chapitre 6

277 16 8
                                    

Rennes, 20h32.

Assises sur ma petite terrasse, je contemple le soleil se coucher d'une lenteur rapide. Le vent est à la fois lourd et léger, soufflant dans sa douceur et sa chaleur. La lune est déjà de sortie et s'apprête à remplacer le soleil afin d'illuminer la nuit.
L'ennuie me fait contempler le cycle solaire, ce n'est pas une si mauvaise chose finalement. Ces petits moments qui peuvent paraître inutiles et sans intérêts sont en fait d'un grand repos.
Même si le travail est parfois pénible, il comble mon temps et m'empêche de m'ennuyer, ça a ses avantages parfois. Et comme je fais de ma passion mon travail, je passe relativement de bons moment en l'effectuant. Mais bon, un peu de repos comme maintenant ne peut me faire que du bien, au moins je me détend et ne réfléchit à rien, pour une fois.

Pendant que mes yeux contemplent le couché du soleil et que le léger vent me caresse le visage, j'entends mon téléphone sonner juste à côté de moi, me prévenant d'un appel. Je le prend donc de ma main droite pour regarder qui cherche à me joindre à cette heure ci, et le nom de contact qui s'affiche sur l'écran me fait légèrement sourire.
C'est Lucas. Je me demande bien pourquoi il m'appelle.
Je n'attend pas plus que ça et décroche, apportant mon téléphone jusqu'à mon oreille.

« - Allo ? dis-je.

- Oui, Ella, ça va ?

- Ca va et toi ?

- Ca va ça va. Dis, je suis en train de me balader là et je passe bientôt devant ton immeuble, ça te dit de me rejoindre ? C'est agréable de marcher dans la nuit comme ça.

- Je ne risque pas de me faire kidnapper par ta chaleureuse personne ? Dis-je ironiquement.

- Si si, c'est pour ça que je te demande de descendre justement, répond-il en entrant dans mon jeu.

- Ah, c'est plutôt risqué que je sorte de chez moi alors.

- Mais siii sors, j'ai des bonbons.

- C'est encore plus suspect si tu veux tout savoir !

- Ah oui, effectivement... mais tu auras le privilège de voir ma gueule d'ange.

- Ah ça m'intéresse.

- Ahh j'ai réussi.

- Je rigole, c'est les bonbons qui m'intéressent. Je met mes chaussures et j'arrive.

- D'accord, à de suite. »

Je raccroche aussitôt et rentre dans mon appartement pour enfiler des chaussures. Je prend mes clés et mon téléphone avant de sortir, sans oublier évidement, de fermer la porte à clé derrière moi.
Je suis simplement en sweat mais ce n'est pas très grave, il ne fait pas très froid le soir en ce moment.
Je sors de mon immeuble et aperçoit une ombre masculine un peu plus loin de moi, ayant des cheveux longs bruns encadrant son visage. Le chanteur tourne son regard dans ma direction puis me sourit en me voyant arriver vers lui. Son charmant sourire cause le mien.
Quand j'arrive à sa hauteur, je me rapproche de lui pour lui faire la bise, ce qui avait l'air d'être inattendu de son côté visiblement, vu sa tête suite à cette action.
Il se remet tout de même vite de ses émotions, puis regagne son sourire.

« - Je suis content de te voir, dit-il.

- Moi de même grande perche, dis-je en commençant à marcher.

- Ah ouais tu perds vraiment pas ton temps pour tailler les gens toi.

- Tu devrais être content, c'est une sorte de signe d'affection. »

Il rit légèrement. Un rire qui ressemble plutôt à un soufflement d'ailleurs, mais qui est un rire malgré tout.
Nous nous enfonçons plutôt silencieusement dans les rues nocturnes de Rennes. Nos épaules se frôlent à chaque pas, ce qui d'un côté me déstabilise légèrement, mais qui d'un autre me rassure. Être accompagnée dans la nuit me rassure, et c'est plutôt compréhensible.
Nous ne parlons pas, seuls le bruit de nos pas et les quelques voitures qui passent comblent ce silence apaisant.
A plusieurs reprise, je vois du coin de mon œil que Lucas tourne son regard vers moi, puis le retourne devant lui. Cela fait rougir mes joues mates, mais l'obscurité me cache. Heureusement, ce serait pour lui une occasion en or de se moquer de moi, et il en prendrait d'ailleurs un malin plaisir. Cela ne fait pas très longtemps que l'on se connaît, mais je commence tout de même a le connaître un minimum.
Nous passons devant l'entrée d'un grand parc, et je vois Lucas s'arrêter en m'attrapant doucement le bras.

« - Viens on y va, dit-il en me montrant l'entrée. »

Je me tourne vers l'entrée et réfléchit pendant une petite seconde, je ne sais même pas pourquoi. J'ai l'impression que mes actions s'effectuent en décalé, c'est comme si j'étais dans un autre monde.

« - Allez, dis-je en y entrant. »

Il me suit dans ma lancée, puis nous continuons de marcher mais cette fois ci sur l'herbe humide. A cet instant, je sens que mes jambes commencent à se fatiguer, un peu comme le reste de mon corps.

« - On s'assoit ? Je commence à fatiguer.

- Ouais la même, bah viens on s'assoit là. »

Il s'arrête et s'assoit dans l'herbe, là où nous étions en train de marcher à l'instant. Je fais de même et m'assoit à côté de lui, reposant mes jambes après ces longues minutes de marche qui ont été certes fatigantes, mais tellement agréables. Cela m'a fait beaucoup de bien.
Les grillons et les hiboux nous bercent, tandis que la lune nous éclaire en plus des nombreux réverbères présents dans le parc. Aucune présence vivante autour de nous, seulement lui et moi, silencieux.
Je reste là sans rien dire, puis je me rappelle de ce qu'il m'a dit toute à l'heure, au téléphone...

« - Eh, t'avais pas dit que t'avais des bonbons ? dis-je en me tournant vers lui. »

Juste après que j'ai posé ma question, il tourne son regard à son tour vers moi, et esquisse un sourire.

« - Tu perds pas le nord toi, dit-il en mettant sa main dans la poche de son sweat. »

Il en sort un paquet de crocodiles haribo. Je lâche un grand sourire puis en pioche un sans attendre.

« - T'as l'air particulièrement heureuse, dit-il.

- Ce sont mes bonbons préférés c'est pour ça, dis-je un bonbon en bouche.

- Ahhh, c'est donc pour ça, dit-il. Bah écoute, maintenant je le saurai.

- Je vois pas trop ce que ça va t'apporter mais oui, dis-je en riant. »

Il rit à son tour.
Je me sens bien, dans cet endroit, avec Lucas. Je n'ai aucune pression, toutes les ondes négatives qui m'habitent d'habitude ont pris la fuite.
Le temps est idéal, l'air est pur.
Mes yeux contemplent le ciel et les étoiles qui s'y trouvent, scintillantes de mille feux tel un majestueux diamant. C'est un si beau spectacle, aucun nuage ne voile cette beauté.
Mes mains piochent dans le paquet en plastique rempli de sucreries. Je l'apporte jusqu'à ma bouche et le sucre parvient jusqu'à mes papilles.
Je sens toujours ce regard brun posé sur moi. Inutile de préciser à qui ce regard appartient.
Il ne cesse de me regarder, mais cela ne me gêne pas pour autant, bien que je me demande pourquoi il fait ça.
Je finis par tourner mon regard vers lui à mon tour, ce qui fait que nos yeux se rencontrent. Une sorte de lien électrique se forment entre ces derniers, provoquant une sensation étrange dans le creux de mon abdomen. Les bruits des grillons et des hiboux ne font bizarrement plus aucun bruit depuis que nos regards se sont croisés.
Son beau visage qui n'est pas si loin de miens me laisse en admiration, il faut avouer qu'il a sacrément été gâté par la nature celui là.
Le léger vent continue de souffler, pendant que les feuilles et branches bougent en parfaite harmonie dans un chant radieux.
Je finis par esquisser un sourire puis à rire. Il n'a pas l'air de vraiment comprendre, mais il me suit tout de même dans mon action. Nos rires s'accordent et s'emmêlent en une douce mélodie.
Il faut dire que, si toutes mes prochaines sorties nocturnes ressembleront à ça, je n'hésiterai pas une seconde, je m'y rendrai.

Le mec du bus | lujipekaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant