Chapitre 19

333 9 0
                                    

J'ai passé toute la nuit à faire des recherches. J'imprime par centaines des articles, j'écoute des podcasts, je surligne, annote... Je me documente sur ce monde que je ne connais pas assez, les informations, les témoignages se contredisent tous. Je continue de surfer et d'imprimer machinalement. Rien ne semble avoir de sens, je tombe sur des vidéos d'exploration sur YouTube mais tout me semble faux, surjoué et à l'inverse de mes conclusions actuelles. Je n'arrive pas à aligner toutes mes idées, en tirer des conclusions. Je suis sur le tapis de ma chambre, allongée sur le sol et entourée de centaines de photos et d'articles.

Je ferme les yeux et tente de faire le point sur ce que j'ai compris. Les fantômes semblent être des esprits traumatisés. Ils étaient soit malfaisants dans leur vie soit leur mort a été traumatisante et ils sont condamnés à rester sur Terre. Ils sont présents dans les endroits sombres, plus souvent dans la nuit. Rien ne semble pouvoir les arrêter mis à part qu'ils ne peuvent pas quitter le lieu qu'ils sont censés hanter, ils ont pour seul but d'absorber l'énergie vitale de tous les êtres qu'il croise.

Cela n'a aucun sens. Tout ce que j'ai vécu me démontre le contraire, même si j'étais terrifiée je n'ai reçu aucun comportement agressif des fantômes avec lesquels j'ai communiqué. Ma curiosité et mon incompréhension me poussent à me relever dans un bon et à ranger toutes mes fiches de médecine.

A la place, j'accroche toutes mes recherches. J'enlève tout sans faire attention au rangement, je mélange tout et les pose dans une grande corbeille que j'avais sous mon lit et qui attendait sagement les prochains partiels pour être utilisé. Tout déborde, rien n'est aligné, ni classé.

D'un point de vue extérieur, on pourrait penser que je fais une crise de nerf. Mais rien ne m'a semblé plus clair qu'à ce moment-là, je sais ce que je fais et pourquoi. Je ne me pose pas de questions sur le pourquoi du comment, j'aligne toutes les informations qui sont similaires et les relient grâce des fils de différentes couleurs et à des post-it récapitulatifs. Chaque couleur a une signification. Le vert concerne toutes les informations qui me semblent logiques et qui coïncident avec ce que j'ai pu observer. L'orange correspond à ce que je dois approfondir comme notion et pour lequel je n'ai pas de preuve tangible. Le rouge, je n'ai aucune idée de la véracité de mes notes et je dois explorer.

Je m'assois en tailleur et fixe sans cligner des yeux le mur organisé par toutes mes recherches. De manière absente je caresse le chat qui me rend de plus en plus souvent visite, je laisse maintenant ma fenêtre ouverte tous les soirs, espérant avoir sa compagnie. Sa fourrure est magnifique, on dirait un petit léopard, selon mes recherches il s'agirait d'un bengal. Il n'a pas de collier, je l'ai donc surnommé Schrödi pour le chat de Schrödinger. C'est le premier nom qui m'est venu lorsque j'ai pensé à cette petite boule de poil, c'est original ni même joyeux étant donné la situation du chat originel, mais cela me correspond. C'est l'une des premières expériences scientifiques que j'ai adorées et qui m'a poussé à en savoir plus sur les sciences.

En regardant mes recherches qui ressemblent à un mur d'enquêtes dans les séries policières, je ressens pour la première fois depuis longtemps un sentiment de paix, de satisfaction. Toutes mes questions, mes interrogations se sont envolées même si je me doute que ce soit temporaire. Le bruit de mes pensées est enfin inexistant, je n'entends que ma respiration et les ronronnements de Schrödi. De manière absente, je le caresse alors qu'il se trouve sur mes genoux.

La soirée suit son cours, je continue mes recherches, grignote quelques chips, tomates cerises et gâteaux que j'ai trouvés dans la cuisine. Ma chambre est un chantier, il y en a partout. Je sens la fatigue arriver mais je ne m'arrête pas pour autant dans mon avancée, j'ai cette soif de savoir qui reviens dès que je me pose et que je regarde mes recherches. Un regard me renvoie à une autre question. Je lance une vidéo, sur YouTube d'urbex dans l'un des manoirs les plus hantés, en m'allongeant sur le ventre vu mon fessier douloureux à force d'être sur mon tapis. Je regarde tout en sentant mes yeux se fermer doucement, je sens Schrödi se lover contre moi, m'apportant une source de chaleur. Mes yeux commencent à être douloureux à force de lire et d'analyser et je décide de les fermer quelques minutes pour les reposer.

J'entends ma porte grincer, et des pas se rapprocher.

- Mat, dit une voix féminine.

Je suis profondément endormie, j'entends cette voix qui m'appelle mais je n'ai pas la force de me réveiller. Je suis bien comme je suis, mon lit est étrangement inconfortable mais je m'en fiche, j'ai besoin de ce repos, je grommelle et tourne ma tête pour me replonger dans mon sommeil. Même si mon cerveau est embué, je me rends compte que ce n'est pas normal d'entendre une voix féminine dans ma chambre et que ma mère n'utilise pas mon surnom. Quelques secondes se passent pendant que tous les rouages s'enclenchent et sonnent le signal d'alarme.

Dans un bon, je prends appui sur mes mains pour me lever, mon cœur étant prêt à sortir de ma poitrine. Je pousse tellement fort sur mes bras que je tombe en arrière et m'écrase les fesses sur le sol. J'enlève dans un geste rapide la feuille qui est collée sur ma joue qui m'empêche de clairement voir la personne, ainsi que la bave séchée avec mon poignet droit. Lorsque je croise le regard de Christine, je pousse un soupir de soulagement et pose mon index et mon majeur sur ma carotide, qui est la base de mon cou. Même si les pulsations de mon cœur se calment, je sais qu'il est l'heure de la conversation que je n'ai fait que repousser. 

Haunting MatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant