Ah, te voilà enfin ! J'ai attendu ce moment toute la journée. Pouvoir être près de toi, au chaud, bien à l'aise... Mon cher lit, aujourd'hui j'ai besoin de toi. Je suis fatiguée, je bâille aux corneille depuis des heures, j'ai arrêté le coca, et je n'ai même pas utilisé d'écran pour optimiser notre rencontre tant attendue. Il ne manquerait que du sport pour que je sois plus épuisée que ça, mais on va peut-être pas exagérer, hein !
Tiens, ça bouge en bas du lit, c'est mon bébé chat ! Ah, que j'aime cet animal qui illumine ma vie... Que ferais-je sans lui ? Mais d'ailleurs, c'est vrai ça, comment je faisais avant de l'avoir ? Je me demande bien, je n'arrive pas à m'en souvenir... Ah, voilà ! J'avais sans doute des vêtements sans trous et sans poils... Mais oui tiens, quelle idée j'ai eu d'adopter un chat bon sang, il me coûte plus cher en entretien que ma voiture avec ses griffes là !
On dit toujours qu'avoir un enfant, c'est renoncer à avoir des jolies choses, des vêtements non tachés et une maison bien rangée... Ouais, enfin ton bébé il monte pas sur les meubles pour regarder si un verre ça rebondit ! Franchement, les femmes qui disent qu'elles finiront célibataire à 40 ans avec 4 chats c'est pas des désespérées mais des aventurières !
Et hop le gros tas se laisse tomber contre moi, comme d'habitude. Bonne nuit mon amour ! La main sur son flan, je sens ses ronrons dans mes doigts. Il est devenu mon rituel et quand il n'est pas là, je dors mal. Il dort rarement avec nous mais j'ai toujours droit à quelques caresses et quelques ronrons de bonne nuit. Ah, j'ai tellement de chance de l'avoir. Quand on a mon chat on n'est jamais seul au fond et... Mais, je fais quoi là encore ?! Ah ben tiens, voilà que je recommence à parler en pensée au moment de dormir. J'en ai marre de moi hein c'est pas possible.
Il faut que je m'évade. Je ne suis pas dans ce lit... Allez, ma grande, pense à autre chose... Respire cet air frais, écoute le silence et sens comme la nuit est lourde, elle t'emporte... Doucement, garde ton souffle régulier, ne pense pas de travers... Le ciel, le lit, les étoiles. Le silence, le noir, le calme et le silence... J'ai froid. Pourtant, je suis toujours sous la couverture, alors pourquoi ? Ma main ne bouge plus, mais je ne sens plus les ronronnements de mon chat... Où est-il passé ? Où suis-je ? Je ne vois plus rien, n'entends plus rien... Non ! Bouge ! Je ne respire plus, j'ai mal aux poumons, je dois ouvrir la bouche, mais je n'y parviens plus... Je suis couchée et paralysée. J'ai les yeux ouverts, et pourtant je ne vois rien, il ne fait pourtant jamais totalement noir dans ma chambre...
Je suis seule au fond d'un puits noir, ma poitrine me fait très mal, j'entends mon âme hurler, mais aucun son n'est capable de sortir de ma bouche. Une énorme pression sur mon torse me maintiens en place. Cette sensation, qu'est-ce que c'est ? J'ai peur, aidez-moi, sortez-moi de là ! Je suis coincée dans mon propre corps et je ne vois pas de lumière. Mon cœur s'accélère, l'air entre enfin dans mes poumons, au secours ! Je crie de toutes mes forces, alors pourquoi je ne m'entends pas ? J'ai toujours ce poids sur moi. Je pousse de toutes mes forces mais j'ai l'impression de ne plus en avoir du tout.
Enfin libre ! Allez, tourne toi, ainsi, plus personne ne pourra te bloquer. Ouvre les yeux, tu verras qu'il est là, près de toi. Mais... Pourquoi il ne m'a pas aidé alors ! J'avais besoin de lui et n'est même pas venu à mon aide, alors que je hurlais... Pourquoi... Pourquoi ?!
C'est ainsi qu'est mon existence ? Ce vide de sens, de joie, d'utilité. Je n'ai pas souhaité que tout ça arrive, et pourtant c'est arrivé. Qu'était-ce au fond ? Un avertissement ? Une vengeance de l'univers ? Je me demande encore aujourd'hui si ma croyance du karma à un sens... Je m'en persuade depuis des années pour suivre la voie qui me semble juste. Mais au fond, rien ne me dit que je ne fais pas fausse route depuis tout ce temps... Je ne suis même plus sûre d'être réellement moi-même. Ces cris de détresse que j'entends, le soir dans mon lit. Ces endroits où je me perds, quand je dors... Qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui n'est pas réel ? Est-ce que je vis vraiment ? La mort, c'est quoi au final ? Je sais que j'y vais, de jour en jour, sans retour possible, mais si, en réalité, je n'étais déjà plus en vie ?
Qui sait de quoi l'esprit est capable au final. Qui sait de quoi le corps est capable. Peut-être que tout n'est qu'une invention de mon imagination ? Non, je refuse d'y croire. Il est là, je sens sa chaleur, sa respiration près de moi... Je sens mon cœur battre, mon cœur se serrer si fort que je ne parviens pas à arrêter mes larmes.
J'ai mal. J'ai peur. Pourquoi je tombe, toujours plus bas. Je ne suis plus retenue par rien, ni par l'air, ni par lui, ni par la gravité. Je chute au plus profond des sentiments humains et au plus obscur coin de l'univers étendu. Le silence et le froid m'envahissent, je n'entends plus rien, je ne sens plus ma propre existence, je ne visualise plus mon moi, je ne ressens plus qu'un vide intense et douloureux. Un rien qui m'envahit et me consume comme si je n'étais qu'une simple allumette. Je sens maintenant cette brûlure, qui envahit mon corps par chacune de ses extrémités.
Tiens, ça y est, je ne pleurs plus. Je n'ai plus mal d'ailleurs non plus quand j'y pense. Où suis-je ? Où est-il ? Ouvre les yeux, concentre toi... Tu es chez toi, dans ton lit, près de lui... Bouge tes doigts, je le sens ! Il est encore près de moi, je sens les ronronnements... Ces taches informes autour de moi prennent enfin de la netteté. Dans la pénombre je revois la fenêtre, l'armoire, le lit... Et même l'heure, affichée en blanc sur la petite boule Amazon, sur sa table de nuit. Il est 5 heures du matin. Déjà.
Je suis bien ici, tout va bien. Mais où j'étais ? C'était quoi ça ? Je dormais ? Je ne sais plus... Je n'ai pas souvenir d'avoir dormi correctement depuis des mois... J'ai même oublié ce qu'était un rêve. Et même là, au beau milieu de la nuit, je me parle à moi-même. Je crois que je viens de rêver ? Non, ce n'est pas ça, je sens que c'est autre chose, j'ai encore mal au cœur de ce qui s'est passé, et cette douleur est réelle... Je sais pourtant que j'étais absente. Je n'étais plus là, l'espace d'un instant, je me suis perdue.Je me perds souvent. Et je me perds loin. Je ne crois pas au surnaturel, je sais que c'est idiot. Et pourtant, en cet instant, je respire, j'ai mal au cœur et je sais que je vis. Je vis parce que j'ai mal, parce que l'humidité de mes larmes recouvre encore mes joues. Mais j'ai quand même la sensation de ne pas être là. Comme si j'étais en retard pour ce moment, décalée de quelques secondes à travers le temps. Voilà, ça y est. Je deviens folle. Même mes pensées n'ont aucun sens. Même si de base, c'est un peu fait pour ça, les pensées. C'est irrationnel, et incontrôlé, donc je ne suis pas responsable, et donc, pas folle !
Voilà c'est ça. Je suis simplement une fille un peu trop fatiguée. Allez ma grande, souffle un coup et embrasse cet homme merveilleux qui te supporte encore malgré les années qui passent. Allez, un petit câlin avant de bouger. Ah zut, il gémit, je crois que j'ai serré un peu trop fort. J'ai peur de le réveiller si je l'embrasse dans le cou... Oh, pis zut ! Il se rendormira au pire. Je t'aime, tu le sais.
Allez, hop, on se glisse discrètement en dehors du lit. Brrrr ! Il fait froid dehors. Enfin, pas dehors mais hors de la couette quoi. Tiens, Seth me regarde. Non tais toi chut chut tu vas réveiller papa. Allez, fais lui ses grattouilles histoire qu'il retourne se coucher, il croit juste que c'est l'heure de manger.
Un petit regard à cet homme endormi... Allez, direction le salon, j'abandonne pour cette nuit, mais j'aurai ma revanche. Insomnie, tu ne gagneras pas.
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Les chroniques des Insomnuits
RandomJ'ai encore échoué à cette tentative. Mais ce n'est pas grave, je réussirai la prochaine !