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Le vent se leva sur la colline aux Coquelicots, plus fort qu'habituellement. Addie leva la tête vers le ciel et poussa un soupir.

— Je vais y aller, murmura-t-elle.

— Déjà ?

Son regard trouva à nouveau celui de Mary et elle hocha la tête. A travers les yeux bleus de son amie, elle pouvait voir son âme lui crier de rester, mais elle ne pouvait pas.

Elle leva le collier de coquelicots miraculeusement intact à la hauteur de sa poitrine et sourit légèrement.

— Mais avant, je ne t'ai toujours pas donné ceci.

Mary ne bougeait pas, le vent soufflait si brusquement que ses cheveux lui cachaient la vue et qu'elle peinait à apercevoir son amie correctement. Elle sentit deux mains lui passer la couronne autour du cou et avant qu'Addie n'eut le temps de baisser le bras totalement, elle lui attrapa.

— Reste, dit-elle si bas que le mot se mélangea au sifflement du vent.

— Non, je dois partir.

Mary avait beau serrer son poignet de toutes ses forces, elle parvint à échapper à sa prise. Elle la sentit s'éloigner au rythme du vent et lorsqu'elle réussit enfin à dégager ses cheveux de son visage, Addie avait disparu, la laissant seule en haut de cette colline.

Le ciel s'était assombri plus encore, elle avait froid désormais. Mais le vent continuait de souffler, de plus en plus fort. Elle fut obligée de plaquer ses mains sur ses oreilles pour atténuer les bruits qui ressemblaient à des murmures, comme si des dizaines de personnes s'étaient penchées au-dessus d'elle pour lui chuchoter des choses insensées.

Autour d'elle, des bourdonnements sourds résonnaient dans tous les sens. Elle voulait hurler mais le son se bloquait dans le fond de sa gorge, puis elle savait qu'avec un tel vacarme, même si elle y était parvenue, personne ne l'aurait entendue.

Des éclats réguliers se firent entendre sur la colline, suivis de sifflements suraigües. Les sons se rapprochèrent de plus en plus, à une vitesse surnaturelle, encore et encore, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de distance à parcourir.

Elle écarquilla les yeux et un silence sourd s'installa. Son corps sembla suspendu dans les airs un court instant avant de s'effondrer contre la terre froide. Elle ne bougeait plus. Des coquelicots avaient poussé sur sa robe, un petit peu partout, mais majoritairement au niveau de son cœur.

C'était beaux les coquelicots, et cette colline en était remplie. Elle demeurait d'ailleurs à côté d'un regroupement de ces fleurs qui tiraient vers le roux. Ô, Addie les aurait appréciés ceux-là.

Des hommes passèrent en courant à côté de son corps inerte dans un bruit de bottes cadencé. L'un s'arrêta à côté de la jeune fille.

— Merde, c'était une gosse !

Son camarade lui tapota l'épaule pour l'encourager à continuer son chemin.

— Tu ne pouvais pas en être certain, tu as bien fait. C'est normal d'être autant sur ses gardes en temps de guerre.

Et les deux s'éloignèrent.
Ça ne la dérangeait pas, Mary. Au contraire, elle en était ravie. Elle allait enfin pouvoir rejoindre son amie.

Le vent se lève sur la colline aux Coquelicots Où les histoires vivent. Découvrez maintenant