Lundi 18 novembre
Assis à l'arrière de la voiture, tenant fermement l'urne contre moi, je me laisse conduire sur les lieux. Grâce à Gabin et Lucie, j'ai pu faire toutes les démarches qui me tombaient dessus. Enfin, ils ont pu faire les démarches, moi je ne suis qu'une loque depuis que j'ai quitté cette chambre d'hôpital.
C'est la dernière image que j'ai de l'homme de ma vie. Les personnes habilitées sont venues le chercher et les étapes s'en sont suivies. Je n'ai pas voulu de cérémonie orchestrée par un inconnu, ni même assister à l'ultime phase. Le feu.
Gabin s'est chargé de contacter ses géniteurs pour leur annoncer la nouvelle, leur parler de ce que nous avions décidé de faire, mais ils ont osé répondre qu'ils n'avaient pas d'enfant.
J'aurais dû m'y attendre... mais naïvement, j'ai pensé qu'il leur resterait peut-être une once d'attachement. Même si leur fils n'avait pas suivi le chemin qu'ils souhaitaient, je me disais que ça leur ferait sûrement quelque chose, mais rien.
Va savoir pourquoi, je me suis dit que je devais les tenir au courant. Sans doute parce que je suis humain et que ça me semblait normal de le faire.
Je suis trop bon. À vrai dire, ils n'ont absolument pas leur place près de nous. C'est mieux comme ça.
J'ai choisi de laisser partir mon Thomas, en pleine nature, dans un bel endroit. Une forêt luxuriante, un bois qu'on aimait arpenter tous les deux.
Encore une fois, nos meilleurs amis ont été là pour m'aider à réaliser mes souhaits. Dès l'annonce du drame, ils m'ont porté à bout de bras. Ils m'ont accueilli chez eux et m'ont supporté. Durant cinq jours, je n'ai pas quitté le lit de leur chambre d'amis, enfin à part pour aller aux toilettes. Même si je n'en ai aucune envie, Lucie s'efforce de me forcer à m'alimenter.
Elle et Gabin se relaient pour ne jamais me laisser seul, même la nuit. Ce qui est un exploit sachant que je ne sentais pas la rose. Ma première douche depuis ce douze novembre, c'était ce matin. Je voulais être beau pour mon homme, mais tout est plus difficile maintenant.
Je me suis effondré dans la salle de bain, c'est Gabin qui m'est venu en aide. Il m'a même donné un coup de main pour m'habiller.
J'ai les meilleurs amis qui soient et ça, c'est encore grâce à Thomas qui me les a présentés. Ils me sont indispensables, sans eux j'aurais sans doute coupé court à ma vie. Enfin, à ma survie.
J'ouvre les yeux jour après jour, j'effectue les gestes du quotidien, manger, boire, mais sans envie. Tout est par automatisme. Comme si mon essence vitale m'avait quitté avec lui et qu'il ne restait que mon corps. Je me sens dans un état second, là, mais pas là.
Au milieu des bois, parmi une multitude d'arbres, je m'arrête subitement. Un rayon de soleil filtre à travers les branches, traçant un halo de lumière au-dessus de ma tête.
— Ici, c'est parfait.
Nos meilleurs amis, ses collègues, nos voisins retraités, tous ont répondu présents. Les uns après les autres, je les écoute dire quelques mots en l'honneur de mon Thomas. Le tour de Gabin arrive, et le voilà en train de lire, le texte qu'il a écrit avec Lucie.
— Thomas, par un concours de circonstances, Lucie et moi avons croisé ta route, à l'occasion d'un job d'été. Très vite, on a accroché tous les deux, puis tous les trois. Grâce à tes conseils, j'ai séduit celle qui est devenue ma femme. Elio, notre fils, à eu la grande chance de te connaître durant les deux premières années de sa vie, son oncle Tom, comme il aime t'appeler. Nous étions persuadés que tu serais là, auprès de lui, de très longues années encore et que tu connaîtrais notre deuxième enfant à venir.
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Et s'il y avait un après ?
RomanceA l'aube, le bonheur irradie, au crépuscule, l'horreur se produit. C'est ce qui est arrivé à Martin, un soir d'automne. La personne la plus chère à son cœur, son amour Thomas, s'en est allé brusquement. Sa vie est partie en lambeaux, et il s'est dem...