Tu l'a imprimer

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Pdv Omar

Un mois et demi s'est écoulé depuis qu'il est partit. Ça fait deux semaines qu'il n'est pas repassé à la maison. Quatorze jours que je ne l'ai pas vu. 20160 minutes qu'il me manque. On est le trente et un décembre. J'ai passé Noël seul, ici. Il était la seule famille qui me restait. ça fait quatre ans aujourd'hui qu'on est ensemble puis qu'on s'est embrassés la première fois. On s'est rencontré à une fête chez des amis communs. Je ne veux pas passer la nouvelle année seul. Je ne veux pas passer l'année...

C'est submergé de sombres pensées que la sonnette retentit. Surpris, j'essuie vite mes larmes, pour aller ouvrir. Sans prendre la peine de regarder par le judas. J'aurais dû.

- Edvin ?! Qu'est ce que tu fais là ?

- C'est encore chez moi jusqu'à preuve du contraire.

- Bien sûr. Excuse-moi. Me poussant de devant l'entrée pour le laisser passer. Refermant derrière lui.

- Pourquoi tu a sonné ? Tu as les clefs.

- Je voulais être sûr que tu sois la.

- Tu as oublié quelque chose ?

Je prends conscience de ce qu'il vient de me dire. Je rougis.

- Pourquoi ?

- Il faut qu'on parle. Wilma m'a dit que tu étais venu il y a deux semaines pour me parler.

J'hoche la tête ne pouvant dire un mot. Il est là. En face de moi. J'ai tellement envie de le prendre dans mes bras.

- Je n'étais pas prêt à te voir à ce moment.

- Je comprends tout à fait. Plongeant ses yeux dans les miens.

- Omar. Encore une fois je n'aurai qu'une question. Après tu pourras me dire tout ce que tu voudras.

J'hoche une seconde fois la tête.

- Pourquoi ?

Perdu je ne sais quoi répondre. Il semble le voir dans mes yeux car il explicite:

- Pourquoi tu ne m'as rien dit ? Sur ta maladie ?

Mon cœur rate un battement.

- Putain Wilma... Je chuchote.

- Ne la blâme pas. Elle ne m'a rien dit. Je t'ai entendu quand vous parliez. Elle ne sait pas que je le sais. Elle ne sait même pas que je suis là.

- Exactement pour cette raison.

- Je comprend pas.

- Ton regard de pitié. C'est tout ce que je voulais éviter... Je ne veux pas que tu minimise ce que je t'ai fait à cause de ça.

- Omar...

- Je t'ai répondu. C'est à moi de parler.

Il hoche la tête.

- Viens on va s'asseoir.

- Je vais chercher à boire. Je reviens. Tu veux quelque chose ?

- Non merci.

- Même de l'oasis ?

Il sait pertinemment que je ne dis jamais non à de l'oasis d'habitude. Pourtant la je sais que je ne pourrais rien avaler. Je fais non de la tête.

Il revient quelques minutes plus tard. Une canette dans une main, une photo dans l'autre.

Mon coeur rate encore un battement. C'est notre photo préférée. Simple mais efficace. Elle nous représente bien. On est tous les deux dans un parc et on fait un cœur avec nos mains.

- Tu l'a imprimer.

S'asseyant en face de moi.

- Je t'ai dis que je le ferais.

- Tu m'a dis beaucoup de choses à un moment donné puis plus rien après.

Mes pupilles plongent dans les siennes.

- Je sais. Je suis désolé. J'ai fait tous les trucs que je t'avais dis ou que tu m'avais demandé. Je l'ai pas fait pour toi. Je l'ai fait pour moi. Pour penser à toi.

- Où est ce que tu as trouvé le temps ? Tu n'en n'avais plus pour moi.

- J'ai compris. J'ai merdé. Pas la peine de tartiner encore et toujours.

- Donc ?! Son ton ne s'était pas radouci mais il arrête de tout ramener à lui même si je le comprends.

- J'ai démissionné.

- Pourquoi ? Ce travail te plaisait beaucoup.

- Trop. Il me plaisait trop. Je vivais pour les chiffres. Me noyant dedans. Tous ces chiffres me sont montés à la tête. Ne vivant plus pour toi, pour nous, ni même pour moi. J'aimais beaucoup mon travail mais je t'aime plus. Quand tu es parti, ça m'a fait un électrochoc. Je me cachais derrière car il me permettait d'oublier quelque temps ma maladie. Malheureusement je t'ai oublié aussi. ça ne va aller qu'en empirant. Oublier de dormir, manger, aimer... vivre. Je ne voulais plus penser à rien. Cette maladie m'a enlevé ce que je souhaitais le plus au monde: Des enfants.

- Je ne comprends pas me coupe t'il.

- Edvin c'est déjà assez compliqué comme ça. Ne me coupe pas s'il te plait. Tu pourras me poser toutes les questions que tu veux quand j'aurai fini. S'il te plait...

Il hoche la tête. il prend mes doigts entre les siens pour les presser. Me donnant le courage de continuer.

- Merci. Je n'aurai pas d'enfants car ma maladie ne va faire qu'empirer. Je vais perdre la mémoire. Perdre l'usage de mes membres, de mes muscles. Perdre aussi mes mots. Je vais devenir un balai. Muet, sourd et imobile. Je ne veux pas faire souffrir mes futurs enfants. Je ne veux pas m'attacher à eux pour finir par les oublier. Je ne veux pas qu'ils s'attachent à moi pour qu'ils souffrent quand ils verront dans mes yeux que je les considérerais comme des inconnus. C'est pareil pour toi. Je vais t'oublier. C'est pour ça que j'ai fini par faire tous ces petits trucs que tu me demandais. Pour me forcer à travailler ma mémoire. Les souvenirs sont le seul truc qu'il me reste pour l'instant. Je t'ai déjà perdu... Je suis désolé Edvin. Je ne t'ai jamais trompé. Je t'ai fait pire je t'ai abandonné au point que tu pense que je puisse te faire ça. Quand je m'enfermais dans mon bureau à des heures bizarres c'était pour parler à des médecins étrangers. Le décalage horaire m'obligeait à veiller tard car chez eux c'était le matin. Mon médecin traitant m'a donné des numéros des pays un peu plus avancés sur cette maladie. Je devais les appeler pour voir s'il y avait des traitements expérimentaux. Je devais aller en Allemagne, à la place de mon voyage d'affaires. Effectivement je devais rejoindre quelqu'un quelque part mais c'était purement médical. Je te jure aussi que j'ai réellement oublié de te le dire. Tu ne m'as pas cru.

Il confirme d'un hochement de tête. Un sourire désolé aux lèvres. Je sens une pression sur mes doigts.

- Oui ?

- Excuse moi. Je sais que tu m'as demandé de ne pas te couper mais c'est important. Pourquoi tu as annulé ?

Trois joursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant