Hogwart's dream

Reflet

Le vieillard ferma les yeux,

Les rouvrit.

Son reflet se dressait devant lui.

Apeuré, soulagé, confiant.

Il avait enfin compris.

~

Cela faisait plus de quarante ans que Dumbledore dirigeait Poudlard.

Il l'avait aimé cette école.

Albus regarda le mur où les portraits des anciens directeurs étaient affichés.

À quoi ressemblerait le siens ?

Garderait-il au-delà de la mort ses lunettes en demi-lune permettant à ses yeux fatigués d'affronter ce qu'il lui restait de la vie ?

Il y avait un milliard de questions que le sorcier pouvait ce poser.

Mais aujourd'hui il lui semblait que les plus futiles restaient les plus importantes.

Peut-être était-ce ça vieillir.

Redevenir l'enfant,

Connaissant de la vie,

Ce qui est amusant.

Albus quitta son bureau.

Un sentiment doux amère le parcourut.

Minerva garderait-elle la collection d'objets qu'il avait accumulé ?

Les mots de passe qu'elle choisirait seraient-ils faire sourire ses élèves ?

Dumbledore s'arrêta. Évidemment que Minerva serait à la hauteur !

Il repris sa marche.

Sûr, il l'avait aimé son château.

Mais aimer ne suffisait pas.

Albus l'avait appris à ses dépens.

Ses pas ce faisaient de moins en moins assuré au fur et à mesure que son rythme accélérait.

De la colère ? Peut-être. De l'appréhension ? Sans doute.

Pourtant pas une fois le sorcier ne pensa à faire demi-tour.

Une poignée de porte.

Il était arrivé.

L'homme qui lui avait appris l'amour.

L'homme qui lui avait appris la haine.

Il était devant lui.

Il devait l'affronter.

"Cela faisait longtemps Gryndelwald", lança Dumbledore d'une voix ce voulant assuré, "mais pas assez pour t'oublier" ne purent s'empêcher ses lèvres de glisser dans un murmure brisé.

Mais l'homme en face de lui ne répondait pas.

Il souriait.

Bien sûr qu'il souriait.

Qu'aurait-il put faire d'autre ?

C'était avec ce même sourire que Dumbledore trouvait le sommeil les nuits agitées, c'était avec ce même sourire que Gellert lui avait avoué qu'il l'aimait.

Dumbledore s'avança,

" Quoiqu'il arrive, quoiqu'il ce passe tout est faux, rien n'est vrais, tout ce passe..."

- Dans t'as tête, bien sûr. Mais pourquoi cela voudrait-il dire que ce n'est pas réel ?

L'homme en face venait de lui parler. De... Lire dans ses pensées ?

Que pensait- il d'ailleurs ?
Dumbledore essaya, essayait de se souvenir, en vain. Alors il s'avança, vers celui au cheveux couleur nuage dont le visage évoquait un orage d'été, celui ayant prononcé ces mots, le frôla.

Lisse. Un miroir.

Comment avait-il put oublier ?

Gellert n'était pas là. Gellert ne serait jamais là.

Son amant était en prison, par sa faute. Grâce à lui.

"Ça ne fait pas grand bien de s'installer dans les rêves en oubliant de vivre" Continua le reflet.

Ces mots, il les avaient déjà entendus. Il les avaient déjà dits.

Mais que signifie vivre quand les rêves ne sont plus là ? Que signifie tout ça ? Que signifie l'espoir quand la lumière aveugle chaque jours un peu plus ?

Lunette en demi-lune, aidant le cœur à ne plus voir.

Demi-lune, demi-mot, pour mieux se voiler la face.

Se reflet qu'il ne voit pas, cette vie priant la mort.

Demi-lune, demi-mot, coincé entre rêve et cauchemar.

Une larme glissa.

Regret.

Il avait enfin compris.

Remords.

Il avait été lâche.

Peur.

Il y avait ces mots, ces mots qu'il n'avait jamais prononcé.

Des mots perdus, des mots volés, des mots reniés, des mots cachés.

Alors d'une voix forte, ne lui ressemblant pas, il cria, en un murmure chacun d'entre eux:

"Je t'aime"

Il reprit son souffle.

"Je t'aime mais je ne regrette rien.
Si ton cœur était doux,
Ton âme elle était noire
Et si mon cœur brûlait,
Il respire à Poudlard"

Car notre plus grand désir est notre plus sombre regret.

Et qu'être heureux signifie être entier.

Alors le sorcier recula, retira ses lunettes.

Demi-lune.

Plus aucune barrières ne se dressaient entre le reflet et lui.

Demi-mot.

Car le cauchemar était un rêve.

Il suffisait d'en écrire le scénario.

Il leva les yeux, souria,

Dans le miroir enfin brillait,

Son propre reflet.