Les apprentis mages [HeeJake]

Chapitre 1

Le froid était mordant. Il agressait la chair, engourdissait les muscles et faisait trembler les membres des pauvres êtres y étant soumis. Il était un cercueil de glace qui empêchait le moindre mouvement, qui le faisait sombrer de plus en plus profondément, si loin dans les ténèbres qu'il en était aveugle. Il n'y avait plus de sons, plus de couleurs, plus d'odeur. Juste un froid insoutenable et ce sommeil qui l'attirait irrésistiblement.

Heeseung tenta vainement de décoller ses lèvres mais elles étaient gelées, presque fondues l'une en l'autre par le gel, et il ne réussit qu'à les craqueler davantage. Sa narine sifflait alors que l'air aussi pur que glacial s'y engouffrait, lui apportant de quoi respirer pour vivre quelques minutes de plus, et sa gorge douloureusement nouée essayait désespérément de laisser passer un râle de plainte. Il n'avait pas mal, il ne sentait rien, mais il savait ce qui l'attendait.

Il s'endormait doucement, incapable de maintenir un état de conscience clair. Il avait échoué, il ne savait plus de quoi il était question mais ça ne pouvait être qu'un échec alors qu'il se retrouvait aux portes de la mort, prêt à être accueilli par la faucheuse elle-même. Il était grand, le prince bâtard de l'Empire Azure, agonisant sur un sol rocheux loin de tout. Il avait finalement la fin qu'il méritait, mort en étant seul et pitoyable, aux confins du monde. Personne ne le pleurerait, peut-être son cousin mais encore fallait il que les nouvelles parviennent aux oreilles de Sunghoon et rien n'était moins sûr.

Il tenta d'ouvrir ses yeux en vain, il aurait aimé avoir une vision autre qu'un noir absolu comme dernier souvenir mais cela lui demandait trop d'effort, il n'avait plus la force de rien, pas même celle d'espérer survivre une journée de plus. Son heure était arrivée, il avait provoqué le destin et en payait le prix. Son arrogance s'arrêtait là, il n'était finalement qu'un humain comme les autres. Pas plus intelligent, pas plus fort, juste Heeseung.

Il s'enfonça dans l'obscurité aussi terrifiante que réconfortante mais, juste avant de se laisser totalement sombrer, une sensation diffuse attira son attention. Un frottement, rapide et vif, sur son bras. Le mouvement se produisit bientôt de l'autre côté, puis sur ses joues, ses jambes, son torse, laissant derrière lui une subtile sensation de chaleur. Heeseung s'accrocha à cette lueur d'espoir apparue soudainement. Lui qui pensait avoir abandonné, n'avoir aucun regret, s'accrochait à ce frottement avec l'énergie du désespoir. Il pouvait encore vivre, encore être grand.

Heeseung fut incapable de bouger pendant ce qui lui sembla être une éternité, il ne sentait que les attouchements salvateurs sur son corps, la température de celui-ci qui remontait doucement et l'odeur rassurante d'un feu de bois. Ses membres se mirent à fourmiller au bout d'un moment, la chair passant d'un état glacial à normal et il geignit. C'était si désagréable, mais c'était également la preuve que son état s'améliorait : il avait retrouvé des sensations.

Un soupire lui échappa finalement alors qu'une masse se collait à lui, chaude et épousant merveilleusement son corps, alors qu'une épaisse couverture était ramenée sur lui. Il reconnaissait la sensation de la fourrure sur sa peau et ses doigts encore rigides grincèrent lorsqu'il s'y agrippa de toutes ses forces. C'était son lien avec la réalité, sa nouvelle chance. La pénombre l'entoura de nouveau, mais il n'y avait plus cette aura qui le terrifiait et lui indiquait que la fin de sa courte existence était au bout du tunnel. C'était un sommeil réparateur, sécurisé, qui l'attendait à présent. Heeseung plissa les paupières, il ne comprenait pas comment sa chance avait pu tourner d'une telle façon mais il ferait en sorte de remercier son sauveur, qu'importe son identité.

Il faisait encore froid lorsqu'il se réveilla, mais son corps n'était plus engourdi, il ressentait à nouveau ce qui l'entourait. Le jeune homme força ses paupières à se décoller pour pouvoir observer ce qu'il l'entourait. La première chose qu'il vit fut le noir, ce ne fut qu'après quelques secondes qu'il remarqua qu'il s'agissait en réalité de pénombre et non d'une obscurité totale. Ses yeux prirent peu de temps à s'habituer mais alors il put mieux regarder le lieu où il se trouvait. Le sol rocheux, tout comme le plafond intégralement fait de pierres irrégulières l'informèrent qu'il se trouvait dans une grotte ou tout du moins dans quelque chose qui y ressemblait grandement.