Chapitre 15

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Morgal réapparut brutalement dans une ruelle détruite de la ville, le souffle coupé. Il était totalement épuisé et suffoquait lamentablement. Ses jambes le lâchèrent et il s'effondra contre le mur d'une masure, la chevelure en bataille.

Petit à petit, il sentait ses iris reprendre leur couleur habituelle dans un désagréablement picotement. Tout s'était déroulé si vite... Mais il devait bien se rendre à l'évidence : il avait usé d'un don de téléportation. Deux fois... La première pour échapper aux tirs des astres et la seconde fois pour s'enfuir après son sombre forfait.

L'elfe poussa un gémissement soudain : un carreau s'était planté sous ses cottes et du sang coulait abondamment sur sa chemise et son pantalon.

— Cela m'apprendra à ne pas mettre d'armures, grinça-t-il de douleur.

Il ne s'en était même pas rendu compte !

Cependant, sa blessure n'occupait guère son esprit. Il s'était téléporté ! Certes, si au premier essai, il avait réussi à fondre sur le roi, la deuxième téléportation n'était pas un franc succès. Il aurait bien préféré réapparaitre au campement. S'il était hors de la citadelle, il lui restait les quartiers humains à traverser ainsi que le champ de bataille. Sans parler de son Vala bien diminué. Sa magie elfique ne demeurait pas intacte non plus puisqu'elle se polarisait sur la guérison.

Morgal grimaça en observant le trait qui le traversait. À une si faible distance, le carreau avait pu aisément lui perforer plusieurs organes. Mieux valait le laisser tranquille, le retirer provoquerait une hémorragie.

Un battement d'ailes lui fit soudain lever la tête.

— Besoin d'aide, peut-être ?

Le prince souffla de soulagement :

— Viens me chercher, Saucarya, je ne peux pas te rejoindre.

Sur la selle de son dragon, le grand-frère arborait une armure légère, adaptée au vol. Un heaume de vermeil protégeait sa tête et une longue cape retombait sur la carapace du reptile. Les écailles de ce dernier viraient dans un beau brun mordoré, comme la chevelure de son maître.

Saucarya descendit souplement de selle et attrapa son cadet par l'épaule.

— Tu sais ce que je risque en posant mon dragon, ici ?

— De sauver ton gentil petit-frère ?

— Morgal... Je préfère tout de suite te prévenir ; père est dans une colère noire.

Le vampire sourit, prenant difficilement place sur le dos de l'animal.

— Comment m'as-tu trouvé ?

— Ton aura est devenue très particulière. Je l'ai vu réapparaitre soudainement.

— Je vois...

— Ils ne t'ont pas loupé, au fait. Tu vas tenir le coup ?

— Ma magie s'en occupe déjà.

— Bien. Essaie de t'accrocher, je décolle.

Pour prendre appui, le dragon enfonça ses larges griffes dans les murs et les toits des maisons en ruines. Ses ailes battirent de plus en plus vite et enfin, ses deux pattes arrière le propulsèrent dans les airs avant qu'il ne prenne rapidement de l'altitude.

Le vent gifla le visage de Morgal qui décida d'enfouir son nez dans le dos de Saucarya. Avec les mouvements brusques, la douleur semblait s'enflammer davantage et ses dents se serrèrent pour retenir une plainte.

La silhouette allongée du dragon fila à travers le ciel. Ce genre de montures gardait une apparence très gracieuse, en partie grâce à leur long cou et leur queue démesurée qui leur servait de gouvernail. De nombreuses piques hérissaient le haut de la carapace ainsi que toutes les parties saillantes, menaçant les importuns de s'embrocher dessus.

Gloire et Déchéance - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant