Chapitre 3: ABBYGAIL

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Enfin, j'arrive aux abords de Cheyenne

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Enfin, j'arrive aux abords de Cheyenne. C'est presque un soulagement, mais aussi un poids. J'en peux plus de conduire. Pour être honnête, je n'ai pas l'habitude de rester aussi longtemps au volant. Ma mère m'a toujours tenue loin de tout ce qui touche aux motos, mais je suis certaine que c'est dans mes gènes. D'habitude, c'est sur ma Harley que je roule, ma petite Iron, celle que mon père m'a aidée à acheter. Quand il a su que je voulais une moto, j'ai vu ses yeux briller. C'était un de ses rêves pour moi, et le mien aussi. Bien que j'adore ma Mustang, rien ne vaut la sensation de liberté que j'ai en roulant sur ma Harley. Et demain, elle sera enfin là, arrivée avec le camion. Je suis impatiente de la retrouver.

C'est un peu étrange d'être ici, je n'ai presque aucun souvenir de cette ville. Pourtant, c'est bien ici que je suis née, que j'ai vécu les deux premières années de ma vie, entourée de gens qui auraient pu être ma famille. J'ai quelques regrets, bien sûr, mais la vie a fait autrement. Ce qui m'angoisse aujourd'hui, c'est de voir comment mon père évolue dans ce milieu. Je le connais, je sais qui il est, mais là je suis chez lui, au cœur de son monde, et c'est... bizarre. Je suis partagée entre l'appréhension et une étrange joie. Parce qu'au fond, je sais bien que je ne pourrai pas éviter ce monde de motards. Et je suis presque certaine que mon père a oublié ce que je lui avais dit : je ne veux pas faire partie de tout ça. Mais la première chose que je vais faire, c'est m'aventurer dans l'antre des Jagged. Et là, je n'ai plus le choix.

Je n'ai pas envie de faire partie de cette famille de motards, mais il faut bien admettre que c'est la réalité. Et puis, une partie de moi se demande si je pourrais réellement y échapper. C'est en traversant le panneau d'entrée de Cheyenne que mon estomac se serre. Les premières maisons défilent, puis le paysage devient plus urbain. Il y a quelque chose de déprimant dans la grisaille de cette ville, mais aussi une sorte de familiarité. Ce n'est pas chez moi, mais c'est comme si ça l'avait été. J'ai l'impression de revoir des souvenirs flous, des images lointaines d'un autre temps.

Je suis arrivée à un carrefour. Le feu est rouge. Ça me donne une occasion de souffler et de regarder autour de moi. À ma droite, la rue semble mener au centre-ville, avec des magasins qui semblent figés dans le temps. Tout droit, je vois une station-service, et à gauche, il n'y a que de longues rangées d'arbres qui semblent se fondre dans une rue tranquille, un peu hors du monde.

Le feu passe au vert. Je m'engage à gauche et, alors que je commence à tourner, un connard en moto me fait une queue de poisson, m'obligeant à piler. Je klaxonne et je lui lance un torrent d'insanités par la fenêtre. Lui, il se contente de me répondre par un doigt d'honneur et disparaît dans la poussière.

Putain de connard !

Je reprends ma route, le cœur battant un peu plus vite. Après quelques minutes, un garage apparaît à ma gauche et à droite, le club des Jagged se dévoile enfin. Comment je le sais ? Les Harley garées devant le bar, bien sûr, et le nom du club inscrit en lettres rouges sur le panneau. Je n'hésite pas, je me gare dans l'allée, loin des motos, et coupe enfin le moteur.

Ma tête repose contre le volant. Je souffle un grand coup, épuisée. J'ai traversé la route aussi vite que possible, sans m'arrêter plus que nécessaire. Trois arrêts seulement, juste pour l'essence et un peu de répit. Mais maintenant, c'est fini. Je suis là. Enfin.

Je sors de la voiture, et là, je vois une silhouette se dessiner au loin. Un sourire me prend d'assaut lorsque je reconnais mon père, marchant vers moi avec un sourire aussi grand que son cœur. L'espace d'un instant, je redeviens cette petite fille qu'il n'a pas vue depuis longtemps, et un frisson me parcourt. Je m'élance à sa rencontre, presque en courant, et je lui saute dans les bras. Même si je ne suis plus une enfant, je me sens comme telle dans ses bras.

- Papa ! Je suis tellement contente de te voir ! Lui dis-je en l'embrassant sur ses joues, couvertes de barbe, qui me piquent un peu mais c'est un détail.

- Ça va, ma fille ? Tu as bien voyagé ?

Je le regarde et souris.

- Long, mais ça va. À part qu'un abruti m'a failli renverser. Si je le croise, il est cuit. Il a failli abîmer ma belle Mumu !

Ouais, j'ai donné un nom à ma voiture. Mumu. Quoi de plus normal ? C'est ma voiture, après tout. Et certains l'appellent Titine, moi c'est Mumu. Rien de grave.

Le rire de mon père emplit l'air, et je me joins à lui, un sourire sincère aux lèvres. Sa bonne humeur est contagieuse.

- Je n'aimerais pas être ce pauvre type, lui, s'il savait à quel point tu tiens à ta Mustang !

Je me tourne alors et remarque un groupe d'hommes, six en tout, qui nous observent avec une curiosité discrète. Mon estomac se tord. Voilà, ça y est, je suis entourée de bikers. Je veux être calme, mais un petit stress m'envahit. Je les observe de biais. Ils ont l'air sympas, mais il y a toujours cette distance, cette frontière invisible entre nous. Je les vois comme des étrangers, même si ce sont les "hommes" de mon père. Il fait signe à tout le monde de s'approcher et me les présente un par un : Byron, le vice-président, Fox le lieutenant, et les autres : Jacob, Cameron, Elias, Aaron. Je leur souris, un peu nerveuse, mais ils me rendent mon sourire avec une chaleur sincère.

- On est ravi de te rencontrer, me lance Taylor, un sourire amical aux lèvres.

- Grave ! Maintenant que t'es là, papy va arrêter de nous saouler avec toi, dit Byron en me donnant une petite accolade.

- Fermez-la, les morveux ! Crie mon père, mais c'est pour rire.

Je souris en retour, un peu plus détendue. Je les trouve sympathiques, tous. Pourtant, mon regard se perd, il erre un peu partout et finit par s'arrêter sur lui. Là, derrière tout le monde, adossé contre le mur, il est comme une apparition. Grand. Très grand. Je dois lever la tête pour le voir correctement. Il doit mesurer au moins un mètre quatre-vingt-cinq, peut-être plus. Ses cheveux bruns sont coupés courts, sa barbe de trois jours cache à peine un visage dur et attrayant. Ses yeux... Merde. Ses yeux noisette, presque verts, me transpercent. Une onde de chaleur me parcourt et je me rends compte que je ne peux plus détacher mon regard de lui.

Abby, s'il te plaît, ferme la bouche avant de baver !

Il dégage une aura de puissance tranquille. Sa silhouette est imposante, son t-shirt moulant ses muscles saillants. Il n'a même pas besoin de bouger pour que l'attention de tout le monde soit attirée. Mais moi, c'est son regard qui me cloue sur place. Il me fixe comme si j'étais son prochain défi.

Je me sens déstabilisée, un peu perdue sous la pression de son regard. Un coup de chaud m'envahit, mais je ne cède pas. Non, ce n'est pas possible. Il ne faut pas que je me laisse troubler.

Mon père suit mon regard et lève les yeux au ciel avant de faire un signe de tête à l'homme pour qu'il s'approche. Il s'éloigne du mur, soufflant la fumée de sa cigarette d'un air nonchalant, et se dirige vers nous avec une assurance qui m'irrite presque. Il s'arrête devant moi, les bras croisés, et me fixe de cette façon qu'il a, comme s'il savait déjà tout de moi.

- Abby, voici Hunter. Hunter, voici ma fille Abbygail.

Merde. Merde. MERDE. 

Skull Of Death [RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant