Chap 8. Les masques.

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Mélanie Nkeng se regarda au miroir,et se dit :

_Je suis encore belle ! Qu'est-ce que les autres filles ont, que je n'ai pas ?
Pourquoi certaines réussissent financièrement leur vie et d'autres pas?
Elle mit ses bracelets couleurs or à ses poignets,et regarda le résultat final.

Sa poitrine se dessinait sur son corsage rouge moulant.
Sa taille, était bien ajustée par son jeans noir, et une ceinture fine, couleur argent.
Son chignon redonnait l'éclat à son visage arrondi, encadré par des boucles de perles blanches.

Elle s'approcha de l'armoire, où était rangé son album photo.

Elle l'ouvrit lentement,et regarda avec nostalgie la photo de ses deux filles et leur grande-mère restées au village.
L'émotion la submerga pendant un instant.

Elle le referma d'un coup sec et le déposa là où elle l'avait pris.
Elle se rappella que sa mère lui avait demandé d'envoyer de l'argent pour la semence du maïs et des haricots.
La saison de pluie approchait et les travaux champêtres recommencaient.
Elle lui avait envoyé une lettre pour lui dire que les filles étaient studieuses, appliquées dans tout les aspects de leur vie quotidienne.
Elle était fière de ses filles,et c'est tout ce qui comptait pour elle.

Une sonnerie stridente la tira de ses pensées .
Elle ouvrit la porte d'entrée.
La bailleresse la bouscula, et entra sans être invitée.

_Comment vas -tu?

_Ca va!

_Tiens! tes factures d'eau et d'électricité.

Maman Adèle,la bailleresse fit le tour de la maison du regard,et lui dit:

_Ta Maman et tes enfants ça va ?

_Oui ça va .
S'il te plaît, je pourrais payer ces factures dans deux semaines.
Accorde-moi du temps.

_Heeeeh! Encore du temps ?
Tu abuses de notre bonté !
Chaque mois tu payes tes factures avec un retard d'un mois.
Tu me dois encore 2000 FCFA du mois dernier.
Mon mari est fatigué de toi .
Crois-tu que pour nous aussi c'est facile ?

_Pardon!
Parles au père !
Dis lui de patienter.
Supplia Mélanie.

Se sentant obligée de coopérer, parceque s'étant déjà liée avec Mélanie,par la familiarité, Maman Adèle, la bailleresse la regarda profondément et lui dit avec autorité:

_Tu pleures toujours que tu n'as pas d'argent,mais tu es toujours bien habillée.
Où vas tu à présent ?
Je ne veux pas les hommes dans ma concession .
J'ai mes petits-enfants avec moi.

_Maman Adèle, tu me connais.
Je suis une fille sérieuse.
Je vais juste me détendre en compagnie de mes amis.
Je te garde une bouteille de vin demain.

_Merci ma fille.
Je vais parler au père pour toi.

La bailleresse partie, Mélanie pris son petit sac noir,vérifia si sa carte d'identité était bien là,son argent de taxi,son téléphone, sortie et referma la porte de chez elle.

Le troisième taxi accepta sa proposition et la mena à la petite soirée récréative qu'avait organisé ses amis.

Dans le confortable taxi qui la menait à destination, elle se projecta dans le passé.
Quand elle était petite et qu'il lui arrivait une difficulté,(ce pouvait être une blessure,ou les moqueries de ses camarades à cause de son sixième doigt qui poussait sur sa main gauche),sa mère lui disait :

_Mélanie serre le cœur !serre le cœur.

Elle avait appris à serrer le cœur, à batailler pour s'en sortir gagnante.

A son arrivée à Douala, elle avait lavé la vaisselle dans un restaurant pendant 2ans, fait le service de ménagère pendant encore 2ans, avant de s'offrir une formation de coiffeuse esthéticienne dans un centre de bien-être.

Grâce à sa ténacité, elle avait pu convaincre une cliente aisée d'ouvrir un salon de coiffure dont elle était la gérante.

Son objectif, était de posséder son propre salon de coiffure.
Elle était un cœur à prendre, malgré qu'elle disait à tout le monde qu'elle était casée.

La vie l'avais formé, à force de privations et de maltraitances.
Son mari était décédé, après la naissance de son deuxième enfant.
Elle occupait un studio avec Christelle, avant que celle-ci se marie.

Maintenant , elle vivait seule,en attendant,une prochaine colocataire.
En effet,les retards de paiement de factures s'accumulaient.

Elle voulait ressembler à ses amis,qui portaient des vêtements de marques.
Voila pourquoi elle payait toujours ses factures en retard.

Pourtant,la propriétaire du salon de coiffure dans lequel elle travaillait était toujours satisfaite de sa gestion.
Son pire défaut, c'était les mensonges,et les manigances.

Elle inventait,des histoires, pour se faire passer pour ce qu'elle n'est pas.
Elle mentait pour se donner de l'importance, pour se sentir intelligente; tout en s'inspirant des mensonges des autres, qu'on lui faisait boire à l'aide d'un entonnoir pour la rendre envieuse.

Le taxi la tira de ses réflexions en se rangeant du côté piéton pour la laisser sortir .

Elle paya sa course ,et fut interpellée par un couple en voiture.

C'étaient ses amis, qui se rendaient aussi à la soirée festive.

Elle prit place à l'intérieur du véhicule, et, dit bonsoir à tous les autres passagers.

L'homme assis à ses côtés, répondit bonsoir ,sans un regard pour elle .
Elle lui lança un regard,et constata qu'il avait un masque .
Elle se rappela qu'elle avait aussi son masque dans son sac .
Elle le retira de son sac, et le porta à son tour par respect pour  les  autres.

Ils entrèrent dans le quartier,et elle reconnue l'imposante bâtisse qui se tenait devant elle.

"Cette maison est vraiment belle"pensa t-elle.
Tout les passagers sortirent du véhicule.
Elle se dirigea au salon en Compagnie des autres.
Elle avait du mal à reconnaître les autres, car tous portaient des masques, pour se protéger du Covid-19.
Elle constata qu'ils  n'étaient pas nombreux.
Encore des mesures de protection pour éviter la propagation de la maladie.
Elle trouva un coin et s'assit.

Arlette son amie vint la rejoindre

_Pourquoi tu joues à la timide ?
C'est moi qui t'a invité.
Viens, je te présente à mon frère.

_Ton frère qui vit en Espagne ?

_Oui! Il est là pour 2 semaines.

Elles se dirigerent dans la cour principale de la maison,et le trouvèrent debout , discutant avec ses amis.

Durant les quelques minutes  qui s'écoulèrent pendant les présentations, elle le jaugea des pieds à la tête.

C'était le même homme  qu'elle avait salué dans la voiture tout à l'heure.
Lui aussi ne se laissa pas intimider,il la fixa du regard, avant de lui dire :

_On peut se tutoyer!
Arlette me parle toujours de toi en termes élogieux.
J'espère que c'est ce que tu es vraiment.

_Arlette m'apprécie pour ce que je suis et je suis honorée. 
Répondit-elle en souriant.

Il se retourna vers ses amis comme pour conclure ce dialogue embarrassant.

Elle rentra dans son coin,et resta absorbée par ses pensées les plus intimes:
"Elle n'était pas contente de la précarité de sa vie.
Dans son village,elle était respectée. Ça se disait qu'elle avait réussi sa vie à cause des cadeaux qu'elle rapportait, quand elle rendait visite à sa famille. Pourtant,ici en ville,elle était la dernière des dernières".

La Douleur De L'amour.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant