Chapitre 2 : Dessinateur en herbe.

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Tw : mention de gore et de meurtre.

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Avant d'utiliser la technique du persona, j'exprimais mes émotions en passant par un personnage qui, en fait, était plus une métaphore qu'autre chose. Une incarnation de mes émotions, celles que je refoulais sans cesse par crainte d'être jugé ou d'envenimer la situation. Exutoire serait le mot juste. Le principe est plutôt simple à comprendre : à titre d'exemple, il m'arrivait souvent je me dessiner en train de me venger de mes ennemis lorsque j'étais en colère. Ce qui en soit, n'est pas si inhabituel. Tout le monde a déjà fait au moins une fois une caricature de quelqu'un qu'il n'apprécie pas, rajoutant souvent des oreilles d'ânes, des crottes dans le nez ou d'autres choses peu ragoûtantes. C'est tout à fait normal, quand quelqu'un nous mène la vie dure, d'avoir parfois envie de se venger, de se défouler un bon coup. Et mieux vaut que cela se passe sur un papier.

Bien sûr, le dit dessin n'est pas sensé tourner et se retrouver dans les mains d'autres personnes. Sinon, ce serait de l'humiliation. Il y a cependant une notion flou à cela. Par exemple, on voit parfois des affiches des candidats lors des élections présidentielles accrochées dans la rue être tagué. On parle alors de "dégradations". Mais quand une personne tague l'affiche d'un politicien contraire à ses idéaux politique, c'est bien souvent pour le discréditer ou pour dénoncer sa politique. C'est une forme de protestation non violente, en somme. La différence, c'est qu'il s'agit d'une personnalité publique. Il est évident que dessiner une moustache sur un panneau publicitaire n'aura pas les mêmes conséquences que si il s'agissait d'une personne du domaine privé, même si cela peut être désagréable ou agacant pour monsieur futur président de la république de retrouver sa jolie affiche recouverte de dessins visant à lui rappeler qu'il s'était chier dessus dans l'amphi N de Tolbiac.

Mais pour ma part, je dessinais des choses un peu plus violentes que de simples crottes dans le nez. Si je dois être tout à fait franc avec vous, me dessiner en train de tuer à coups de couteau les gens qui m'ont blessé me faisait un bien fou. Avec du recul, je me rend compte que cela peut paraître choquant, voir alarmant. Mais je vous rassure : après m'être défoulé, ce genre de dessins finissaient toujours à la poubelle. Connaissez-vous le principe de la catharsis ? Il s'agit d'une libération, d'une purgation des passions et des pulsions. On retrouve beaucoup cette notion dans le théâtre notamment. Si je peux vous donner une image, c'est comme extraire toute les pensées et émotions négatives de votre esprit pour les jeter au fond d'un puit. Et mon puit à moi, c'est mes dessins. Car en représentant ma colère, je la fais disparaître.

Ce qui est pratique avec le dessin, c'est que tout le monde peut le faire. Pas la peine d'être un expert en proportions, en lumières ou en perspectives pour exprimer nos émotions. Un bonhomme bâton ou un coup de pinceau suffit amplement. Mais je vous l'accorde, cela peut devenir inquiétant si une personne passe ses journées à se dessiner en train de commettre des tueries, surtout si elles sont graphiques. Il est donc important de veiller à ce que la catharsis ne vire pas a l'obsession.

C'est un peu comme les jeux vidéos : beaucoup de personnes apprécient les jeux de tirs car ça leur permet de se défouler après une dure journée ou un épisode de colère. Et contrairement à ce qu'on veut nous faire croire à la télévision, non, ils ne rendent pas violents. Rare sont les gens qui ont déjà eu envie de faire un massacre après une mauvaise partie de Mario, Tetris ou, par tout hasard, Police Simulator. Alors je dis pas que c'est jamais arrivé, mais à en croire les informations, c'est un truc qui arrive souvent et qui concernent exclusivement les jeunes. Alors que de nos jours, ont est constamment exposé à la violence. Pourquoi les jeux vidéos seraient-ils les seuls coupables ? Peut-être que mon oncle Philippe décidera de péter les plombs après avoir vu Il faut sauver le soldat Ryan avec Tom Hanks. Ou bien c'est mon grand frère John, après avoir regardé un reportage de BFMTV. Comme je vous le disais, de la violence, on peut en trouver partout. Que ce soit à la télé, en musique, ou sur un papier. Et est-ce que j'ai déjà eu envie de faire du mal aux autres à cause de mes dessins ? Non.

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