« Une porte de sortie »

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Ce n'est pas une maladie, ce n'est pas contagieux, mais ça abîme, ça fait mal, c'est extrêmement douloureux (oui oui 3 mots qui expriment la même chose). Parfois j'arrête tout ce que je suis entrain de faire et je me dis « pourquoi moi », et je me rappelle que je ne suis pas seule, nous sommes plusieurs à qui ce truc bouffe la vie. Si tu n'aimes déjà pas le reflet de toi-même en temps normal, ça ne peut qu'empirer. Tu ne décides pas de devenir trichotillomane, et tu ne décides pas de ne plus l'être.

Certaines personnes ont mal vécu le confinement, pour moi, c'était une libération. J'ai pu arrêter de mettre des bandanas, de vouloir cacher ma chevelure à mon entourage, arrêter de me sentir laide, arrêter de me sentir jugée. C'est d'ailleurs durant cette période que j'ai retrouvé l'entièreté de mes cheveux, j'ai pu me rendre chez le coiffeur en juin 2020 pour une nouvelle coupe, et ça m'a fait du bien. Ne croyez pas que je m'en suis sortie. Nous sommes en 2022, et les seules différences avec 2020, sont que j'ai une vision de moi-même différente, que mes proches sont pour la quasi entièreté tous au courant, que j'ai acquis une perruque, que je n'aime plus.

Je sais bien que nous avons tous des problèmes personnels différents, j'en suis bien consciente, mais quand il faut trouver des solutions pour pouvoir cacher son mal être, c'est là que ça devient très embêtant. Pourquoi a-t-on peur du regard des autres ? Tout le monde juge, c'est la nature humaine qui veut ça. On devrait vivre comme bon nous semble et ne pas s'auto détruire de la sorte. On ne le perçoit peut-être pas tous de la même manière, mais même en ayant accepté la trichotillomanie, je n'arrive pas à l'assumer pleinement, pourtant je devrais y arriver, le plus dur, c'est de s'accepter soi même non ? Les gens ne sont que passagers pour la plupart, et s'ils n'arrivent pas à accepter ça, c'est qu'ils n'ont pas besoin de rester dans notre vie pas vrai ?

C'est sur que le mieux serait d'en sortir. Mais à l'heure actuelle je ne me vois pas sans cette particularité, elle fait partie de moi, et sans celle-ci je ne suis pas moi. Je ne dis pas non plus que je ne serais pas mieux sans, je dis juste que j'arrive à faire avec.

Je suis aussi au courant du fait qu'elle n'est pas apparue sans raison. Mais on a beau chercher on ne trouve pas la source, ce n'est pas faute d'avoir essayé.

J'ai la tête rasée depuis début 2020, et quand ils repoussent, il n'y a aucun doute à avoir, ça reprend comme si ça ne s'était jamais arrêté, je me rase donc régulièrement la tête, non enfaite c'est ma sœur qui le fait, je l'avais fait moi-même la toute première fois. C'était dur, mais une fois fait j'étais contente de savoir que je ne pourrais plus atteindre mes cheveux. Je pleurais en rigolant. Je me suis sentie libérée une fraction de seconde. Ca a été très dur pour mes parents de me voir la tête rasée. Mais avec le temps on s'y fait. Et je dois dire qu'avec les cheveux courts, ça me fait une tête toute ronde, que j'apprécie fortement. J'ai pas eu peur de le faire, je n'ai jamais été critiqué d'avoir les cheveux très courts. Beaucoup se demandaient pourquoi comme ça d'un coup, la seule réponse que j'ai trouvé c'est « j'avais envie, ça m'a prit comme ça d'un coup », vous vous doutez bien que ce n'est pas la vrai raison, mais je me vois mal expliquer ça à tout les gens que je croise, que ce soit professeurs, étudiants, professionnels, certains membres de la famille ou amis. Et puis il faut avoir une part de mystère quand même, sinon ce n'est pas drôle.

C'est la seule échappatoire, la seule porte de sortie que j'ai pu trouver. En tout cas je ne sais pas comment font les personnes qui vivent au quotidien avec les cheveux si courts, ça fait froid au niveau des oreilles. Plus sérieusement, j'ai peur de l'avenir. Je n'y pense jamais mais je me dis que ça ne tiendras peut-être pas toute ma vie, ou que ça se déplacera autrement. Je redoute de devoir revivre quelque chose de démolissant, j'ai peur de la façon dont ça m'atteindra.

Je ne sais pas si quelqu'un est en mesure de comprendre. Je ne sais pas si quelqu'un peut ressentir les mêmes choses qu'une autre personne. On se sent si seuls parfois. Mais la solitude est trop agréable pour être abandonnée. Je n'arrive pas à savoir ce que je veux ou à déterminer ce dont j'ai besoin. Parfois, il m'arrive de pleurer. C'est tellement rare par rapport à avant, il y a quelque chose qui a changé en moi, je ne saurais pas expliquer quoi, mais ça n'a plus rien à voir avec le passé. 

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 19, 2022 ⏰

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