4. Être père

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Pouvons nous imaginer l'amour d'un père ? Il y a t'il des mots à mettre sur cette émotion ?  Ce n'est pas la nature des hommes, mais bien a cause de la nature humaine qu'un tel tabou existe.
Alors voilà ma question, l'amour doit il être caché ? L'amour doit il se vivre dans l'oppression d'un cœur bien trop petit pour supporter à lui seul cet émotion ? Doit il être contenu ? Doit il être viril ? Grand nombre vont certainement répondre non. C'est pourtant ce que la plupart des pères pensent. Et Sukuna était l'un d'eux.

Tout au long de la grossesse de cette femme, il s'imaginait ferme, terriblement froid. Il voulait engendrer le monstre qu'il était. Et lorsque le premier cri de sa fille résonna, ces principes furent ébranlé. Il voyait cette chose minuscule. Si fragile. Si pure. Et tout le monde sait que les démons sont attirés par la pureté. Alors Sukuna était terriblement attiré par cet être. Pas seulement pour son innocence mais pour ce lien qu'il ne pouvait expliquer. Pour cet amour qui brûle en lui, qu'il était incapable d'extérioriser. Il voulait la serrer si fort. S'imprégner de son odeur. De sa présence.

Et au fil des années, il voyait sa progéniture grandir. Il la voyait faire ses premiers pas. Entendre son premier rire qui l'avait fait fondre tant de fois.  Il la voyait devenir cette personne incroyable qu'il n'avait jamais pu être. Il se voyait père.

Ceci est une infime parti de ce qu'un père ressent en lui depuis le premier regard échangé avec son enfant.

Maintenant, que ressent t'il après le dernier regard ? Lorsqu'il se rend compte que c'est trop tard. Lorsqu'il découvre qu'il ne la verra plus courir, ni rire. Lorsqu'il traversera les pièces de cette maison sachant qu'elle n'y sera plus jamais. Quel genre de vide peut il ressentir quand ce qui lui donnait cette sensation de vie, cette sensation d'être humain, disparaît dans les bras de la mort ? Cette émotion est encore plus difficile que de décrire l'amour. Sukuna avait ressenti ce poids constant sur sa poitrine. Ce poids qui n'a jamais disparu. Il était constamment présent, constamment oppressant. Et tout était une piqure de rappel. Des cris d'enfants qu'il avait massacré à l'odeur du bois, tout lui rappelait Atsuko.

Et, chose dont il ne se doutait pas, il allait devoir la perdre de nouveau. La perdre alors qu'il venait tout juste de réparer ce vide en lui. La perdre alors que ce poids sur sa poitrine avait enfin disparu. Que son cœur battait de nouveau. Que le monde semblait vivre autour de lui, finalement. Et Itadori avait compris ce sentiment. C'est pour cela que cette nouvelle l'avait dévasté tout autant. Car lorsque Sukuna et Atsuko s'était décidé à se déconnecter de tout part à leur hôte, Tatsuki lui avait tout avoué. Elle lui avait raconté la manière dont elle sentait Atsuko s'effaçait. Elle lui avait parlé de ce vide qui se creusait en elle. Et c'est ainsi qu'ils s'étaient tout deux retrouvé, en plein milieu de la nuit, dans la bibliothèque de leur école, cherchant une solution.

Le rosé observait Tatsuki du coin de l'œil. La peine grandissante en elle commençait à prendre le dessus sur ces doux traits. Elle se perdait elle même avec Atsuko.
Quel pire châtiment pour un amoureux tel qu'Itadori que de voir sa bien aimée aussi brisée ? C'est bien pour cela que, depuis quelques jours déjà, il gardait dans ses affaires des billets de train. Ce train qui les mènera tout les deux chez les Fujimoto.
Notre jeune héros était terrifié. Depuis combien de temps avait elle donc perdu ces parents de vue ? Sont ils même vivants ? Il avait peur de la mener tout droit vers deux tombes. Que ce voyage la brise plus qu'elle ne l'était déjà. Et pourtant, il était tout autant impatient. Impatient de rencontrer ses beaux parents. Impatient de la voir se reconnecter avec sa famille. Impatient de voir son sourire et d'entendre son rire quand elle y sera.

Itadori n'a toujours eu que son grand père dans sa vie. Et le perdre a été bouleversant. Il lui était incapable d'imaginer Tatsuki passer le reste de sa vie sans sa famille. Comment devait elle se sentir face à la relation entre Atsuko et Sukuna ? Comment se sentait elle sans sa famille ? Après tout, il n'y avait pas plus aimant que Sukuna. Il était le genre de père à rendre jaloux n'importe quel enfant. Il était ce genre de père qui ne refusait rien. Au point d'aller nourrir tout les chatons du village en pleine nuit. Au point de courir après une brebis malade pour la soigner. Au point de coudre des robes à la main pour apercevoir le sourire de sa fille. Sukuna était ce genre de père. Et d'ici quelques jours, Tatsuki, elle, retrouvera le sien. Cette dernière était angoissée. Elle se rappelle de ce soir, où elle était parti. Elle se rappelle avoir pleuré à chaudes larmes près de leur lits lorsqu'ils étaient endormi. Elle se rappelle ces légers baisers qu'elle avait laissé sur chacune de leur joue. Et elle se rappelle du regard satisfait de Yuri.

- Tu crois qu'ils vont m'en vouloir ?

Les yeux de Tatsuki s'humidifièrent avant même d'entendre la réponse. Dans les bras d'Itadori, elle se jeta sans perdre une seconde.

- Je ne peux pas te dire qu'ils ont complètement oublié ce que tu as fait. Mais je suis sûr qu'ils t'aiment plus qu'ils t'en veuillent.

- J'ai du faire pleurer ma propre mère. J'ai été tellement conne.

Les bras autour d'elle se resserrèrent tandis que les marques du Roi se propagèrent sur celles ci. Et très vite, un silence se fit entre elle et Sukuna.

- Gamine, tu penses vraiment que tes parents vont  t'en vouloir ?

D'un mouvement vif, Tatsuki acquiesça. Et un léger rire de Sukuna résonna.

- Ton retour va être la meilleure nouvelle qui soit depuis des années. Tu n'as pas idée d'à quel point ils attendent ça.

- Je leur ai fait du mal. Quel genre de fille fait souffrir ces parents ?

- Toutes. Élever un enfant c'est accepter la souffrance jusqu'à la fin de sa vie. Et pourtant, on ne peut s'empêcher d'aimer. L'amour d'un père pour sa fille ne se brise jamais.

Cette dernière phrase résonna dans chacun de leur corps. Sukuna n'avait pas dit cela par hasard. Et son regard parlait pour lui. Si le père de Tatsuki lui en voulait, lui, jamais. Jamais car cet amour paternel qu'il avait pour Atsuko, il l'avait aussi pour Tatsuki. Et même si ces mots ne franchiront jamais ces lèvres, il ne le cachait pas : il aime ces deux filles terriblement.

Sans attendre, Sukuna laissa de nouveau place à Itadori. Et ce que Tatsuki vit la marqua.

Leurs regards.

Leurs regards étaient identiques. Autant aimant. Autant passionné. Autant doux.

Sukuna avait la douceur d'Itadori et elle venait de s'en rendre compte.

Alors comment pouvait elle avoir peur avec ces deux là à ces côtés ? C'était ce qu'elle s'était dit lorsqu'elle sonna à la porte de la maison familiale, une semaine plus tard. A quelques pas derrière elle, le rosé se tenait debout, lui laissant de l'intimité pour ce moment qui allait changé sa vie. Car en effet, lorsque la porte s'ouvrît, la vue qui s'offrît à elle fut douloureuse.

Face à elle, se tenait un homme rayonnant possédant le sourire le plus radieux qu'elle ai vu. Cet homme qui fut son père, morose et dépressif, dans ses souvenirs.

Le flot d'émotion dans son corps lui coupa le souffle. Elle revoyait son père. Plus heureux qu'elle ne l'avait jamais connu. Ni blême, ni impuissant. Un simple homme vivant une belle vie. C'était une image qu'elle n'avait jamais vu. Le temps de son absence, sa famille s'était reconstruite, vivant une vie dont elle ne faisait plus partie.

- Papa.

Et ce fut son père qui fonda en larmes en premier. Tatsuki fut prise dans une étreinte dure, brutale mais tremblant. Et pourtant, plein d'amour. Car, tel Sukuna, le père de Tatsuki venait de retrouver un souffle de vie qu'il pensait avoir perdu à jamais.

Il était de nouveau père.

Et cette haine que Tatsuki redoutait n'existait même pas. Elle n'avait pas idée de la douleur qui s'était caché derrière ce sourire depuis tout ce temps.
Après tout, aucun enfant ne sait à quel point l'amour d'un père est fort avant d'être parent lui même.

Être père est bien compliqué mais, pourtant, tel Sukuna, le père de Tatsuki a été l'un des meilleurs.

FIN

Blanche - Tome 2 - Itadori x OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant