Il n'y aura plus que moi - Eruri

1.

Les clients défilent dans le bar à mesure que l'heure défile, tard dans la nuit. Loin d'être habitué à jouer les barmans, Levi Ackerman peine à tenir debout après trois heure du matin. Sa meilleure amie Isabel, qui travaille ici à mi-temps pour ses études, l'avait recommandé auprès du patron afin de remplacer la précédente employée partie en congé maternité. Isabel sait à quel point Levi à besoin d'argent ces temps-ci. Le jeune homme est occupé depuis plusieurs mois à lancer sa propre entreprise : une librairie qui fait aussi salon de thé. C'est un gros projet qui prend du temps et de l'argent, alors il sacrifie ses heures de sommeil pour servir des téquila à des groupes d'amis venus se bourrer la gueule pour fêter la fin de semaine un vendredi soir et des bières à des pères de famille en instance de divorce qui viennent oublier leurs problèmes. Levi à même, parmi ces gens, déjà commencé à repérer quelques habitués. Et en plus de devoir supporter tous ces gens qui crient, qui dansent non pas en chantant mais en hurlant les paroles des musiques qui passent, il doit aussi réfréner son envie de donner son numéro à tous les beaux mecs qui passent par là. Isabel l'a prévenu : il n'est pas là pour draguer. Bien connu pour ses aventures d'un soir, le brun est interdit de chasser ses proies ici.

— Levi, deux vodkas pour la table quatre ! lui demande Isabel, tant bien que mal malgré le brouhaha qui règne dans le bar.

Le jeune homme s'exécute. Il attrape une bouteille derrière lui et verse le liquide transparent dans deux petits verre à shot. Il dépose le tout sur un plateau qu'il pousse au bout du bar afin qu'Isabel puisse le récupérer plus facilement. Mais plusieurs minutes plus tard, la petite rousse n'est toujours pas venu chercher les verres. Levi jette un coup d'œil à travers tout le bar à sa recherche, mais il ne l'a voit tout simplement pas. Avant d'enquêter sur la disparition soudaine de son amie, ces verres doivent être servis — et payés par les clients soit dit en passant. Il prend alors les choses en mains et s'empare du plateau, direction la table numéro quatre. Surprise en arrivant à destination : la table quatre est occupée par Hange, son amie de la fac, et Erwin.

Fondamentalement, Levi déteste Erwin Smith. Tout simplement parce qu'il ne reste plus beaucoup d'hommes gays en ville avec qui Levi pourrait coucher sans qu'Erwin ne soit passé par là avant. Si Levi était déjà un Don Juan dès la première année de fac, Erwin, arrivé en seconde année, est l'élève qui dépasse le maître. Sans compter qu'étant bisexuel, Erwin à le pouvoir sur tous les terrains. Mais ce qui énerve Levi par dessus tout, c'est que physiquement, le grand blond aux yeux bleus est vraiment désirable pour n'importe qui croiserait sa route. Même lui regrette un peu au fond qu'il soit le seul qu'il ne puisse pas ajouter à son tableau de chasse. Mais n'est-ce pas mieux au final ? Erwin Smith à la singulière réputation de faire tomber amoureux tous ceux avec qui il s'envoie en l'air. Et la dernière chose que veut Levi, c'est tomber amoureux, surtout pas de lui.

— Voici vos verres, pardon pour le temps d'attente, dit-il tout en déposant les shots sur la table.

— Merci Lili chéri ! répond Hange, visiblement déjà bien dans un état second par l'alcool.

— Oui, merci « Lili chéri », ajoute Erwin, un air de défi adressé au barman. Il prend son verre et l'avale d'une traite, puis le dépose vide sur le plateau que tient Levi dans sa main droite.

Déjà que Levi déteste ce surnom, mais en plus en l'utilisant devant son ennemi juré, Hange lui a donné une arme à utiliser contre lui. C'est une véritable humiliation pour lui qui tient à rester digne devant cet adversaire de conquêtes.

Sans plus dire un mot, Levi tourne les talons et retourne rapidement derrière le bar. Il en a oublié de leur demander de régler. Là, il n'a plus le temps de penser à ce qui vient de se produire, les clients s'affairent devant lui. Il sert verres sur verres, pintes sur pintes et bientôt la fin de son service arrive.

Levi se réveille assez tard ce matin, heureusement on est samedi et il n'a pas cours. Cependant, il a des partiels à réviser... Ou alors il peut aller boire un verre avec Hange comme elle le lui a suggéré dans un SMS déposé plus tôt dans sa messagerie. Enfin, cela sonnait plutôt comme un ordre au vue de ce qu'elle a envoyé, « viens à la maison en début d'aprem ok ? je te paye à boire ». Levi décide donc d'y aller, de toute façon il n'a que ça à faire à part se plonger dans ses fiches de révision. Arrivé chez la brune à lunettes, celle-ci l'accueille en posant directement la fameuse question :

— Alors, qui tu as pécho cette nuit ?

Levi fait comme chez lui, il l'a pousse un petit peu pour pouvoir dépasser le palier de la porte et entre dans l'appartement. Il est, comme souvent, très mal rangé.

— Tu m'as vu hier, je travaillais. J'ai pas eu le temps de trouver quelqu'un.

— Oui, surtout que ce bar est pas très fréquenté par les gays.

— Et surtout j'ai interdiction de la part d'Isabel de draguer là-bas...

Elle lui propose un verre de vin, mais comme il est 13 heures, il préfère une tasse de thé.

— Dis, je me demandais, comment ça avance ton projet de librairie/salon de thé ? demande Hange alors qu'ils s'assoient tous les deux sur le canapé, Levi avec un mug fumant dans les mains, Hange est quant à elle à la bière.

— Ça n'avance pas très vite, je t'avoue. Déjà que j'ai pas assez de thunes pour payer mon loyer, heureusement que ma paye du bar ne devrait pas tarder à arriver. Et puis avec les cours et le boulot, j'ai pas trop de temps.

— En même temps, si tu ne couchais pas avec un mec différent tous les soirs... Comment tu tiens physiquement même ? Je paris que tu ne serais pas capable de tenir plus d'une semaine pour la consacrer à tes études et ton projet.

— Tch, n'importe quoi. Je peux tenir plusieurs mois si je veux.

— Hé, on fait un deal ? Tu arrêtes d'être le plus grand séducteur de la ville, et en échange je t'aide avec ton projet ? propose Hange après avoir pris une gorgée de son liquide brun.

— Pour laisser la place à Erwin Smith ? Non merci. Et puis, qu'est-ce que tu y gagnes ?

— C'est marrant !

Levi réfléchi un petit peu. Il aurait effectivement bien besoin d'elle en ce moment, et sa vie sexuelle est déjà au point mort depuis une semaine. Comme il semble s'en sortir plutôt bien de ce côté là, ça ne devrait pas être si compliqué que ça de tenir plus longtemps. Ça lui laissera plus de temps pour étudier, pour construire son projet professionnel, et en plus il va pouvoir se reposer un peu si il obtient un coup de main de Hange. Il pourrait même l'exploiter plus que de raison si ça fait partie du pari. Oui, cela lui semble être un bon arrangement. Le seul point négatif, c'est qu'il va perde la course aux hommes qui l'oppose à Erwin Smith. Mais au final, si il arrête de jouer, Erwin n'aura plus aucun mérite à séduire plus, si il n'a plus de  concurrence face à lui.

Alors, Levi accepte le pari d'Hange, celle-ci semble ravie.

— Rah la la, je sens qu'on va bien s'amuser ! s'exclame-t-elle.

La conversation dévie sur un tout autre sujet : la dissertation qu'ils ont à rendre pour lundi. Si on leur avait dit qu'il y avait des devoirs à faire à la fac...
Ils lisent à tour de rôle leur production écrite afin de s'aider mutuellement.

— Tu n'as pas assez développé le pathos à mon avis, critique Levi.

— Mais si regarde, j'y ai consacré tout un paragraphe !

— Il fait trois lignes ton paragraphe, faut que tu étire. Y a pleins de choses à dire. Au début dans son discours, il appuie sur la corde sensible en parlant de sa famille. Il inclu sa femme dans le rôle des parents en disant « nos filles » et pas « ma fille ». Du coup non seulement il affirme être un bon père, mais aussi un bon mari. Ça tu l'a pas dis par exemple.

— Pourquoi on étudie un discours d'Obama déjà ?

— Parce qu'on fait une licence LLCER Hange.

— J'aurais dû abandonner la première fois que je suis entrée dans un amphi