Gardes du corps 1

115 9 2
                                    

Je m'appelais Kim Taehyung, et j'étais le fils du président. J'ai très souvent changé d'école, car on finissait toujours par découvrir qui était mon père, et alors, je n'avais plus la paix. Beaucoup de mes camarades m'ont souvent dit que c'était génial, et qu'ils auraient aimé être à ma place. Si c'était possible, j'échangerais avec le premier venu. En effet, ce n'était pas très facile d'avoir un père connu. Mes amis étaient juste là par intérêt, et mes professeurs m'accordaient de bonnes notes juste par peur que j'aille cafarder. Rapidement, c'était devenu invivable. Sans compter qu'il y avait beaucoup d'élèves, encouragés par leurs parents, qui venaient se moquer de moi, ou m'insulter de toutes les horreurs. Parce que quand on était président, on ne se fait pas que des amis. Et les conséquences retombaient sur moi.

Ma mère étant parti vivre en Europe pour réaliser son rêve de devenir une grande actrice, je vivais seul. Mon père n'étant jamais là, on pouvait dire que j'avais grandi sans parents. Même les domestiques restaient courtois avec moi, et gardaient une certaine réserve. Dans une grande maison qui ressemblait à une villa, sans aucun bruit, et où tout m'était apporté sur un plateau d'argent, ce n'était pas marrant tous les jours. Je n'avais ni frère, ni sœur. Personne à qui parler.

J'avais dix-sept ans à présent, et j'étais en première. Cette année, je voulais faire pleins de trucs, ces choses que les adolescents normaux faisaient : manger une glace, me faire des amis, aller au ciné, rentrer à 2h du matin complètement bourré, avoir une petite amie. J'étais bien décidé à vivre normalement. Tant pis pour se qu'en pensera mon père. Il restait une semaine avant la rentrée, et j'étais cloitré à la maison. Je passais mes journées à dessiner. C'était ma passion. Evidemment, mon père n'était pas au courant, car il n'avait pas de temps à me consacrer. Sauf que ce jour-là, j'eus la surprise de recevoir un appel. C'était mon père. Je décrochai en fronçant les sourcils, car c'était rare que je puisse lui parler. J'entendais à travers le combiné le doux ronronnement du moteur de la limousine.

- Allô ? répondis-je.

- Ah fiston, comment ça va ? demanda-t-il.

Il enchaîna avant même que je ne puisse répondre.

- Je suis en route pour la maison. Ce soir, je t'emmène dîner au restaurant, qu'en dis-tu ?

- Pourquoi ce soir ? Je veux dire, tu es toujours occupé alors...

- Allons, ne sois pas fâché. Je veux passer du temps avec mon fils.

- Ai-je vraiment le choix ? murmurai-je tout bas, de sorte qu'il ne m'entendit pas.

- Bon, j'arrive dans deux heures.

Il raccrocha et je restai là, à regarder dans le vide, éberlué. Quelle mouche avait donc piqué mon père ? Ce n'était pas dans ses habitudes de vouloir diner avec moi. Pendant un moment, je craignis que ce ne soit une farce, puis, je me ravisai. Mon père n'était pas le genre d'homme qui avait de l'humour. Et évidemment, quand il parlait d'un restaurant, il voulait dire le plus chic et le plus cher de Corée. Des coups à la porte me firent sortir de ma rêverie. C'était le majordome.

- Monsieur Taehyung, j'ai préparé votre bain.

- Ah, merci Jensen. J'arrive dans deux secondes.

Il s'inclina et repartit. Franchement, mon père avait tout préparé à l'avance. Je n'avais même plus le droit de décider à quelle heure prendre mon bain ? Je soufflai et rangeai mon matériel de dessin. Une fois cela fait, je me rendis dans ma salle de bain personnelle, évidemment, et je me déshabillai. L'eau était à la température parfaite, et je m'y glissai avec délice, malgré ma mauvaise humeur. Des bulles de savons de toutes les couleurs emplissaient la baignoire, aussi grande qu'une piscine. Je me rappelai avec nostalgie lorsque je n'avais que cinq ans. A cette époque, mes parents et moi, nous vivions comme une famille normale, et nous étions heureux. Je me souvenais du rire de ma mère, des yeux pétillants de malice de mon père, et de moi, jouant tout nu dans le bain avec mes jouets en plastiques. C'était toujours la guerre pour me sortir de là, et me sécher.

Recueil de courtes histoires VkookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant