Et toi ?

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Paolo n'aimait pas trop écrire des lettres. Il ne savait pas comment les commencer. Un « bonjour » ? Un « salut » ? Ça faisait des années qu'ils ne s'étaient pas vus, qu'ils ne s'étaient pas parlé. Il avait tant de choses à lui dire, à lui demander. Il pensa à commencer par des excuses. Il le lui reprocherait sans doute.

Il posa son front sur la table, sur sa feuille. Il reposa son stylo et lâcha un soupir, laissant ses bras pendre dans le vide.

« Qu'est-ce que tu fais ? Demanda Mark, qui entrait dans la salle à manger.

— J'écris, enfin, j'essaye d'écrire une lettre.

— À qui ?

— Hide. »

Mark Krueger, son mari depuis presque deux ans, s'approcha, se collant dans son dos. Paolo se laissa enlacer, puis remonta ses bras sur les siens.

« Il a été sacré meilleur joueur Japonais de l'histoire, je me disais que je pouvais en profiter pour lui demander et donner des vraies nouvelles. Je ne le vois que par la télévision, et même si on a pris des chemins différents...

— Il compte encore pour toi ?

— Oui, énormément même. »

Paolo sourit. Mark le libéra, prenant une chaise pour s'asseoir près de lui.

« Tu bloques sur le début, j'imagine ?

— Oui... comment tu sais ?

— Paolo, mon amour, tes débuts de lettres d'amour sont les plus maladroites que je connaisse.

— Eh... c'est pas gentil. »

Mark rit doucement, amusé. Il embrassa son mari sur la joue pour s'excuser, et reprit :

« Essaye avec un "salut, c'est Paolo" ? Bonjour serait trop formel, et coucou...

— Oui, je vois ce que tu veux dire. Un Hey ferait trop et je refuse de m'abaisser au Wesh.

— Désolé, mon amour, Dylan et la politesse, tu sais bien que ça ne va pas très bien ensemble. »

Ils rirent tous deux, imaginant les oreilles de ce dernier siffler. Mark quitta sa chaise, laissant Paolo réfléchir à la suite.

Par quoi pouvait-il commencer ? Parler de lui-même ? Évoquer le passé ? Le féliciter ? Il soupira à nouveau. Il tenta de se souvenir d'une des nombreuses lettres que lui avait envoyé l'autre Mark, le Japonais.

Dans la plupart, il parlait de la nouvelle génération Raimon, de Jude et Axel, de Nathan ou de Caleb. Il parlait très peu de lui-même, en vérité, excepté lorsqu'il avait parlé de son mariage. Il avait été invité, bien entendu, mais n'avait pas pu venir.

Seulement voilà, cette lettre, c'était Paolo et Hide, personne d'autre. Il prit son stylo et décida de se lancer tel quel. Tant pis si c'était flou, brouillon ou désordonné. Il parlerait avec son cœur.

*

Salut, c'est Paolo.

Comment tu vas ? Moi, ça va. Ça fait des mois que j'essaye de t'écrire cette lettre. Elle tourne dans ma tête depuis si longtemps, je ne devrais avoir de problème pour l'écrire. Pourtant, je me suis retrouvé bloqué devant la feuille au moment où j'ai commencé. Mais me voilà lancé, et advienne que pourra.

Depuis que tu as été sacré, je me rends compte à nouveau de l'écart entre nous. Tu me diras sans doute que je suis doué à ma façon, ce que j'ai accepté grâce à toi. Il n'empêche que je t'ai toujours trouvé plus talentueux dans tous les domaines. Tout t'intéresse, te passionne. Tu plonges dedans à pied joints, et tu n'en décroches pas avant d'en avoir découvert toutes les facettes. J'ai toujours trouvé ça incroyable chez toi. Tu semblais plus fort en termes de connaissances, plus doué en football, meilleur dans ta façon de penser. Comme un idéal que je n'atteindrais jamais, que je devais soutenir tout du long. Ça me convenait. Te voir atteindre les sommets et te soutenir de mon mieux m'allait. Aujourd'hui, c'est un peu différent. Je me dis que je ne deviendrai jamais comme toi. Tu es très différent de moi, peut-être même de l'être humain lambda. Beaucoup vont, comme moi, t'admirer de loin. Peu vint essayer de te ressembler, par peur de ce que tu es réellement, ou parce qu'ils savent que c'est important. Tu imposes le respect, l'admiration pour ce que tu as traversé. Comment pourais-je t'égaler en terme d'être humain, d'expérience ? Tu as une longueur d'avance que je ne pourrai jamais rattraper ou compenser.

Mais c'est grâce à cela que j'ai pu beaucoup apprendre de toi, de nous. J'ai grandi avec toi, grâce à toi, et tu resteras toujours une personne unique à mes yeux.

Hide Nakata.

Celui qui m'a tiré vers le haut, qui a cru en moi tant de fois. T'aimer était sans doute la plus belle décision de ma vie. Aujourd'hui, je suis sûr et certain que les rumeurs sur Éléonore et toi sont fondés. De toute façon, je demanderai confirmation à Luca. Je ne sais pas si vous êtes mariés où en couple, mais j'adorerais venir vous voir, te voir. Mes sentiments n'ont jamais défailli, ils ne se sont que estompés peu à peu après. J'ai repris contact avec Mark Krueger, et j'ai fini par sortir avec. Ton plan au FFI aura finalement porté ses fruits, avec un peu de retard. On est mariés, maintenant. Quand je repense à ce que tu as mis en place pour nous, je suis à la fois honteux, heureux et un peu énervé aussi.

Comment tu sens ta carrière professionnelle ? Est-ce qu'elle te plaît ? Question idiote, tu aimes autant le football que Mark, si ce n'est plus. Je suis fier de toi, du chemin que tu as accompli. Tu n'es pas encore au plus haut de tes capacités. Tu rêves grand, loin, mais étrangement, ils sont réalisables, quand c'est toi. Je ne connais personne qui s'efforce autant que toi, même si tu es un "prodige". Je crois que j'aurais bien vite abandonné, à ta place.

Voilà, je voulais te féliciter, pour tes efforts, pour ta réussite, pour tout. Ce que tu as fait pour moi, pour tes exploits qui me rendent fier. Je suis fier de t'avoir connu, aimé, et te regarder de loin atteindre les sommets me rend affreusement, incroyablement fier. C'est irréel, j'ai l'impression d'être un grand frère fier de son cadet. Continue d'impressionner le monde. Je suis et je serai toujours fier de toi.

Ton ami, Paolo Bianchi.

« Quand est-ce que tu es redevenu un Bianchi ?

— UWAHHH ?!! »

Il sauta de surprise sur sa chaise. Mark se mit à rire, amusé de la chute spectaculaire de son mari. Il l'aida à se relever, et lui tendit une enveloppe et un timbre.

« Idiota...

— Je sais~ tu vas la poster et on mange ? »

Paolo hocha la tête. Il inscrit les coordonnées sur l'enveloppe, colla le timbre, et posa cette dernière sur la commode un peu plus loin dans la pièce.

« Tu n'y vas pas ?

— Pas tout de suite. J'ai envie de le faire attendre encore un peu. »

Il rit doucement, suivi de Mark, lorsqu'il comprit la blague.


J'ai enfin réussi.

Et toi ?

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 29, 2021 ⏰

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Bro, t'es complètement pauméOù les histoires vivent. Découvrez maintenant