13. PDV Mixte

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*** Duncan ***

Dans la guerre contre le temps, nous sommes notre propre ennemi.

Elle s'est barrée. Comme une voleuse. Volatilisée dans la nuit, comme un rapace nocturne prend son envol, dans le secret le plus total. Aucun doute. C'est bien la fille de son père.

Les mains figées sur le lavabo, j'observe mon reflet dans le miroir, le souffle court. La voix de Sylvia continue de vibrer dans ma tête. Autrefois salvatrice, la voilà qui m'enterre. Me condamne. Encore et encore.

« C'est ce qu'est devenu le puissant Duncan Reed ? Un pseudo-leader qui se cache à l'étranger pendant que ses hommes combattent à sa place ? Ce n'est pas de ce Duncan là que je suis tombée amoureuse... »

Chaque mot, chaque lettre, font écho en moi et me transforme en une bête sauvage et assoiffée de sang qui n'a qu'une seule envie : tuer.

Qu'est-ce que je suis devenu ?

Un putain de faiblard qui évite les problèmes au lieu de les affronter. Les éradiquer.

Sylvia a raison.

Ils ont tous raison.

« Tu te rends enfin à l'évidence, beau gosse. Tu n'as jamais été qu'un lâche qui se cache derrière El Padre pour justifier ses actes. »

Excédé par un trop plein de frustration, je continue d'ignorer le fantôme qui est revenu me hanter à l'instant même où sa fille a déserté et je jette la brosse que Sylvia a oubliée ici sur le miroir. Celui-ci se brise en mille morceaux. Comme la confiance de Sylvia en moi qui vient de voler en éclats. Mais après tout, je ne l'ai jamais vraiment méritée.

Elle s'est barrée. Fourbe manipulatrice. Son baiser salé n'était qu'un putain d'adieu. Un leurre dont elle a usé dans le but de me laisser me reposer sur mes lauriers. Une douceur sucrée qu'on file à un diabétique afin de l'apaiser, tout en sachant qu'elle lui sera fatale.

Jamais je n'avais ressenti une telle fureur. Mon sang bouillonne dans mes veines. Il s'est métamorphosé en coulées acides qui me calcinent de l'intérieur, qui dissolvent toute trace de raison, et qui me plongent dans un magma de démence et d'aliénation.

La sonnerie de mon téléphone portable retentit entre les cendres de ce qui nous a servi de dernier cocon de bonheur.

— Reed.

— Bien arrivé, jeffe.

Je raccroche sans un mot de plus et prends soin de ranger dans mon dos la seule arme que Sylvia a daigné me laisser. Mes pas écrasent les débris de verre et de bois qui traînent sur le sol.

Quand j'ai compris que Sylvia s'était cassée, je me suis acharné sur le mobilier qui peuplait cette cabane. On croirait qu'un cyclone est passé par ici. Tout ce qui avait le malheur de se trouver sur mon chemin s'est retrouvé déchiqueté en mille et un morceaux. Et pourtant, ça n'a pas suffi à calmer ma colère. Seule la mort d'Il Capo pourra la dompter.

La facture s'alourdit. Et le prix à payer sera terrible.

« Ce n'est pas de ce Duncan là que je suis tombée amoureuse... »

Putain !

« C'est drôle, tu n'as pas besoin de moi pour te torturer. Tu le fais très bien toi-même. »

Je claque la porte au nez des fantômes de mes passés, proche et lointain, et me dirige vers mon homme de main qui m'attend sur la plage.

— T'as ce qu'il faut ?

Rapaces : Le Retour du Hibou {Tome 2}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant