Seven Tome 3 - Les liens du sang [publié avec KDP]

4- James

Je me précipite sur la jeune femme avant que son crane ne percute le trottoir. L'adrénaline et la fatigue ont dû la rattraper, d'un coup. Je la prends donc dans mes bras, pour la ramener au Seven. Je vais devoir l'enfermer en attendant de voir avec Damian à qui nous pourrions la confier. Les rues sont maintenant suffisamment désertes pour que je puisse utiliser mes capacités surnaturelles. Je resserre donc ma prise sur la jeune femme et accélère l'allure. À l'approche de la frontière, je sais que je ne vais pas pouvoir passer par les accès classiques. Ce serait bien trop suspect de me voir débarquer avec un vampire inconscient dans les bras. Je regrette de ne pas sortir plus souvent. Cela m'aurait permis de connaitre des passages non surveillés. Je vais donc devoir me contenter de faire des acrobaties avec mon fardeau dans les bras. Heureusement, j'ai la forme physique des meilleurs athlètes. Je repère un viaduc abandonné qui avant l'Entente devait servir de lien entre les deux rives.

Cinq minutes plus tard, nous sommes au Seven. L'hôtel semble vide. Charles doit être en train de mener son enquête pour Maya. Et depuis que Damian est parti en voyage de noces, les visites se font rares. Ce qui m'arrange bien. Je ne suis pas du genre à me faire facilement des amis. Je ne veux pas qu'on s'approche de moi. J'ai déjà causé la mort de suffisamment de personnes, dans cette vie et dans l'autre.

Des flashs du passé tentent de se frayer un chemin jusqu'à ma conscience. J'aperçois Moira courir dans les champs, derrière notre maison. J'entends encore son éclat de rire, malgré le nombre des années qui sont passées. Je serre les dents pour repousser ses souvenirs trop douloureux. Je ne peux pas penser à eux, maintenant. Dans mes bras, la jeune vampire resserre sa prise dans mon cou et ses longues mèches marrons chatouillent mon menton. Je gronde en me dirigeant finalement vers ma chambre. Je ne peux pas la mettre dans ce foutu cachot. On m'a appris à traiter les femmes convenablement. Et je ne peux pas l'oublier malgré tous les sévices que l'une d'elles m'a fait endurer. Je dépose donc ma protégée sur mon lit. Elle se pelotonne dans mes draps, mais ne se réveille pas. Je sais que son sommeil va encore durer quelque temps. Je décide donc de profiter de ce répit pour me nourrir. Je prends tout de même la précaution de fermer ma porte à clé. Cette jeune vampire n'agit pas normalement donc je ne peux pas être certain du temps qu'elle mettra à se remettre.

Dans le salon, je tombe sur un Charles, complètement dans un état second.

- Alors ? Ça donne quoi cette enquête ? je m'enquiers, en le dévisageant.

- Va te faire foutre !

- Charmant. je me moque. Qu'est-ce qui se passe ?

- Rien qui te concerne, vu que tu m'as laissé cette putain d'enquête. il gronde, en se levant.

Sa démarche est déjà chancelante alors qu'il passe à côté de moi, une bouteille à la main. Il empeste le whisky. Il doit être là depuis un moment, si j'en juge les deux bouteilles vides sur la table basse.

- Je vais me coucher. Me fais pas chier ! il m'annonce, en se retenant au mur.

Je ne sais pas bien ce qu'il a découvert pendant son enquête. Mais il semblerait que la présence de Maya, l'affecte bien plus que ce que je pensais. Je ne comprendrais jamais cet attrait qu'ils ont, lui et Damian, pour ces humaines. Ne se rendent-ils pas compte qu'ils les mettent en danger par leur simple présence. Je sais qu'ils contrôlent leur part d'ombre. Mais un accident est si vite arrivé. Et pour ma part, je ne peux me permettre de prendre ce risque. Je me contente de fréquenter mes congénères féminines, c'est bien moins risqué.

Dans la cuisine, je vide deux canettes d'Hemowatt. Mes pensées ne cessent de se retourner vers mon passé. Mais je ne peux pas me laisser assaillir, pour le moment. Je dois surveiller cette Claire. Ça me rappelle que j'ai toujours son sac en ma possession. Je retourne donc dans l'entrée, où je l'ai déposé en rentrant, tout à l'heure. Je vide son contenu sur la desserte. Je laisse de côté ses produits féminins et m'attarde sur le reste : des lingettes, un livre pour enfants, des bonbons et une compote. Cela ne peut signifier qu'une chose : un enfant fait partie de sa vie. À cette constatation, un gout amer se répand dans ma bouche. Je n'aime pas qu'un être innocent soit mêlé à cette histoire. À 26 ans, il est fort probable qu'il s'agisse de son enfant. Et je ne peux m'empêcher de revoir Moira avec Wallace dans ses bras. À l'époque les compotes en gourde et les lingettes jetables n'existaient pas. Mais j'imagine que si elle vivait à cette époque de malheur, le contenu de ce sac pourrait être le sien. Même si je sais que ce n'est pas le moment de m'attarder sur mes souffrances, je ne peux m'empêcher de fermer les yeux pour le revoir.