Intraitable

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Lorsque Violette arriva, le lendemain matin, elle fit immédiatement un café pour Gabrielle. Elle était impatiente de la voir terminer son article. Mais lorsqu'elle entra, le bureau était vide. La lumière n'était pas allumée, l'ordinateur non plus. Il n'y avait ni manteau au porte manteau ni sac à main au pied du fauteuil. La jeune femme retourna vérifier dans l'open-space puis près de la photocopieuse. Gabrielle n'était pas là. Violette paniqua : ça n'était jamais arrivé. Elle ne savait pas quoi faire, Gabrielle était peut-être bloquée dans les embouteillages ou pire, elle avait peut-être eu un accident. Elle toqua à la porte du bureau de madame Mastra mais personne ne lui répondit. Elle consulta son répertoire mais elle n'avait pas le numéro de Gabrielle. Elle ne savait pas à qui demander de l'aide, elle ne parlait jamais aux journalistes. A vrai dire, elle passait ses journées entre le bureau de Gabrielle et la photocopieuse. Elle allait appeler madame Mastra lorsqu'elle entendit les portes claquer. Le silence tomba sur la grande salle et on baissa les yeux. Violette regarda Gabrielle arriver d'une démarche très contrariée. Elle écouta le bruit de ses talons claquer sur le sol et se rapprocher d'elle. Elle entra dans le bureau après Gabrielle et elle ferma la porte. Elle ouvrait la bouche pour parler lorsqu'elle entendit ordonner :

- Sans commentaire.

Gabrielle jeta son manteau et son sac à main et elle s'installa à son bureau. Elle avala son café et elle claqua sa tasse sur le bureau. Violette lui refit un café et elle resta silencieuse. Elle rangea le manteau et le sac à main de la journaliste. Elle ne dit rien ce matin-là, elle observa seulement Gabrielle. Elle fut étonnée de ne pas la voir se lever pour aller déjeuner à midi. Elle l'interrogea du regard et Gabrielle lui jeta un billet sur la table.

- Prends-moi un Oriental au Food-truck en bas de l'immeuble.

Violette saisit alors le billet et elle revint quelques minutes plus tard avec deux sandwich chauds. Elle s'installa devant elle et elle murmura :

- Bon appétit.

- Bon appétit, soupira Gabrielle.

- Vous avez eu un accident ? murmura encore Violette.

- Si on veut... Une panne de réveil.

Violette sourit discrètement, Gabrielle était humaine, tout comme elle. Il lui arrivait de ne pas se lever et d'être en retard. La journaliste coupa le fil de ses pensées :

- C'est exceptionnel, Pâquerette. Ça n'arrivera plus, je l'espère.

- Je ne dirais rien à madame Mastra.

Gabrielle fronça les sourcils, tout le monde savait déjà qu'elle était en retard.

- Dis-moi Pâquerette. Pourquoi es-tu la seule à l'appeler « Madame Mastra » ? Elle nous a demandé à tous de l'appeler Madison.

Violette pâlit.

- Elle t'a demandé de la vouvoyer alors que c'est elle qui t'a fait entrer ici. D'où tu la connais, Madison ?

- Je sortais de l'université et elle d'un café... on s'est... je lui ai rentré dedans et on est devenues amies.

- Intéressant.

- Pourquoi est-ce intéressant ?

Gabrielle ne lui répondit pas, elle se contenta de sourire. Lorsqu'elles terminèrent leur repas, la journaliste ordonna à Violette de débarrasser. Lorsque ce fut fait, elle ordonna :

- Café.

Violette, surprise, sortit chercher un café. Gabrielle ne lui parla pas de l'après-midi. Elle ne la salua même pas lorsqu'elle rentra chez elle.

GabrielleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant