m'asseoir dessus.
     - Bon, je vous souhaite beaucoup de courage. Je vous laisse travailler Monsieur Hale.

     Elle s'éclipsa, me laissant à ma surcharge de boulot. Je soupirai exaspéré, fixant la pile qu'il me semblait déjà impossible d'entamer. Je jetai un œil vers mon sac, réalisant que ce n'était toujours pas aujourd'hui que j'allais pouvoir lui donner.
     J'avais espéré pouvoir recroiser le chemin du jeune prostitué au coin de mon café durant les jours passés, histoire de le saluer rapidement, mais le temps ne m'en avait pas été donné jusqu'ici. J'avais beaucoup pensé à lui à la suite de notre rencontre. J'avais revu ses yeux s'illuminer sous la lumière de sa cigarette s'embrasant sous ses bouffées, ou encore ses membres trembler de froid sous l'épaisseur ridicule de son sweat. Je devais l'admettre, il m'avait intrigué ce garçon.

     Mon dos était particulièrement douloureux ce soir et encore une fois la nuit accompagna ma sortie des bureaux. Même routine que chaque jour, fermer à clé la grande porte et mettre en place l'alarme. J'étais fatigué et en miettes, mais aujourd'hui je n'avais vraiment pas envie de rentrer directement chez moi. Il était bientôt vingt-et-une heure, mais je voulais mon café coûte que coûte.
     Je traversai la rue d'un pas décidé, détournant légèrement mes pas vers le local à poubelles en arrivant sur le trottoir d'en face. Je ne m'étais pas attendu à le retrouver ici, mais le petit prostitué était bien là. Il était assis sur une caisse en bois, probablement anciennement une cagette à fruits, comptant quelques billets en les faisant passer un à un entre son index et son pouce. Inévitablement, sa cigarette avait trouvé place entre ses lèvres, la cendre manquant de peu de tomber sur les papiers qu'il tenait entre ses mains. Comme ayant un sixième sens pour repérer ma présence, le garçon m'aborda à nouveau sans même lever les yeux de son bifeton.

     - On a changé d'avis grand père?
     - Absolument pas. Je suis juste étonné d'encore te voir ici à cette heure et dans le froid.
     Rangeant les billets en chiffon dans sa poche, le brun se leva et s'approcha de moi avec le même pas assuré que la dernière fois, me provoquant à nouveau ce réflexe de léger recul comme si il était un danger pour moi. Ce qu'il était probablement un petit peu d'ailleurs. Il s'arrêta à mon niveau, me fixant de ses iris profondément noirs. Il me regardait, là, sans rien faire d'autre que de fumer. Je déglutis, ne sachant pas vraiment où me mettre à ce moment là. Il prit finalement la cigarette entre ses doigts, me soufflant dessus comme je détestais qu'il le fasse.
     - Qu'est-ce que ça peut te foutre.
     - Pardon?
     - Non, sérieusement, je me demande pourquoi ça te préoccupe. Je suis là parce que personne ne m'a encore sollicité pour le Grand Chelem Ce soir. Aujourd'hui les gens sont pressés que veux-tu.
     Il passa son doigt le long des boutons de mon manteau puis tira légèrement mon écharpe pour rapprocher mon visage du siens, me lançant un air sournois.
     - Tu es volontaire pour me payer un hôtel du coup?
     Je me dégageai d'un geste sec puis remis en place mon écharpe, la frottant en espérant qu'il n'ait pas mis d'odeur de cendre dessus.
     - Non, je ne suis pas venu pour ça.
     - Pourquoi tu me fais perdre mon temps alo-
     Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase, je venais de lui glisser une sucette au citron dans la bouche. Je l'avais tiré de mon sac, le paquet attendant déjà depuis plusieurs jours d'être utilisé. Je l'avais acheté en pensant à lui, me disant que c'était toujours meilleur que des cigarettes. Il haussa les sourcils, saisissant le bâton pour sortir le bonbon qui glissa entre ses lèvres. Il rit, le faisant tourner entre ses doigts en fixant la boule de sucre.
     - Bah ça, on me l'avait jamais faite celle là.
     - Je te donne le paquet de sucettes contre ton paquet de cigarettes.
     - Moi j'aimerais bien que tu me donnes un autre genre de paquet mon grand. Allez, tu vas pas me dire que tu ne veux rien alors que tu m'offres des sucettes. Tu peux pas être sérieux.
     Sans que je ne le vois venir, il se colla à moi en passant ses bras autour de ma taille, léchant sa sucette de manière très suggestive.
     - On dit que j'ai une langue de velours. Laisse-moi te le montrer sur un autre genre de boules mon grand.
     Je le dégageai à nouveau, cette-fois-ci définitivement persuadé que je sentais le tabac. Je hochai la tête, lui déposant le paquet dans les mains. Il avait l'air particulièrement surpris de mon geste, serrant les bonbons contre son torse.
     - Euh.. Merci?
     - Ne rentes pas tard. Tu vas tomber malade.

     Je le quittai sans ajouter un mot, sentant son regard insister dans mon dos. Je rougis, me rendant compte de l'échange honteux qui venait de se dérouler entre nous. Je venais vraiment d'offrir des sucettes à un prostitué avant de le planter sans dire au revoir. Palpant mes poches, je me rendis alors compte que ce petit bâtard m'avait volé mon porte feuille ! C'était certainement arrivé durant son étreinte surprise. Incapable de faire face à cette situation plus que gênante, je ne m'arrêtai pas au café, n'ayant de toutes façons plus d'argent sur moi, et rentrai directement à la maison. 

Hooker Stiles ( Sterek Fanfiction FR ) [R18]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant