Tinder Love {Tous droits réservés à Peach Miller}

Chapitre 9 - Mila

Six mille dollars. Bon sang de merde. Six mille dollars ! Soit ce type est complètement allumé du ciboulot, soit je m'engage dans un mariage de mafieux. Je ne vois pas d'autre solution. Mais pourquoi ce type aurait besoin d'une invitée, dans ce cas ? Mince... J'espère que ce n'est pas un délire de jeune vierge sacrificielle ou quoi... J'aurais peut-être dû lui dire que le verrou a sauté depuis ma première année de fac.

Je secoue la tête en quittant le café, à peine saisie par la rumeur de la ville tant celle de mes pensées me remue de l'intérieur. Je n'arrive pas à croire que cet homme soit prêt à payer autant pour ma compagnie. Il est pourtant sacrément beau. Bien plus que sur ses photos de profil. Grand, des épaules larges à se damner, deux yeux d'un vert saisissant, doux et rêveur. Il a des traits fins, des sourcils épais qui soulignent son regard captivant, une bouche épaisse et l'air assuré. Bref, il coche toutes les cases du fantasme féminin : c'est le genre de gars qui met tout le monde d'accord. Alors où est le problème ? Qu'il utilise une application de rencontres, soit, mais qu'il soit prêt à payer autant pour être accompagné au mariage de sa sœur... Ça me paraît sacrément louche.

Alors que je monte dans ma vieille Chevrolet au rétroviseur passager scotché – suite à un flirt malencontreux avec un mur – je tourne cette histoire en boucle dans ma tête. Une offre comme celle-là, je ne peux me permettre de la refuser. Surtout si Haydan me propose un contrat et toutes les garanties qu'il m'a promises. D'un autre côté, je sens que Nolan me plaît beaucoup. J'ai l'impression de trahir le début de ce qui naît entre nous. Deux heures et demie plus tôt, j'étais assise au milieu de ses proches dans les gradins d'un stade communal, à le regarder disputer un match de basket comme s'il était parfaitement normal que je me mêle à son quotidien, et voilà que je m'apprête à partir en week-end avec un inconnu...

Je m'engage sur la route, un bulletin d'informations passe à la radio. J'essaie de me concentrer sur les paroles de l'animateur mais les paroles d'Haydan me reviennent sans cesse en tête. Le contrat, ses attentes, le montant faramineux que je toucherai à l'issue du week-end du mariage... Tout se bouscule dans mon esprit.

Alors que j'arrive à un feu rouge, je me contorsionne sur mon siège pour attraper mon téléphone dans mon sac à main. Tout en vérifiant que le feu ne passe pas au vert, je déroule le menu de mes contacts. La conductrice dans la file d'à côté me décoche un regard noir en me voyant glisser le mobile à mon oreille, et je me retiens de lui servir une grimace. Ce n'est pas ma faute si cette boîte de conserve ne fait pas Bluetooth !

Plusieurs tonalités retentissent, puis la voix de Leo me parvient.

— Que puis-je pour toi, mon chou ?

— J'ai un problème, lâché-je en appuyant sur l'accélérateur pour redémarrer.

— De quel genre ? Je suis beaucoup trop enceinte pour t'aider à cacher un corps dans la forêt.

Je l'entends rire de sa propre blague, et je réprime un sourire.

— C'est sérieux, Leo. Je suis dans la merde et c'est de ta faute.

— Tinder ? devine-t-elle.

Je marque un silence le temps de freiner de justesse devant un piéton qui traverse à la sauvage, marmonne un juron dans ma barbe, puis reprends :

— Dans le mille.

Un rire franc résonne à l'autre bout de la ligne. Je me mords la lèvre. Je ne peux décemment pas dire à Leo que je m'apprête à accepter de l'argent pour tenir compagnie à un inconnu. Honnêtement, je peine à déterminer quelle serait sa réaction. Je n'en vois que deux possibles : soit elle serait ravie de me voir prendre des décisions insensées et pimenter ma vie, soit elle serait mortifiée de me savoir à ce point dans le rouge niveau finances et insisterait pour me prêter de l'argent – quelle refuserait par des motifs aléatoires de récupérer jusqu'à sa mort. Les deux options ne me mettent absolument pas à l'aise.