Chapitre 2: La sentence

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"Nous la garderons, elle sera prisonnière dans une cellule en attendant que je lui trouve une sentence." a annoncé Barbe-Noire

Un pirate immonde qui sentait la vieille transpiration et le rhum à plein nez m'emmena avec violence dans leur prison. Il me balança dans une cellule lugubre qui n'avait pas l'air d'avoir été nettoyée depuis une éternité. Un vieux matelas taché et déchiré était suspendu au mur quelques centimètres au-dessus du sol et faisait guise de lit. Une couverture immonde était posée sur le vieux matelas. Un tapis de poussière et de crasse recouvrait le plancher. Une lumière tamisée traversait à peine la étroite cellule. Les murs étaient humides et moisis. La vitre du hublot était fracturée, l'air glacial faisait un courant d'air et l'eau gelée de la mer passait pour le hublot. Pour le dîner, j'eus une fine tranche de pain et une pomme rongée par des vers. La nuit fut rude, le froid me glaçait les os, le mouvement du bateau balançait ma tête dans le mur, la relève des gardes me réveillait toutes les demies-heures. Les seuls faibles rayons me réchauffaient le visage. Le grincement sourd de la porte rouillée me réveilla. Barbe Noir lui-même s'était déplacé :

"Je ne t'ai toujours pas trouvé de sort à t'attribuer, en attendant tu vas nettoyer le pont, dit-il d'une voix grave

- D'accord..."

Je sortis, escortée par des barbares. Ils me donnèrent une serpillière d'une odeur infâme et un seau rempli d'une eau douteuse. Je remuai vigoureusement pour enlever les taches de graisses incrustées dans le sol. Le temps fut long mais cela me permettait de me réchauffer. Quand j'eu fini, je me dirigea vers le bureau du capitaine :

" Monsieur j'ai fini de laver le pont, que dois-je faire à présent ?

- Tu peux aller nettoyer le dortoir de mon équipage ! Mais bien nettoyer.

- Bien monsieur.

- Et appelez-moi capitaine ! Je ne suis qu'un capitaine et non un gentleman. "

Je me dirigea vers le dortoir. Les yeux rivés dans l'eau vaste de l'océan, je constatais l'immense pièce. Des hamacs rafistolés étaient suspendus dans tous les sens. Une odeur nauséabonde régnait dans la pièce. La tâche ne fut pas facile. Je me remémorais les plus beaux souvenirs de ma mère, de mon père et de mon ancienne vie... Elle me manquait terriblement. J'aurais voulu revenir en arrière, mais seulement si mon mariage pouvait être empêché... Je finis en fin d'après-midi. Alors que je ramassais mon seau, un pirate atroce m'attrapa le bras et me plaqua contre le mur. Mon pouls s'accéléra, ma gorge était sèche et mon souffle était court. Le stress et la peur m'envahissaient. Il m'embrassa sur la joue puis dans le cou. Je voulais hurler mais aucun son ne réussit à sortir de ma bouche. Des larmes coulaient sur ma joue. J'essaya de me dégager mais en vain. Un deuxième corsaire accourut. Il me tient mon autre bras. J'étais terrifiée. Je réussis à prononcer une phrase :

"A l'aide !"

Une dizaine de marins apparurent. Ils riaient de la torture que l'on m'affligeait. Quand tout à coup, des pas sourds résonnaient dans les escaliers. Barbe-Noire était furieux. Mais les deux ignorants continuèrent, Barbe-Noire envoya un coup de poing dans la mâchoire d'un des malfaiteurs. Sonné, il tomba raide par terre. Le second se mit seul à terre. Il ordonna à tout le monde de déguerpir et enferma les deux bandits dans les cellules voisines à la mienne. Il m'adressa la parole d'une voix douce :

" Hey... c'est bon, c'est fini...

- Ne me touchez pas s'il vous plaît. Ne... Me... Touchez... Pas..."

Il recula, me laissant reprendre mes esprits, mais en vain, je n'arrêtais pas de pleurer. Cela me rappelait Pierre, le jeune homme à qui j'étais destinée. Je me leva brusquement et me mit à courir. Je remontai l'escalier à toute vitesse et me réfugiai dans la réserve de nourriture. Je sanglotais, tout ça ne se serait pas passé si je n'avais pas fuis la demeure de ma mère, si je n'avais pas fui mon beau-père et son souhait de me marier, si je n'avais pas fui cette vie que j'aimais malgré tout... Je m'assoupis épuisée par ses événements. Ils devaient me chercher depuis bien longtemps. D'un coup, un corsaire surgit des escaliers, je sursautais. Mais au lieu de me dénoncer, il s'approcha et s'assit à côté de moi :

" Tu étais bien cachée dit donc, tout le monde te cherche.

- Je... Suis désolée

- T'excuse pas, ils n'avaient pas à te faire ça.

- Merci...

- Au fait, moi c'est Paul.

- Enchantée, je suis Mary Bonnie. "

Je souris, il me donna un tissu où je pus m'essuyer les yeux. Nous nous regardâmes et explosâmes de rire. J'étais rassurée et prête à remonter. Lui avoir parlé m'avait réchauffé le cœur. Il appela le capitaine du navire. Barbe-Noire accourut aussitôt, Paul partit, laissant la place à Barbe-Noire :

" Tu étais là depuis le début

- Oui

- Tu vas mieux ?

- Oui, ne vous en faîtes pas. Je vais retourner dans ma cellule pour me reposer.

- En fait, non, tu ne seras plus dans une cellule. C'est trop dangereux à présent. Ils sont capables de tout pour une femme. Maintenant, tu dormiras dans ma cabine. Tu seras sous ma protection.

- Vous n'allez pas m'exécuter ?

- Il n'en était pas question depuis le début. Je te cherchais un rôle sur le bateau. Tu devras nettoyer le bateau, la cabine, le pont... Tu devras aussi aider le cuisinier à préparer les repas

- Si vous avez décidé ceci, alors cela me convient."

Il me prit par la main. Elle était rêche mais d'une délicatesse incroyable. Il ouvrit l'étroite porte, il me fit asseoir sur une des chaises en bois qui entourait la grande table. Il sortit, me laissant seule, j'observais avec attention les moindres détails de cette pièce. Elle était de taille normale, lumineuse grâce aux grandes vitres dans le fond de la cabine, il y avait aussi une porte vitrée qui donnait sur un petit balcon à quelques mètres au-dessus de l'eau. Il y avait une grande armoire avec plein de livres, manuscrits et cartes. Un grand lit était au fond à gauche de la porte d'entrée. Il était si grand que l'on pouvait dormir à deux dedans. Il y avait une armoire vitrée remplie de couverts d'argent. Tous ces éléments avaient été sans doute volés lors de plusieurs attaques sur des bateaux de nobles. Soudainement, la porte s'ouvrit, Barbe-Noire revint avec le matelas de mon ancienne cellule. Il la posa au sol, près du grand lit. Il était toujours si sale. Il prit un drap propre dans une commode que je n'avais pas remarqué en contemplant la cabine. Il mit le drap, posa une couette moelleuse récemment lavée dessus puis il prit un coussin qui n'avait toujours pas servi.

" Cela te plaît ?

- Oui merci beaucoup"

Il reprit ses occupations. Je tira la couette, m'allongea et m'assoupis pendant longtemps. Une main douce me caressa le visage, j'ouvris les yeux et vit le visage scintillant de Paul :

" Barbe-Noire m'a dit de te réveiller, il faut que tu ailles aider Jorik le cuisiner, à préparer le repas.

- Oui j'arrive tout de suite"

Le journal des rescapésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant