3. Alice

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Dis, Alice, qu'est-ce que ça fait de mourir ?

Cela ne doit pas être agréable de sentir la lame d'un couteau transpercer ta peau et s'enfoncer centimètre par centimètre dans ton corps. L'arme est froide, mais tu la sens devenir de plus en plus chaude car ton corps la réchauffe.

Tes sourcils remontent légèrement tandis que tes yeux s'écarquillent. Ta bouche s'entrouvre légèrement, comme pour formuler une phrase. Mais aucun son ne franchit la barrière de tes lèvres. Tout ce que tu peux faire, c'est fixer cet homme saoul enragé qui te fait face.

Tu sens le sang qui commence à s'échapper de ton corps, se répandant sur ton corps nu mais aussi sur le sol. Tes forces commencent à t'abandonner, faisant trembler tes jambes déjà frêles. Tu t'accroches vainement au mur pour tenter de ne pas t'échouer sur le sol.

D'une certaine manière, ce n'est pas si différent de ta première fois.

Celle qui t'a été prise par un homme que tu ne connaissais pas.

Des larmes se mettent à couler le long de tes joues.

Allez, petite Alice, ferme les yeux.

Ferme-les et souviens-toi.

Souviens-toi de ta vie.


A l'époque où tu n'étais qu'une petite fille, tu vivais modestement. Ni dans la pauvreté, ni dans la richesse. Cela te convenait.

Déjà à cet âge-là, tu avais une certaine conscience de la réalité de la vie. Tu ne voyais pas l'intérêt d'être riche si vous mangiez à votre faim et que vous ne manquiez de rien. Tes parents étaient très impressionnés par cette sagesse dont tu faisais déjà preuve. Ils s'émerveillaient souvent en disant à quel point tu étais une enfant intelligente, qu'ils avaient de la chance de t'avoir.

Les professeurs de l'école primaire ne cessaient de louer ton intellect à chaque fois qu'ils parlaient avec tes parents, sur chaque bulletin que tu ramenais à la maison. Ils disaient que tu devais aller dans un bon collège, que si tu continuais sur cette voie-là, tu réussirais brillamment tes études, que tu aurais le métier que tu désires...

Comme si être précoce ne suffisait pas, tu étais un enfant magnifique.

Les autres parents, à l'école primaire, te comparait constamment à une jolie poupée de porcelaine : une peau si pâle qu'il fallait protéger de crème solaire au moindre rayon, de longs cheveux blonds doux et légèrement ondulés, des yeux bleus luisant d'intelligence.

Avec un tel physique, il n'est pas surprenant que tes parents t'aient orienté vers le mannequinat.

C'était quelque chose que tu aimais beaucoup faire. Certes, tu avais moins de temps que les autres enfants pour jouer et t'amuser mais cela te plaisait qu'on te mette pleins de beaux vêtements, dignes des princesses des contes de fées. Tu aimais toute l'attention qui t'étais porté, qu'on te prenne en photo et qu'on te dise à quel point tu étais adorable et mignonne.

En somme, tu étais belle et intelligente.

Tout semblait te réussir, sans que tu n'aies à faire beaucoup d'efforts.

Cela a donc été difficile lorsque la première note que tu obtins au collège fut un onze en histoire.

Il y avait une grande différence entre l'école primaire et le collège : si tu pouvais te permettre de simplement écouter les cours durant le primaire et t'en sortir avec des notes excellentes, ce n'était pas le cas au collège où il était nécessaire de travailler tes leçons à la maison pour pouvoir les retenir.

Memento MoriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant