II.

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Deux ans plus tard,

Los Angeles, USA.


"-L'Oscars de la meilleure actrice revient à..."

Il y a eu une pause durant laquelle le présentateur de la cérémonie a fait le tour de la salle des yeux, un grand sourire aux lèvres tandis qu'il ouvrait l'enveloppe et tirait la carte.

Mon cœur battait normalement dans ma poitrine, je ne ressentais ni excitation, ni peur, ni amusement alors que je voulais, je voulais ressentir toutes ses choses. J'étais vide, atrocement vide, et je ne pouvais rien y faire. J'avais comme un trou noir dans la poitrine. C'était comme si on avait volé une part de moi. Une part que je ne retrouverais jamais, du moins, pas tant qu'il le voulait.

Je sentais, au fond de moi, qu'en m'accordant mon vœu, Méphistophélès avait pris une part de moi, une part que je ne retrouverais jamais.

Jamais.

"-Margot Davis !"

J'ai fait mine d'être choquée et j'ai fait venir les larmes dans mes yeux. Lorsque je me suis dirigée vers la scène, j'ai souri à mes collègues qui me félicitaient, parfois du bout des lèvres, parfois avec de grands sourires sincères.

Je lisais du respect dans les regards. Au moins, le démon avait tenu parole, même si mes collègues étaient dégoûtés d'avoir perdu, ils ne pouvaient pas contester mon talent. Un talent qui me permettait de rester humaine, un talent qui faisait que les autres ne voyaient pas le vide à l'intérieur de moi. Un talent qui n'était pas le mien, qui m'avait été donné dans un paquet onyx par le diable en personne. Un paquet empoisonné.

J'ai fait de mon mieux pour faire de mon discours quelque chose de poignant, louant les louanges de mon équipe, de ceux qui m'avaient accompagné durant ses derniers mois pour ce film et ce rôle qui m'avait permis de gagner ce prix. J'ai remercié tout le monde, mais pas lui, pas le diable. Me regardait-il? Où qu'il soit, avait-il un œil sur moi? J'en doutais, je n'étais qu'une passante dans sa vie, une âme de plus à récupérer, un nom sur une liste que je savais longue. En fixant tous ses acteurs, ses chanteurs, ses producteurs, ses réalisateurs, je me suis demandé combien d'entre eux avaient cédé à la tentation, avaient un M sur le corps. On disait souvent que les gens de cette industrie vendaient leurs âmes au diable, je n'y avait jamais cru avant, mais maintenant que j'étais là, en plein dedans, je ne pouvais que me demander si eux aussi avaient une horloge au-dessus de la tête où chaque minute sonnait comme la dernière.


~~~~~~


Après la cérémonie, il était de tradition de se joindre aux festivités avec tout le gratin hollywoodien.

Je me fondais parfaitement dans la masse, saluant les autres acteurs, mes anciens collaborateurs comme me l'avait conseillé mon agent, Raquel Reid.

Nous nous étions rencontrés lors de mon semestre ici, lors d'une audition où un étranger était attendu. J'avais déjà réalisé que j'avais changé, que j'étais douée, même si je n'en ressentais aucune joie. Ce n'était donc pas la première fois que je passais une audition en étant ma nouvelle moi, mais la première fois que je passais dans un autre pays, sous de nouveaux standards.

Je les avais convaincus tout de suite, ils avaient été estomaqués par ma prestation d'un personnage tout de fois banale. Ils avaient testé mon anglais, mon accent avant de me donner un rôle plus grand, je venais de passer d'un personnage oubliable à l'un des rôles secondaires. Raquel avait tout de suite misé sur moi, me prenant sous son aile et me promettant de me conduire au sommet, à aujourd'hui.

The Point of No ReturnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant