Le Dernier Réceptacle

Les Murmures du Crépuscule

Lowen était assit sur la falaise la plus haute, surplombant toute la forêt verdoyante. Le lac en contrebas reflétait les dernières lueurs de l'astre de feu qui se couchait à l'horizon. Le jeune homme leva doucement ses yeux améthystes vers le ciel, attendant d'apercevoir les premières étoiles. Un vent frais agitait ses cheveux courts et le fit frissonner, mais il semblait y être accoutumé. L'unique vêtement qui le couvrait était ouvert sur le dos et les épaules, c'était ce même habit fait d'un tissu rouge très soyeux que portaient les Eleriades, plus connus sous le nom de dragons, chez les humains. Lowen sentit une présence derrière lui, et il eut un léger sourire avant de se cambrer et pencher la tête en arrière pour rencontrer deux billes bleues. Le jeune homme tendit le bras vers la tête du dragon qui venait de s'installer derrière lui, et il ne tarda pas à sentir ses immenses ailes se refermer autour de lui, pour le protéger du vent. La pulpe de ses doigts explora la peau écailleuse et ferme de la tête du dragon dans un geste lascif, retraçant précautionneusement les contours de sa mâchoire.

-Bonsoir Aragknot.

Sa voix était caressante, et le dragon sembla apprécier entendre son nom prononcé de la sorte, le regard braqué sur la bouche tentatrice du plus jeune. Sa voix vibrante qui semblait provenir des tréfonds de l'âme et ses intonations sépulcrales avaient de quoi intimider n'importe qui, mais Lowen captait toujours de la bienveillance au delà de cette voix grondante. Et puis, il y était habitué.

-Bonsoir, Lowen.

Lowen reprit sa position initiale, le dos droit et les épaules détendues, mais il chercha à coller ses omoplates contre le torse de l'Eleriade, en quête de chaleur. Aragknot déposa sa main griffue sur la courte chevelure du jeune homme avec maintes précautions, pour ne pas le blesser. Ils restèrent de longues minutes reclus dans un silence apaisant, bercé par le souffle intarissable du vent. Lentement, les longues griffes d'Aragknot descendirent sur le cou délicat de Lowen, effleurèrent ses clavicules, et passèrent sur son épaule dénudée en laissant à leur passage de légers picotements sur la peau fragile. La large main de l'Eleriade réchauffa le corps frissonnant du jeune homme, qui se laissa faire avec plaisir. Il accueillit cette caresse bienvenue en fermant les yeux, totalement apprivoisé. Un petit soupir appréciateur franchit la barrière de ses lèvres lorsque sa main explora ses omoplates, Lowen se pencha volontiers en avant pour offrir son dos. L'humain avait un corps ferme, désirable, et l'Eleriade ne semblait pas se lasser d'observer les muscles de l'humain coulisser sous sa peau à chacun de ses mouvements. C'était un spectacle aussi plaisant pour le dragon que les caresses l'étaient pour Lowen. Sa peau était douce, à peine rosée, et marquée par la vie avec les dragons. A l'inverse, Aragknot avait une peau d'Eleriade, c'est-à-dire une peau écailleuse à l'éclat vermeil, irrégulière et dure. De près, sa peau semblait prendre des tons parmes. Aragknot faisait trois fois la taille de Lowen, c'était un dragon qui avait atteint l'âge adulte depuis longtemps. Ces Eleriades ci étaient reconnus comme étant très doux en dépit de leur force brute non négligeable. Lowen l'avait bien comprit, c'était d'ailleurs pour cette raison qu'il les préférait aux plus jeunes. Leur petit moment de paix se fit interrompre par le grondement affamé de l'estomac de Lowen. Le dragon stoppa ses caresses et replia ses ailes pour le libérer de l'étreinte chaude.

-Tu as faim. Je crois avoir vu Keyen revenir avec des neffles, et Skarha avec du miel.

Lowen se leva sans prendre la peine d'épousseter la terre qui était restée sur lui. Les dragons ne faisaient jamais ça, alors pourquoi le ferait-il ?

-Quand est-ce que j'aurais le droit à de la nourriture comme vous ?

L'Eleriade se dirigeait déjà vers le chemin pour descendre, et répondit avec nonchalance :

-Quand tu auras tes ailes.

-Mais j'ai 19 printemps ! Skarha a déjà eut ses premières écailles depuis longtemps ! Ce n'est pas juste !