Chapitre 16 partie A

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Contre toute attente, Fury avait ramené Bucky Barnes.

Contre toute attente, le Winter Soldier était à présent assis sur une chaise dans l'une des salles d'infirmerie de la Tour Stark, une aiguille dans le bras, son sang s'écoulant dans une poche de sang.

Donc, contre toute attente, il y a une chance que Steve Rogers survive.

Tony avait du mal à accepter ça, et encore plus à s'en remettre. Il se tenait dans le couloir à l'extérieur de la pièce, observant dans l'ombre. Barnes était tendu, c'était atrocement évident. Il s'était lavé (au moins ça il savait encore le faire), et avait revêtu de nouveaux vêtements qu'ils avaient pris dans le placard de Steve. Il portait à présent un jean, une chemise gris chiné et une paire de baskets de Steve. Il ne s'était pas rasé, cependant, et ses cheveux étaient encore mouillés et collés à son visage. Bizarrement, il avait l'air à la fois dangereux et pathétique. C'était une juxtaposition étrange, et Tony n'aimait pas ce qu'il ressentait en voyant ça, cette combinaison encore plus étrange de terreur, de fureur et de pitié. Il n'avait pas vu Barnes depuis que Steve l'avait laissé partir à Times Square (bien évidemment), mais dans le court laps de temps qui s'était écoulé depuis, il avait... changé. Il n'avait pas vraiment changé, mais il dégageait une étrange combinaison de fragilité et de rétablissement. Tony comprit pourquoi. Cet homme en face de lui... Il était une étrange combinaison de Bucky Barnes et du Winter Soldier.

Cela rendait plus difficile de le détester.

Tony n'était pas venu ici pour ça. Franchement, après les derniers jours, il n'avait pas besoin de plus d'émotions refoulées qui le déchiraient de l'intérieur. Il n'avait pas besoin de plus de colère, plus de chagrin, plus de frustration. Mais alors qu'il se tenait là, à le regarder, tapit dans l'ombre, dans le couloir comme une sorte de menace silencieuse, il ne pouvait pas s'en empêcher. Il repensa au moment où il avait respecté les souhaits de Steve et laissé Barnes partir. Pourquoi est-ce qu'il avait fait ça putain?

Cette putain d'affaire aurait été tellement plus simple si Barnes avait été là où il devait être. Enfermé dans une boîte quelque part. Dans une unité psychiatrique ou une prison. Les deux auraient très bien convenu à Tony. Ils auraient pu y aller, le droguer aux tranquillisants, lui planter une aiguille dans le bras sans problème, et ce cauchemar aurait été terminé depuis des jours. Il n'aurait pas eu à regarder Steve souffrir de la maladie causée par sa propre négligence, ni à le voir terrifié alors qu'ils l'enfermaient dans la capsule de cryostase, ni à devoir se battre pour le maintenir en vie alors que son cœur et ses poumons s'étaient arrêtés. Il n'aurait pas eu à regarder Natasha supplier son mari de continuer à se battre pour vivre. Il n'aurait pas eu non plus à prier lui-même dans sa tête pour qu'il parte sans douleur. Rétrospectivement. Il voulait se frapper lui-même pour avoir eu une telle pensée. Putain de rétrospection.

Barnes n'avait pas dit un mot depuis que Fury était arrivé avec lui. Il était complètement silencieux, ses yeux sombres et froncés une seconde, ouverts et effrayés la suivante. C'était très perturbant, il ne semblait pas vraiment leur faire confiance ou se soucier de Rogers. Pourtant, il était là, non ? D'une certaine façon, il devait se sentir concerné, même s'il avait brièvement regardé le corps mourant de Steve sans le reconnaitre, et sans montrer la moindre émotion. Tony le fixait à présent du regard, lui et Betty Ross (qui avait retrouvé le sourire face à la possibilité de mettre à profit les procédures qu'elle avait développées pour créer un antisérum avec les échantillons de Barnes) cette dernière vérifiait que l'aiguille était bien fixée dans l'avant-bras de Barnes et que les tubes soient bien en places pour que le flux de sang soit bon. Il n'arrivait pas à lire l'expression de Barnes, ce vide indéfectible et froid. Son visage était figé dans un froncement de sourcils qui semblait plutôt provenir d'un manque d'émotion, comme un paramètre par défaut de son expression faciale. Et ces satanés yeux vides... Il resta assis là comme une statue, sans bouger pendant qu'on lui prélevait une poche de sang après l'autre, sans répondre lorsque Betty lui demandait calmement d'une petite voix s'il allait bien. Il ne buvait pas le jus de fruit qu'elle avait apporté et ne mangeait pas non plus la nourriture qui allait avec (dont il semblait avoir désespérément besoin). Non pas que Tony en ait quelque chose à foutre, parce qu'il s'en moquait, mais le type était plus mince que lorsqu'il l'avait vu auparavant et il semblait... abattu). Il ne clignait même pas des yeux, enfin, Tony ne le vit jamais le faire. Comment est-ce qu'il peut être comme ça putain ? Comment est-ce qu'il peut s'en foutre ? Merde. Son regard semblait dénué d'âme... C'était comme ça qu'il regardait Steve Rogers, son soi-disant meilleur ami, alors qu'il gisait aux portes de la mort. Comme s'il ne le connaissait pas. Peut-être qu'il ne le connaissait pas.

Storm Front ( VF ) TOME 5 THE HEART OF THE STORMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant