Ch 1 : le chaos

409 16 17
                                    

J'ouvre les yeux.
Je ne vois rien. Un blanc flou recouvre tout.
"Suis-je en vie ? "me demandai-je.
Soudain, ma vue revient graduellement, révélant peu à peu des taches de vert. À peine quelques secondes plus tard, ma vision se rétablit entièrement. Aussitôt, je grimace. Ma jambe me fait atrocement mal. Je tente de me relever, mais ma main glisse sur une pierre mouillée. J'écarquille les yeux, sauf que je n'ai pas le temps de réagir. Tout ce que je peux sentir, c'est mon corps engourdi qui tombe. Je fais une chute d'au moins 10 mètres, et l'eau m'avale. Je coule, sans réagir, et me laise envahir par les ténèbres. Et tout à coup, mon esprit se reconnecte.
"Je suis vivant" , me dis-je.
Je le répétai intérieurement, deux, quatre fois, et mes membres finissent par réagir. Je force, je me démène pour remonter, et je finis par émerger, dans un grand fracas d'éclaboussures. L'eau est trouble et froide, et je m'en rends compte pour la première fois. Aussitôt revigoré, je vois le rivage. Je nage, et je reprends bientôt pied sur le fond rocheux. Haletant, je me hisse, mais mes muscles me font souffir. La déchirante douleur se répand partout dans mon être et mon torse s'écrase sur le bord, mes jambes étant toujours dans l'eau glaciale. Je respire, j'exalte l'air chaud qui sort de mes poumons, et j'ai envie de tout abandonner. Mais la souffrance, comme si elle avait été créée pour ça, me ramène à la réalité. Je relève la tête, et contemple l'endroit où je me trouve. Je suis dans la jungle. D'immenses arbres tropicaux se dressent partout devant moi. Je pivote lentement, parcourant des yeux le profond vert de la forêt. En faisant un demi-tour, je remarque que je sors tout juste d'un petit lac en hauteur, et qu'une chute d'eau y tombe avec fracas de l'autre côté. Je comprend que c'est probablement de là que je suis tombé. Je baisse les yeux sur moi-même, et je constate que je n'ai pas de blessure grave, juste des égratignures...et tout plein de bleus. C'est alors que je me pose la question que j'aurais dû me poser dès le début :
"Où suis-je ?"
Je n'arrive pas à m'en souvenir. Décidé, je passe la main sur mon front pour dégager les mèches blondes cendrées et trempées qui me retombent devant les yeux. Malgré mes articulations douloureuses, je marche le long du petit lac et j'atteint la falaise. Je l'escalade, m'aidant des racines des arbres et des rochers humides. Dès que j'arrive en haut, un bruit très étrange se manifeste. Intrigué, je tend l'oreille et je me rends compte que ça vient de droit devant. Je plisse les yeux. C'est comme une suite de quliquetis, on dirait une sorte d'insecte, mais multiplié par 20. Perplexe, je tourne à petits pas, suivant des yeux la provenance du bruit, qui semble se déplacer en demi cercle autour de moi. Je n'ose pas bouger, et je reste le plus calme possible. Après quelques secondes, le bruit s'éloigne et la jungle redevient silencieuse. Je reste planté là, et puis j'entend un autre bruit. Une explosion. Alerté, mon regard se dirige vers la source de la détonation, et j'aperçois soudain une grande colonne de fumée sombre s'élever en contrebas. J'arrive un peu à voir au travers de la voûte végétale, il y a l'océan...
Et d'un coup, tout me revient.
L'avion !! Érika !!!
Je ne perds pas une seconde de plus. Je me précipite dans la jungle, dévalant la pente à toute allure. Sans m'arrêter, je cours au-travers d'un grand champ de bambou, et j'atteint finalement la plage. Le vent chaud de la mer me submerge, et une vision d'horreur m'attend juste à côté. C'est l'avion, écrasé et en morceaux, éparpillé dans le sable un peu partout.
"On s'est écrasés" pensai-je avec horreur.
Il ne reste qu'un réacteur attaché au fuselage. C'est sûrement l'autre qui a explosé. Je m'approche lentement d'abord, puis je me mets à courir dans le sable, creusant des profondes empreintes et rendant ma progression maladroite. Je me précipite de l'autre côté d'un paquet de débris, et j'aperçois une fille blonde crier de désespoir juste à côté. Je voudrais bien aller l'aider, mais j'ai d'autres préoccupations. Je dois trouver Érika. Plein d'autres gens s'agitent, en criant ou en pleurant de terreur à travers les ruines de l'avion. Haletant et angoissé, je cherche mon amie des yeux. Elle était assise dans la rangée juste derrière la mienne, elle ne pouvait donc pas être bien loin. Du moins, je l'espérais. Je me tourne et me retourne, parcourant la vision de chaos qui évolue autour de moi. Je vois un homme chauve se relever lentement, l'air ébahi. Plus loin, un autre homme en complet noir est en train d'essayer de réanimer une femme à la peau noire avec un massage cardiaque, et une jeune femme, enceinte je crois, se tient près des décombres. Paniqué, je ne vois toujours pas mon amie. Je commençais à trembler, lorsque soudain, mon regard s'écarquille. J'entends sa voix m'appeler, juste derrière.
- JOSH !
- ÉRIKA !! Hurlai-je, après m'être retourné en catastrophe. Je la vois, mais quelque chose ne va pas. Mes yeux cherchent, et trouvent. Elle est directement sous l'aile de l'avion. L'aile qui menace de tomber dans les prochaines secondes, et qui menace de la tuer. Je m'élance, et ne comprenant pas, elle articule :
- J...Josh ?
Je saute et me jette sur elle, l'attrapant au passage. Je tombe sur le dos, avec elle emprisonnée dans mes bras qui reste figée de stupeur. En arrière, l'immense aile de métal tombe dans un fracas épouvantable...et explose. Le feu jaillit à une vitesse incroyable, et fait exploser le second réacteur. À quelques pas, je tente de protéger Érika du mieux que je peux. L'explosion m'assourdit pendant quelques secondes, mais nous sommes saufs. Le souffle enflammé a passé à seulement un mètre au dessus de nous, et nous l'avons échappé belle. La fumée se dissipe progressivement. Je mets quelques instants avant de la libérer de mon étreinte, et elle se lève lentement, les yeux toujours arrondis d'étonnement qui fixaient l'endroit où elle aurait pu terminer ses jours. Je me relève à mon tour, ce qui la sortit de sa torpeur. Elle s'écrie :
- Josh ! Mon dieu, tu vas bien ?!!
Je relève la tête et observe son beau visage un peu fripé par tous les récents événements. Elle a perdu ses lunettes, et ses profonds yeux verts étincèlent au-dessus de son nez fin. Ses cheveux blonds bouclés flottent dans le vent, et une fine éraflure ensanglantée traverse sa joue droite. Je me redresse, la dépassant de quelques centimètres et je réponds :
- Oui. Oui, ça va.
Elle ne peut pas se retenir plus longtemps, et elle m'enlace fortement de ses bras dénudés. Elle réprime un faible sanglot et dit :
- J'ai eu...J'ai eu si peur...
- Non, ça va, on est en vie, c'est ce qui compte, fis-je en tentant de sourire.
Elle sourit et m'étreint plus fort pour ensuite me lâcher et reculer d'un pas.
On se retourne ensuite tous les deux vers la mer, qui est agitée de vagues d'un turquoise saisissant. Notre regard, comme sychronisé, se lève dans le ciel bleu de l'après-midi, puis se dirige à l'opposé de la plage. De hautes montagnes couvertes de jungle s'élevaient au-dessus de la ligne de palmiers, et alors qu'on ne détachait ni un ni l'autre le regard de la vue imprenable sur les falaises vertes, je dis
moi-même incertain :
- Mais où sommes-nous ?

LOST : the survivorsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant