Chapitre II : un oiseau

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Si l'homme est sujet c'est qu'il est capable de penser par soi-même, de s'interroger, de revenir sur soi et se poser ces questions du pourquoi le monde et pourquoi nous ? C'est ce qui différenciera l'homme de l'objet. Seulement parfois, il arrive que les questions deviennent trop profondes, que les questions deviennent trop difficiles, ces questions peuvent détruire en menant à une réponse bien trop dur à avouer : je ne suis rien.

On rêve d'être un oiseau. Beaucoup vous diront que c'est parce qu'ils rêveraient de voler, d'autres parce qu'ils aimeraient parcourir le monde et voyager. Ce n'est pas son cas. Deux raisons. Un oiseau ne se pose pas de questions, il vole, chasse, se nourrit et s'éloigne en saisons froides pour d'autres horizons. Un oiseau n'a pas mal. Mais surtout, un oiseau meurt vite. Un coup de fusil, un oiseau plus gros. Un oiseau vit comme jamais car il n'a pas des années devant lui.
Et l'on crève à petit feu, on se le rappelle, on en souffre. Mais la souffrance au final c'est quoi ? Une douleur ? Physique ou morale ? Ne contrôle-t-on pas notre esprit ? Louis a tout perdu. Il est perdu, depuis des nuits entières qui dévorent des paysages. La douleur c'est pourtant quelque chose de propulsif, un choc violent. Louis a grandi, obligé d'évoluer pour ne pas se faire manger par les oiseaux nocturnes, finalement, dans le rouge des flammes, il est devenu un oiseau.

Cela fait donc des jours que l'ombre de la nuit est devenu son refuge, flâne tel un fantôme démunit dans les ruelles les plus sombres. Et qu'allait-il faire aujourd'hui ? Se cacher durant, ce qui paraît pour ce gamin démunit, une éternité. Gamin. Ce mot n'est même plus à employer. Tout peut tellement changer quand on passe ses journées à boire la tasse sans jamais se noyer, à se faire cogner par les flots sans jamais pouvoir lâcher. Là, assit sur de nouvelles marches, dans une nouvelle rue qui ressemble pourtant à celle de la veille et celle encore d'avant. Seul, sur les marches, buvant l'obscurité pour mieux s'en assouvir. Il devait partir. Loin. Très loin. Il ne pouvait pas, le noir n'avait jamais été quelque chose qu'il aimait, il avait toujours eu peur du noir et avait sans cesse réclamé, enfant, une lumière qui le rassurait. Mais désormais, plus aucune lumières n'ont cet effet sur lui car il porte un poids compressant sa cage thoracique chaque jour avec lui.

Marchant, se laissant emporter de côté par le vent parfois, manquant de tomber sous les rires de certains sous les regards dégoûtés d'autres. Louis ne ressemble plus qu'à une âme échouée, une âme oubliée, une âme que personne ne regrettera. Il meurt. Alors il prend la fuite, il fuit les regards, fuit les lieux où il pourrait s'arrêter.

La réflexion fut longue quand Louis se souvenu d'un compte. Un compte bancaire. Le code ? 224689BH. Il l'a appris par cœur après que sa mère lui ait murmuré à l'oreille en lui promettant qu'il vivra heureux grâce à ces chiffres. Louis était enfant, innocent et naïf, il avait répété ces chiffres toute la nuit jusqu'à ne jamais les oublier. Maintenant il comprend. Il n'y aura sûrement pas de quoi le rendre heureux dans ce coffre. Jamais. Parce qu'être heureux ce n'est pas être condamné à la fuite. Il regrette les projets de sa mère : une famille, un travail, une vie normale et banale qu'il rejetait étant gosse voulant déjà aller sur la lune et voler une étoile pour voir si cela brûlerait réellement le creux de sa main. Mais ces rêves étaient finis et même la vie la plus banale qu'il aurait pu avoir partait désormais avec la bouée de secours.

Les marches étaient nombreuses, le bâtiment immense. La concurrence oblige. Une banque veut être grande, imposante, frappante. Alors celle-ci avait tout joué pour que les clients se sentent en sécurité : une centaine de marches, des piliers retenant le bâtiment en pierres. Louis retient un rire nerveux. C'est ridicule. La bâtisse ne fait pas tout. Son père était bâtit et il est  tombé. Un frisson traversa sa colonne vertébrale à cette pensée et il secoua la tête pour l'ignorer, la refouler. Il monte les marches, préférant souffrir physiquement que mentalement, c'est moins dur à supporter. Il pousse les énormes portes se sentant soudain vraiment petit, ce bâtiment a plutôt le don d'effrayer. Il marche vers les bureaux d'accueil derrière lesquels se dressent ces gens en costume souriant tellement grandement qu'on a l'impression qu'il veulent que l'on comprenne que ce n'est qu'une façade. Un soupir s'évapora d'entre ses deux lèvres entrouvertes. Un pas. Une seconde. Un cri. Un battement de cœur loupé.

- ON NE BOUGE PLUS ET ON VEUT LE CODE DU COFFRE SINON ON TIRE !

Louis se glace, littéralement : son corps se fige et il fut incapable de bouger.

- TOUT LE MONDE CONTRE LES MURS LES MAINS LEVEES !

Louis s'exécute le plus doucement possible ne voulant pas être la première cible de ces enfoirés. Il se glisse le long du mur. Il lève ses bras et souffle « Le criminel qui se fait menacer »
De nombreux regards se tournent vers lui après ce râlement et il leur fit le sourire le plus hypocrite possible avant de se concentrer sur un point en espérant simplement que ses bras ne vont pas lâcher. Puis soudain, un des fonctionnaires tente de désarmer l'homme près de lui (...). Louis passa son pouce sur sa joue, laquelle est désormais souillée par le sang. Un de moins. Il regarde le corps qui ne bouge plus devant lui et grimace. Comment peut-on tuer un homme de sang-froid comme.... Comme lui l'a fait... Il baisse les yeux, essayant de ne pas imaginer le corps de son père à la place de ce cadavre froid et sans vie.

Soudain, un bruit attira son attention. Il tourne son visage vers sa droite et fronce ses sourcils. Un garçon bouclé dont le regard émeraude semble terrifié respire de plus en plus difficilement. Il commence à se faire entendre, il ferme les yeux, ça se voit qu'il se retient mais ça ne fait qu'empirer sa crise. Louis lui donne alors un coup dans les côtes avant de murmurer « Ferme là, je ne veux pas crever à cause de toi » *Mais ça ne semble pas l'aider et le jeune homme panique encore plus

- Ok désolé, calme toi... sérieusement arrête de paniquer comme...

Un des hommes armés se tournent vers eux et Louis le fixe.

- La ferme.

Louis hoche simplement la tête mais il ne peut qu'entendre le souffle saccadé de ce garçon au regard si perturbant. Puis il imagine. Si c'était lui. S'il avait été encore innocent et qu'il se retrouvait là ? Il mord sa lèvre. Soudain il se sent mal pour le bouclé.
Doucement, il glisse sa main le long du mur pour attraper celle du jeune homme qui la serre immédiatement. Louis fut surpris. En fait, en faisant ce geste, il était persuadé qu'il allait recevoir un regard de mépris, que le jeune inconnu allait retirer sa main. Mais non, il est là à lui broyer les os de la main. Mais peu importe. Il caresse comme il peut sa peau si douce et entend sa respiration se calmer.

- CA PREND TROP DE TEMPS !

La police est déjà devant les portes de la banque mais bien sûre impossible d'agir dans l'immédiat avec un tel bâtiment. Le seul au courant du code, le directeur, est en vacance. {Bien sûre ! Il se bronze les fesses pendant qu'on va tous mourir !}

- MAINTENANT FAUT QUE CA BOUGE, TANT QUE J'AI PAS LE CODE JE TIRE SUR QUELQU'UN TOUTES LES DEUX MINUTES !

Et sa respiration s'affole de nouveau.



« Sa main est chaude et je me disais que si j'allais mourir, je ne pourrais plus jamais toucher une main aussi douce. Je panique. » - Harry

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