Bienvenue à GAI

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Je suis dans le noir total.

En même temps, c'est toujours comme ça à GAI. Les seules couleurs que nous pouvons distinguer ici, resteront à jamais le noir et le rouge.

Je le sens.

Il s'approche de moi. Il me frôle. Je me retourne immédiatement.

J'abaisse mes lunettes rondes, qui sont  maintenues par des élastiques autour de mon crâne, pour les empêcher de tomber.

Je peux enfin distinguer le paysage autour de moi. Elles me permettent de voir dans l'obscurité de GAI, mais aussi, de me proteger de la lumière des villes CEA, que je découvrirais bientôt.

C'est Pas qui me les a fabriquées, et c'est lui qui m'a tout appris. Je ne partirais pas seule, nous irons ensemble à CEA, et ensemble vivre dans l'espace.

Il revient.  Cette fois il me bouscule pour me déstabiliser. Avant qu'il ne reparte, je prends la liberté de lui enlever son grand chapeau qui cache sans cesse son visage.

Je me retourne. Avec mes lunettes je ne perçois aucune couleur, même si je sais que le sable qui recouvre GAI est comme la cendre et de la poussière.

Je lève la tête, observant un instant le ciel. De grosses tâches rouges flottent sur celui-ci. Ce sont des nuages. Ils ressemblent tant aux moutons du livre d'images que Pas me montrait petit.

Il me racontait comment nous vivions avant 2947. Avant les guerres qui divisèrent la Terre en quatre.

Il se rapproche. Il profite de mon temps d'inattention pour essayer de reprendre son chapeau, et tente de me faire tomber au passage.

Mais je vois son coup venir et je sais pertinemment que je le battrais.

Avant de pouvoir attraper son bien, et que son pied ne percute mien,  je saute en ramenant mes genoux près de mon visage.

Je le sens partir au loin. Pour me moquer de mon adversaire, je visse sa coiffe sur mon crâne. Mon grand sourire dévoile toute mes dents.

Ce n'est plus un combat, mais un jeu, et j'ai eu tout le temps de me préparer. Je vais gagner !

Je regarde autour de moi. Grâce à mes lunettes, je vois la cendre voler, ce qui me permet de savoir par où il est passé.

Il arrive. Il tente de me surprendre en m'attaquant par derrière. Je suis beaucoup plus rapide et petit que lui. Je me faufile entre ses jambes, et alors qu'il finit sa frappe,je l'attrape par la nuque et lui mets un coup au centre de la colonne vertébral.

Je ne fais que la moitié de sa taille ce qui m'a permis de savoir précisément où irait mon pied.

Cela le déstabilise, mais ma frappe n'est pas assez puissante pour le faire tomber. Alors je le repousse, me rattrapant sur le sol avec mes mains ce qui me permet de me redresser facilement.

Je vérifie que le grand chapeau est stable, et je lui fonce dessus visant ces jambes.

C'est là qu'une main faisant le double de mon visage m'attrape par le col de mon débardeur, m'obligeant à continuer ma course dans le vide.

Je lève la tête et découvre un visage carré et cerné me fixant. Ses cheveux, sales, atteignent ses fortes épaules. Son regard, menaçant, et sa longue barbe, volumineuse tressée jusqu'à la poitrine, m'impressionne. Il ressemble à un Dieu dans les histoires que Pas me racontait. Un Homme, grand, fort, musclé...  lui manquant simplement la beauté.

Mais face à une toute petite chose, qui n'est nulle autre que moi, il est effrayant.

" Tu n'es pas concentré Mya, me dit-il de sa voix rauque."

Je me force à sourir, montrant toutes mes dents. Je sors de ma ceinture une petite dague et pose la pointe sur son torse.

"Gagné ! m'exclame-je"

Il m'observe, souffle bruyamment par le nez. Il me lâche et je me ratatine sur le sol. Il reprend son chapeau et le replace sur sa tête. Je me relève et frotte mes mains contre mes vêtements pour tenter d'enlever la cendre.

"Tes sérieux ? crie-je. Maintenant je suis tout sale !"

Je redresse ma tête et l'aperçois au loin, marchant .

"Mais tu m'ignores en plus ?"

Il continue sa marche, sans se retourner. Le vent soulève légèrement son manteau.

Je soupir et me mets à le suivre en tapant des pieds. Comme il m'ignore encore, je lui crie d'une voix boudeuse :

"Pas ! Tu pourrais au moins m'attendre !"

Il ne s'arrête pas, m'obligeant à courir pour le rattraper, avant qu'il ne m'abandonne sur les terres égales de GAI.



GAIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant