En me dirigeant vers la salle de mathématiques, je le revis. «Il», le garçon aux cheveux bruns, mais plus il s'approchait, plus je distinguais des nuances cuivrées dans sa chevelure bouclée. Quand il se rapprocha de moi, je vis dans ses yeux noirs les mêmes étoiles que lors de mes nuits d'insomnie.
- Excuse-moi, demanda-t-il d'une voix un peu éraillée, tu sais où est la salle 110 ? Je suis nouveau, m'informa-t-il en souriant. Son sourire dévoila une fossette sur sa joue. Je m'arrachai à la contemplation de son visage en rougissant. Je réfléchis un instant et regardai de tous les côtés pour être sûre qu'aucun des sbires de Paul n'était dans les parages.
- Tu cherches quelqu'un ?
Je reportais mon attention sur lui.
- Non, viens on y va, répondis-je un peu sèchement. Il s'arrêta.
- Si ça te dérange...
- Non, mais faisons vite.
- Pourquoi ?
Fallait-il lui dire ? Et puis merde, je n'allais pas encore les laisser tabasser quelqu'un !
- À l'interclasse, je te conseillerais de te cacher derrière le préau. Il fronça les sourcils d'un air interrogateur.
- Pourquoi devrais-je me cacher ?
- Parce que tu portes l'uniforme.
- Et alors ?
- Alors, ils vont te passer à tabac pour ça.
- Je n'ai peur de personne, dit-il d'une voix grave en plantant ses yeux dans les miens. Je détourne le regard, gênée.
- Ce n'est pas une question de peur, repris-je, ils vont te laisser pour mort.
- Je ne pense pas, répondit-il en riant. Je levai les yeux vers lui. Il semblait déterminé.
- Si tu veux, dis-je à contre-coeur, tu ne diras pas que je ne t'ai pas prévenu. Le garçon esquissa un grand sourire.
- Au fait, je m'appelle Adam, se présenta-t-il.
- Hannah, répondis-je dans une ébauche de sourire. J'avais oublié ce que ça faisait de sourire.
- Alors, cette salle, me demanda-t-il.
- Oui, me rappellai-je, suis-moi. Je marchais en baissant la tête jusqu'à la porte de la salle 110. Si on me voyait, je signais mon arrêt de mort.
- C'est là. Il regardait ailleurs.
- Adam ?Je l'avais sorti de ses pensées et je sentais ses yeux revenir doucement à la réalité. Adam me scrute avant de déclarer :
- Je sais que tu n'as pas peur toi non plus. Tu fais comme si, mais on voit bien que non.
Qu'est-ce que c'est que ça ?
- Qu'est-ce que tu en sais, rétorquais-je, énervée. Il haussa les épaules.
- Ça se voit.Pourquoi est-ce qu'il me dit ça ?
- Ici, il vaut mieux faire semblant d'avoir peur. Je sais de quoi je parle.
- Mais tu n'y arrives pas. Faire semblant je veux dire.
Je ne réponds rien. Il avait réussi à me cerner en un coup d'oeil et avait provoqué mon incompréhension la plus totale. J'eus une pensée pour la promesse faite à ma mère, je devais faire semblant.
- Viens, on va être en retard, lui fis-je remarquer. Adam acquiesça et on rentra dans la salle de mathématiques. Je me demande si il s'était aperçu que j'avais éludé sa remarque. Durant l'heure qui suivit je me questionnais. Comment savait-il tout ça ? Soit ce type avait un pouvoir de discernement très prononcé, soit il me connaissait déjà. J'optais pour la première idée. Je me concentrais sur la nuque d'Alice Good, l'élève en face de moi, tout en me posant ces questions. D'où venait-il ? Que faisait-il ici ? Et puis qu'est-ce qu'il avait à émettre des conclusions aussi hâtives ? Je commençais à m'agiter. Il était si énervant qu'on puisse lire en moi comme dans un livre ouvert. En sortant, il me relança :
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Les larmes noires
Teen FictionHannah détestait sa vie. Comment avancer quand on nage dans les débris de souvenirs heureux appartenant depuis longtemps au passé ? Son beau-père violent, sa mère trop meurtrie pour s'en apercevoir. Enfermée dans une bulle de questions depuis la dis...